Gou Tanabe nous présente le chef-d’œuvre d’H.P. Lovecraft « Les montagnes hallucinées » sous forme de manga en deux tomes. Déjà que de feuilleter Lovecraft constitue en soi un voyage dans l’étrange, le faire en commençant par la fin d’un bouquin et en lisant de droite à gauche ajoute encore à la bizarrerie de l’expérience.
Cette transposition de Lovecraft en manga rejoint efficacement les amateurs de Lovecraft. D’ailleurs, les statistiques le prouvent. Les 382 évaluations laissées sur Amazon démontrent une satisfaction très nette de la clientèle, avec un total de 4,9/5 étoiles au moment d’écrire ces lignes.
Je préfère normalement les bandes dessinées et les romans graphiques en couleurs, mais l’interprétation en noir et blanc de la production de Lovecraft va à merveille à ce monde fantastique dans lequel nous plonge Tanabe.
Lovecraft rend crédible une œuvre fantasmagorique en intégrant dans la trame un mélange bien dosé d’éléments réels et de fiction. À moins d’être soi-même archéologue et paléontologue, on peut difficilement vérifier quelles données appartiennent véritablement à la science. Cela permet d’encadrer davantage le lecteur. On reconnaît les instants de pure imagination, mais on reste accroché.
Je me mets à la place d’une personne qui vivait à l’époque de Lovecraft, au moment où l’Antarctique ne constituait qu’un continent mystérieux et encore inexploré dans sa totalité. Une histoire remplie d’éléments de fiction gagnerait en crédibilité, alors que personne ne pourrait vraiment confirmer ou infirmer certains propos de l’auteur.
On trouve dans « Les montagnes hallucinées » des propos sur la navigation à voile, l’aviation, la météo extrême, la survie dans les espaces glacés et isolés. Le lecteur assiste aux problèmes vécus par les différents équipages partis explorer l’Antarctique. Les découvertes de plus en plus saisissantes des scientifiques les forcent à prendre des décisions risquées qui les plongent dans un monde inconnu. Bref, des thèmes qui plaisent encore aujourd’hui à la plupart des gens.
Les deux tomes totalisent autour de 650 pages qu’on feuillette avec intérêt en une journée puisque plusieurs planches n’incluent aucun texte.
Le roman « Un monde au-delà des hommes » passionnera spécialement les lecteurs dont les connaissances sur les premières expéditions en Antarctique s’avèrent limitées. Si vous ne savez pas qui du Norvégien Roald Amundsen ou du Britannique Robert Scott a atteint le pôle Sud en Antarctique le premier, évitez de faire la recherche avant d’ouvrir ce livre. Vous y gagnerez en intérêt.
À l’époque des grandes conquêtes des territoires encore vierges de la planète, les explorateurs risquaient leur vie pour la gloire de leur pays. On assiste donc ici à une course entre la Norvège et la Grande-Bretagne pour parvenir au pôle Sud en premier.
Ce roman historique ne contient que 134 pages, ce qui permet à l’autrice de se concentrer sur l’essentiel. Elle a divisé le livre en deux parties. La première porte sur Amundsen, la deuxième sur Scott. Les deux hommes ont utilisé des méthodes très différentes pour arriver à leur fin. Elle inclut en début de bouquin une carte montrant les trajets empruntés par les deux explorateurs et les endroits sélectionnés pour faire des arrêts.
L’autrice Catherine Hermary-Vieille traite de la préparation du voyage, des choix stratégiques quant aux objectifs, des obstacles rencontrés en chemin, sans oublier l’attitude mentale adoptée par chaque explorateur et membres de l’expédition.
Lors de ce voyage, un des deux chefs d’expédition utilisera des chiens de traîneaux comme moyen principal pour se déplacer tandis que l’autre tentera de progresser avec des mulets. Un n’aura qu’un objectif en tête, l’autre aura plusieurs buts à atteindre. Un se comportera en dirigeant flexible, l’autre sera plus intransigeant. Les choix et l’attitude de chaque explorateur auront un impact direct sur le succès de l’expédition.
Il faut noter que les deux concurrents ne commencent pas leur voyage vers l’Antarctique en même temps, ce qui occasionne un déséquilibre dès le départ quant à la date d’arrivée au pôle Sud. Mais, malgré tout, une fois que l’on connaît ce fait, il reste encore un continent gelé à traverser, des hommes à nourrir, des crevasses à éviter, des engelures à soigner. On doit aussi pouvoir s’en sortir vivant.
Un tel roman se lit en une journée. On pardonne certaines descriptions un peu sommaires et même une petite erreur comme celle de la page 19 où le nom du chien inuit « Funcha » apparaît deux fois dans la liste. Ces distractions ne diminuent pas l’intensité du récit. Il s’agit après tout d’histoires vécues par des hommes qui sont allés au bout d’eux-mêmes pour la gloire de leur pays.
Aujourd’hui, on assiste à une course similaire entre les pays pour envoyer des humains sur la planète mars. Quel pays arrivera en premier ? Et une fois qu’il y est, aura-t-il le droit de revendiquer une planète pour lui-même au détriment des autres humains de la Terre ?
Cliquez sur le lien pour d’autres livres portant sur des biographies sur mon blogue.
« Quand on n’a plus rien à perdre, on peut prendre tous les risques… ». Voici la phrase que l’on retrouve à l’endos de la bande dessinée « 13 h 17 dans la vie de Jonathan Lassiter » et qui résume le mieux cette œuvre francophone parue en 2023.
Jonathan Lassiter travaille comme assureur à Keanway, une petite ville reculée du Nebraska. Du jour au lendemain, sa femme le quitte, il perd son emploi, se fait voler son portefeuille. Bref sa vie embrasse soudainement un virage inattendu. Il a deux choix : soit il s’apitoie sur son sort, soit il se transforme. Sa rencontre fortuite avec Edward, homme « distingué, cultivé et cynique » le forcera à se positionner.
C’est d’abord la qualité du graphisme qui m’a accroché. Ce n’est pas une de ces publications dont on se demande si sa conception tient en un mois et qui se veut originale à travers l’absence de détails, et du même coup de travail. Cet album a nécessité un effort très important et cela se voit au premier coup d’œil.
Tout s’y trouve : le choix judicieux des angles, le dessin raffiné et d’une grande maîtrise, le maintien habile de l’atmosphère à travers des couleurs bien dosées et sous-saturées, le scénario très bien ficelé. Cette bande dessinée conserve l’intérêt du lecteur du début à la fin, sans aucun temps mort.
Le personnage principal m’a fait penser au célèbre acteur Vincent Price.
Il était très connu à l’époque pour ses rôles dans des films d’horreur. La grande ressemblance ne m’apparaît pas fortuite. Mais cela n’enlève rien à la vraisemblance de l’histoire, au contraire.
Le roman graphique « Un tournage en enfer : au cœur d’Apocalypse Now » nous plonge au centre de la création du fameux film de Francis Ford Coppola porté à l’écran en 1979. Comme le signale le réalisateur, « […] nous étions dans la jungle. Nous étions trop nombreux. Nous avions accès à trop d’argent et de matériel, et, peu à peu, nous sommes tous devenus fous… ».
Cela avait mal commencé. Dès le début, le réalisateur ne peut convaincre des acteurs bien connus de s’impliquer dans son film. Tour à tour, des comédiens comme Jack Nicholson, Al Pacino, Robert Redford et James Caan refusent de s’associer à l’aventure. Coppola poursuit ses recherches et les entrevues.
En tant que lecteurs, nous pénétrons sur les lieux de production et recevons les confidences des proches du cinéaste. Le tournage commence dans la jungle des Philippines, même si Coppola n’a encore aucune idée du scénario de la fin de son œuvre. Cela le hantera tout au long de la réalisation, lui causant des nuits blanches alors qu’il est déjà passablement épuisé.
Les dépassements de coûts s’enchaînent et la pression des bailleurs de fonds s’accroît toujours davantage sur le metteur en scène. On lui demande de boucler son œuvre cinématographique au plus tôt, ce qu’il s’avère incapable d’accomplir. Coppola en vient à garantir les fonds requis en s’engageant à rembourser lui-même la dette si les recettes en salle n’atteignent pas $40 millions de dollars.
De plus, on a tenu pour acquis que le gouvernement américain fournirait les hélicoptères de combat nécessaires à l’action du film. Mais, au lendemain de la guerre du Vietnam, l’intérêt des politiciens américains pour ce genre de demande diminue. Le réalisateur doit se tourner vers le président des Philippines d’alors, Ferdinand Marcos, pour obtenir des hélicos et du personnel, moyennant certaines rétributions et compensations. Mais ces appareils quittent parfois la scène sur ordre de Marcos pour aller chasser les ennemis du régime. On prend encore du retard…
On a pensé qu’Harvey Keitel serait le comédien idéal pour donner la réplique à Robert Duvall. De nombreuses séquences plus tard, l’évidence apparaît : l’homme ne fait pas le poids pour plusieurs raisons. On court à la catastrophe et on doit d’urgence contacter Martin Sheen et le supplier de remplacer Keitel. On doit reprendre de multiples scènes avec le nouvel acteur, les retards s’accumulent, et donc les frais associés.
Toutes sortes d’autres embûches attendent le réalisateur et son équipe tout au long du tournage, dont la barrière de langue avec les Philippins et une tempête qui détruit le décor. L’usage généralisé de drogues et d’alcool par le personnel et les pilotes d’hélicoptères n’aide en rien la situation.
Les moustiques, la chaleur et les exigences constantes de Coppola épuisent des acteurs. Martin Sheen tombe gravement malade et on doit employer son frère pour certaines scènes secondaires. Plutôt que de n’utiliser que des figurants pour simuler des morts, un membre du personnel se rend à la morgue et revient avec un cadavre. Cela provoque l’arrivée des forces policières et on règle le problème avec de généreuses sommes d’argent.
Bien d’autres facteurs viennent encore retarder la clôture du tournage et en augmenter les coûts. Il faut citer en exemple les exigences de Marlon Brando. On réussit à le ramener sur le plateau de tournage pour une journée supplémentaire, à condition de débourser 70 000 $ de plus que prévu.
Le tournage se termine finalement en 1977. L’équipe affrète un avion privé pour transporter 381 kilomètres de pellicule originale vers les États-Unis. Le montage du film s’avère cependant un calvaire. On dispose de trop de matériel à analyser. En 2001, Coppola présentera une mouture modifiée de sa production originale de 1979. Il livrera enfin en 2019 une dernière version de 182 minutes, Apocalype Now « Final cut » , soit plus de quarante ans après la sortie initiale.
Les recettes rencontreront les espérances du réalisateur et il gagnera finalement son pari. En tout, le film aura généré $140 millions à partir d’un budget total de $30 millions.
Dimanche 24 septembre 2023, la compagnie Quatre Natures organisait un cours certifié de kayak de mer niveau 1 sur le fleuve Saint-Laurent, à partir de l’île d’Orléans. L’inscription se faisant longtemps d’avance, on devait avoir un peu de chance lors de l’activité, car elle aurait lieu autant par beau temps que par météo pourrie.
Je tente donc ma chance. Heureusement, une journée incroyable attend les six étudiants en cette fin de septembre : plein soleil et une vingtaine de degrés Celsius. Comment doit-on se vêtir pour les circonstances ? On sait que la température du corps humain est de 37 degrés Celsius. Le kayakiste additionne la température de l’eau et celle de l’air et compare le total à la température du corps humain. Le fleuve étant cette journée-là à 18 degrés et l’air autour de 20 degrés, cela donne un total de 38. Ce chiffre étant légèrement supérieur à la température normale du corps, on peut porter des vêtements usuels pour les activités dans l’eau, et non pas une combinaison isothermique.
L’avant-midi sert à couvrir la théorie. Personne ne met un pied dans l’eau. L’instructeur discute de ce que le kayakiste doit obligatoirement avoir à bord, de la qualité relative des différents équipements, de la préparation, des communications et fréquences radio, de la sécurité et de la prévention de l’hypothermie, etc.
Après le dîner, on place d’abord les kayaks sur le gazon puis on apprend le vocabulaire relié à chaque partie du kayak. Par la suite, l’étudiant s’installe dans l’embarcation et se familiarise avec les ajustements des cale-pieds du kayak, la façon de tenir la pagaie, l’installation de la jupette, etc. On apporte ensuite les embarcations sur la rive et la pratique du kayaking débute.
Tout d’abord, on apprend les manœuvres de base. Comment embarquer et débarquer, la trajectoire que la pagaie doit suivre dans l’eau selon que l’on veut avancer, reculer, tourner. On discute de la position correcte du corps, des bras et des poignets sur la pagaie et de l’importance de la rotation du bassin pour forcer adéquatement. On réalise rapidement l’influence des vents de côté sur le kayak, spécialement lorsqu’il n’a pas de dérive ou de gouvernail.
On considère le fleuve comme étant de niveau 2 pour la pratique du kayak. Le courant est important et on compose avec des marées de trois mètres. Le vent autour de l’île est également plus fort qu’à Québec. Le pratiquant de niveau 1 est invité à se trouver des endroits de niveau 1 pour prendre de l’expérience et de ne jamais partir seul à cette étape de son apprentissage.
Pendant les exercices, on aperçoit au large les navires porte-conteneurs et les différents bateaux de plaisance. Les plus gros bâtiments génèrent des vagues qui prennent entre cinq et dix minutes avant d’atteindre la rive. Lorsque celles-ci approchent, l’instructeur avertit les kayakistes novices de se tourner face à l’onde, de façon à limiter les effets sur l’embarcation.
Puis viennent les manœuvres d’urgence : quelle est la procédure pour sortir d’un kayak qui vient de chavirer ? Comment aider quelqu’un qui a chaviré ?
Je n’ai pas eu le temps de me rendre à cette étape du cours. J’ai chaviré avant. Je ne me rappelle pas comment j’ai fait pour m’extirper du kayak et revenir à la surface, mais on ne parle pas ici d’une méthode approuvée. Le cerveau détecte immédiatement le danger et s’organise pour que le corps sorte du kayak et que la tête ne reste pas trop longtemps sous l’eau.
Dans les minutes qui suivent, l’instructeur nous enseigne comment s’effectue la sortie classique d’un kayak chaviré. Nous travaillons par groupes de deux. Au niveau 1, il n’est pas encore question d’utiliser la pagaie pour forcer la rotation du kayak.
Pour obtenir la certification KDM 1, tous doivent se pencher de côté pour que le kayak se renverse. Une fois submergé, l’étudiant se penche vers l’avant, décroche la jupette attachée au kayak, tape lentement trois fois sur la coque du kayak pour signaler qu’il est en contrôle de ce qu’il fait. On veut éviter les réactions imprévisibles. Il se pousse ensuite hors du kayak en plaçant ses mains à la hauteur des hanches sur la hiloire. Dès sa sortie de l’eau, il doit absolument se tenir le long de son kayak, grâce à la ligne de vie. Le tout ne prend que quelques secondes. Ici et là, on entend un peu tousser à la sortie de l’eau, mais sans plus. Une bonne gorgée de fleuve Saint-Laurent renforce le système immunitaire.
Vient ensuite la récupération de la personne dans l’eau. Comme nous travaillons en équipe, le ou la kayakiste en difficulté s’accroche au-devant de notre kayak et demeure là, le temps que l’on rattrape son kayak, le monte sur notre embarcation, le vide de son eau, le retourne et le positionne correctement.
La personne accrochée au kayak lâche ensuite sa prise, et selon la méthode enseignée, grimpe à nouveau dans son embarcation pendant qu’on la tient solidement. L’important ici est de conserver son centre de gravité le plus bas possible. Si la personne ne se presse pas et procède par étapes, l’opération est un succès à tous les coups.
Quelques autres exercices suivent et le retour s’effectue vers la plage de l’île d’Orléans quelques heures plus tard. Une fois tous les participants séchés et rhabillés chaudement, le cours se termine par quelques notions de météo, dont la nécessité de consulter les prévisions et les radars météorologiques ainsi que de revenir rapidement au bord lorsqu’il y a présence de cellules orageuses.
On survole également le calcul de la marée (règle des 12) et la façon d’attacher un kayak sur un toit d’auto. Combien de points de fixations ? Quels sont les équipements disponibles pour faciliter la tâche ? Où doit-on passer les harnais pour éviter de briser le kayak ? Etc.
La remise du certificat KDM 1 se fait environ huit à neuf heures après le début du cours, selon l’évaluation de l’instructeur. J’ai noté que lors du retour à la maison, dans la chaleur de la voiture, je n’avais vraiment pas envie de me presser sur la route. Mais on revient vite à la réalité quand on voit la vitesse à laquelle les autos arrivent derrière soi.
Bref, une journée bien remplie dont on se souvient!
Cette bande dessinée publiée en 2023 constitue la troisième de la série Warbirds, aux éditions Soleil.
Le 18 avril 1942, quelques mois après le raid sur Pearl Harbor, seize bombardiers B-25B Mitchell décollent du nouveau porte-avions Hornet pour une attaque-surprise sur cinq villes japonaises. Il s’agit en fait d’une mission connue sous le nom de « Raid Doolittle ».
Ces machines qui ne sont pas conçues pour opérer à partir d’un porte-avions ne pourront rejoindre leurs cibles et revenir à bon port en sécurité, faute de carburant suffisant. Tous les pilotes en sont parfaitement conscients et se portent volontaires.
La flotte de seize appareils, commandée par Jimmy Doolittle, atteint avec succès son objectif visant à semer la confusion chez l’adversaire et montrer que le Japon demeure vulnérable pour des attaques-surprises. Les Japonais se demandent comment des bombardiers américains ont pu atteindre et frapper leur pays ? D’où sont-ils décollés ? Ils savent bien que les B-25 Mitchell ne sont pas conçus pour décoller d’un porte-avions et qu’ils demeurent incapables de s’y poser.
Le génie de l’intervention tient à la combinaison de multiples décisions très risquées qui, ensemble, surprennent l’ennemi. Premièrement, faute de pouvoir faire atterrir les avions sur le Hornet, on les installe avec une grue, en sachant bien que jamais ils ne reviendront sur le navire.
De plus, on entraîne les commandants de bord à décoller sur des distances impensables pour eux, au moyen d’une technique poussée à l’extrême. Le déplacement rapide du vaisseau améliore la composante de vent de face si indispensable pour des manœuvres aussi périlleuses.
Les pilotes doivent faire preuve d’une très grande maîtrise pour respecter la trajectoire de départ sur une plateforme qui bouge de gauche à droite en pleine tempête. On doit absolument éviter les bâtiments sur le côté du Hornet et l’écart disponible entre le bout de l’aile et la tour du navire ne dépasse pas deux mètres. Malgré tous les obstacles, l’ensemble des B-25 réussit à décoller. Ce sera une mission sans retour vers le Japon.
Doolittle pilote le premier B-25 qui décollera du porte-avions. Il ne bénéficie que d’une très petite portion du pont pour s’exécuter, car il y a encore quinze autres bombardiers qui attendent leur tour pour s’envoler. Le deuxième pilote à quitter le pont évite de justesse un amerrissage, alors que l’appareil s’enfonce légèrement et qu’une roue du train d’atterrissage touche à l’eau. Mais l’avion gagne juste assez de vitesse pour demeurer en l’air.
Les bombardiers et équipages connaissent des sorts différents, une fois les pilonnages effectués sur les objectifs japonais. Les auteurs concluent ainsi : « Le raid détruisit 112 bâtiments et fit 87 morts, en environ 6 minutes. […] La destruction de 15 des 16 B-25, incapables de rejoindre un terrain chinois pour s’y poser, fut tout de même à déplorer, le 16e B-25 ayant atterri sans encombre en URSS. À déplorer aussi la mort accidentelle de trois aviateurs (avions 3 et 6) et la capture de 8 autres (avions 6 et 16) par les Japonais, dont 4 ne revinrent jamais au pays, 3 ayant été exécutés comme “criminels de guerre” et le 4e étant mort en captivité. Bien pire encore, les Japonais se vengèrent des Chinois, qui avaient aidé tous les aviateurs survivants, en organisant le massacre d’environ 250 000 civils dans les provinces du Zhejiang et du Jiangxi alors sous leur contrôle. Ce qui laissera des traces… ».
Des tests d’atterrissage et de décollage sur un autre porte-avions, le Forrestal, ont aussi été effectués des décennies plus tard avec un C-130 Hercules. J’ai tenté de reprendre l’expérience en simulation de vol. Le vol se trouve dans la section « vols virtuels exigeants » de mon blogue. Le Forrestal n’étant pas disponible sous forme virtuelle, je me suis servi du porte-avions USS Enterprise.
Nous avons tous entendu parler du drame vécu par les habitants de Lac-Mégantic en 2013, alors qu’un train pétroliersans conducteur de la compagnie CP tirant des centaines de wagons de pétrole explosif, déraille en pleine nuit, explose et tue 47 habitants de la ville.
La bande dessinée (ou roman graphique pour certains) « Mégantic – Un train dans la nuit » vient compléter ce que l’on pensait connaître de cette histoire vécue, en exposant plusieurs informations capitales passées sous silence ou survolées trop rapidement par les médias.
L’autrice Anne-Marie Saint-Cerny a travaillé durant des années sur le dossier et, pour bien transmettre le contenu et les émotions en images, s’est assuré le concours de Christian Quesnel. Le résultat est extrêmement intéressant. La formule fonctionne : les dessins sont d’une grande précision, la mise en page laisse de l’espace pour la réflexion, les couleurs sont choisies judicieusement.
Dans l’explosion du train à Lac-Mégantic, il y a plusieurs facteurs en jeu, dont :
Des dirigeants de la compagnie CP qui font des choix catastrophiques.
Un désir de satisfaire, comme toujours, les exigences des actionnaires. On coupe le personnel et on s’auto-évalue quant à la sécurité.
Un seul chauffeur est autorisé pour un train transportant des centaines de citernes d’explosifs.
Les politiciens donnent leur accord avec les nouvelles coupes proposées par la compagnie.
On a affaire à de la pensée magique: en cas de pépin avec le chauffeur, le train s’arrête tout seul grâce à un mécanisme qui, pourtant, est toujours susceptible de faire défaut éventuellement.
Les rails ne sont pas ce qu’il y a de plus récent.
Le transportde la marchandise dangereuse est accordé à une compagnie à la réputation douteuse, la MMA.
Les citernesDOT-111 utilisées sont décriées comme étant trop fragiles pour les matières dangereuses et ciblées dans plus de 25 enquêtes.
Il y a également une entente pour trafiquer les bons de connaissement du pétrole. Au lieu d’indiquer comme il se doit le code PG1 (le plus dangereux, le plus explosif), on décide d’inscrire PG111 (pas dangereux).
La locomotive de tête est usée au maximum.
Le chauffeur signale un problème avec sa vieille locomotive. On lui dit de forcer la note, de continuer sa route.
À Lac-Mégantic, le train chauffe. On dit au chauffeur d’appliquer les freins, de laisser l’engin fonctionner, qu’il va refroidir. On autorise le chauffeur à quitter les lieux et aller se coucher. C’est une des répercussions d’autoriser un seul conducteur.
Dans la nuit, un feu est signalé sur la locomotive de tête, celle qui avait des problèmes. Le moteur est coupé par les pompiers. « En éteignant le moteur, la pression d’air dans les freins pneumatiques est relâchée. Éventuellement, le train commencera à se mettre en mouvement seul et descendre la pente vers Lac-Mégantic ».
Avec un seul chauffeur qui est forcément aller dormir huit heures, il y a maintenant 5 000 000 de litres d’explosifs en marche que personne n’arrêtera.
« Les pompiers croient combattre du pétrole peu inflammable. Ils ignorent que le CP et World Fuel ont falsifié les papiers, camouflant leur pétrole classé le plus explosif et dangereux ». Il y a 47 morts, dont plusieurs suicidés.
Maintenant qu’il y a eu une catastrophe, les personnes impliquées directement ou indirectement se renvoient la balle, comme c’est la coutume lors de tragédies. Le livre mentionne, au niveau politique, les noms de Denis Lebel, Lisa Raitt, John Baird et plus tard Marc Garneau. Au niveau des compagnies, l’autrice mentionne Hunter Harrison, PDG de CP, et Edward Burkhardt, PDG de MMA.
Les changements se produisent, mais pas ceux que l’on pense…
Naomi Klein analyse la « stratégie du choc » conçue par Milton Friedman. Dans l’étape 1, « on profite de ce que la population est encore étourdie : elle ne pourra s’opposer à ce que l’on veut lui imposer ». On change le zonage en vitesse pour inclure l’expropriationde maisons qui sont totalement en dehors de la zone touchée par la catastrophe. Il y en a qui s’intéressent aux terrains…
Dans l’étape 2 de la « stratégie du choc », on « prétexte une décontamination obligatoire pour faire table rase de l’Ancien Monde. Exclure la population du lieu du drame, pour qu’elle ne puisse s’y accrocher, pour qu’il n’y ait plus de retour possible ».
Enfin l’étape 3 : « Face à une population dont le choc a été exacerbé par la destruction de ses repères et habitudes, on peut lancer une reconstruction ou « réinvention » qui sera reçue avec une acceptation résignée ». On a le cas de gens vivant à Fatima, un secteur éloigné et épargné par la catastrophe : le propriétaire doit signer en vitesse son expropriation sinon il perd tout. Quand les proprios sont enfin tassés, c’est une pharmacie Jean Coutu qui vient s’installer sur les terrains libérés.
Côté légal, on arrête les petits joueurs et on limite l’enquête au maximum. Des prises de contrôle sont effectuées et les rendements aux actionnaires démultipliés.
Le livre fait étalage de certaines manœuvres politiques et entrepreneuriales visant à protéger les compagnies ferroviaires. Même à l’aube de 2022, soit huit ans plus tard, les rails passent toujours au centre-ville de Lac-Mégantic.
« MMA-Canada, essentiellement en faillite, n’a rien payé et n’a pas été poursuivie en justice ».
« Rien n’a changé dans les lois ferroviaires au Canada depuis la tragédie : les compagnies s’auto-réglementent, s’auto-surveillent et, en cas d’accident, s’auto-enquêtent. Ainsi, c’est le CP lui-même qui a enquêté sur la mort de trois de ses employés lors d’un accident survenu en février 2019 en Colombie-Britannique. L’enquêteur du CP, empêché d’enquêter, a dénoncé son employeur et réclamé une enquête indépendante de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) et du Bureau de la Sécurité des transports du Canada (BST), une enquête immédiatement acceptée par l’enquêteur en chef responsable du cas au BST. Le jour même, cet enquêteur du BST a été démis de ses fonctions. L’enquêteur du CP a conclu sur un no-fault du CP ».
En fouillant à gauche et à droite dans les différentes librairies de Québec, je fais souvent de très belles découvertes, comme ce livre de Robert Seethaler, publié initialement en allemand sous le titre de ,,Ein ganzes Leben’’ et qui en français se traduit par « Une vie entière ».
C’est un petit livre de seulement 145 pages mais dont l’écriture tellement limpide a le pouvoir de propulser immédiatement le lecteur au début des années 1900, au beau milieu des montagnes autrichiennes. C’est la période où commence la construction des premiers téléphériques qui vont changer toute la dynamique de la société en permettant graduellement aux touristes de plus en plus nombreux d’occuper un territoire autrefois très peu achalandé.
L’auteur raconte la vie d’Andreas Egger, un homme simple et attachant dont la force de caractère lui permet de traverser n’importe quelle épreuve. Il ne se distingue pas par son intelligence, qui est somme toute assez ordinaire, mais plutôt par sa capacité de survie et son désir de toujours aller de l’avant. C’est un être que l’on aime et à qui l’on ne souhaite que du bien.
Voici ce que dit l’éditeur au sujet de Robert Seethaler : « Une vie entière,élu livre de l’année (2014) par les libraires d’outre-Rhin, confirme ainsi la profondeur de son talent d’écrivain, capable de mener avec une grande simplicité son lecteur au plus près de ses émotions ».
En cette période de pandémie, il s’agit d’une lecture très rafraîchissante pour tous!
Pour avoir écrit ce livre sur l’affaire du Sofitel impliquant Dominique Strauss-Kahn(qui n’est jamais nommé explicitement dans le roman), Régis Jauffret et la maison d’édition du Seuil ont été poursuivis en diffamation et condamnés par un tribunal français. Ils sont allés en appel et ont de nouveau perdu. La Ballade de Rikers Island n’en reste pas moins très bien écrit, dans un style qui est assez unique. Ceci dit, il me semble que le livre aurait pu être abrégé sans nuire au propos.
Pour ceux qui l’ignoreraient, Rikers Island est une prison aux États-Unis où Dominique Strauss-Kahn (DSK) a fait un séjour immédiatement après une histoire d’agression sexuelle qui aurait impliqué le défendeur et une préposée aux chambres, Nafissatou Diallo, de l’hôtel Sofitel de New York.
Voici quelques citations qui donnent une idée du style littéraire de l’auteur, un style où l’humour, parfois assez noir, est souvent présent. Pour ce qui est des extraits les plus durs en ligne avec le propos immédiat du livre, je me suis gardé une petite gêne dans ma sélection, mais vous pouvez toujours trouver le livre en format poche dans de multiples librairies. Voici cependant quelques extraits (sauf le dernier) qui ne devraient pas trop froisser les âmes sensibles.
« [Dans la cellule] … un petit lavabo où une main ne pourrait pas prendre un bain » p.79
« [Sur la table] … un peigne minuscule bon à coiffer le dernier toupet d’un chauve » p.79
« Elle s’en va. J’ouvre l’ordinateur, j’écris une minuscule histoire de Parisien perdu dans le métro. Dimitri frappe à la porte tandis que le malheureux tombe du quai ». p.168
« Il faisait confiance à l’Amérique, une démocratie où le doute profite toujours à l’accusé à condition de n’avoir pas un profil d’islamiste bon à être torturé à Guantanamo ». p.183
« Après avoir braillé avec les hyènes, nos journalistes vont rentrer dans le rang. Quand ils seront revenus à de meilleurs sentiments, nous les inviterons à déjeuner. On profitera de leur bouche ouverte pour leur enfoncer notre part de vérité à grosses bouchées ». p.262
« Une cohorte de prisonniers tirée au cordeau. Il se trouvait toujours un toxicomane rendu fou par le manque prêt à vous égorger pour canaliser son trop-plein d’énergie ». p.313
Au sujet des journalistes : « Un bloc indifférent aux folliculaires agglutinés tout autour, porcelets charmeurs toujours réclamant confidences, impressions, prêts à leur servir leurs parents débités en amuse-gueule pour une bribe d’interview ». p.318
« Un blanc-bec à qui son costume noir donnait un air de singe habillé a bredouillé une muflerie ». p. 324
« Il ne se sentait aucune affinité avec la population de ce siècle qui acceptait le collier, le harnais, les coups de cravache de la société contre la promesse de pouvoir lécher ses plaies dans le camp de vacances des retraités. La retraite, cette religion, cet opium des besogneux, cet au-delà pour les damnés de la Terre du monde du travail, incapables de réclamer le bonheur du jour ». p.337
« L’avenir est une œuvre d’art, chaque journée une autre toile blanche. La jubilation de ne rien savoir du lendemain. Les petits bonheurs embusqués dans les replis des années en attente dans les coulisses ». p.392
« Elle le sème en traversant un groupe de mormons venus du Wyoming serrés les uns contre les autres par peur du malin qui hante les sous-sols des métropoles fornicatrices ». p.398
« Il s’en irait, pauvre hère trouvant refuge auprès d’une bergère dont il mangerait la soupe, tarauderait les creux, maltraiterait les bosses, attendant la nuit pour courir à l’étable profaner le troupeau afin de se donner le frisson de l’adultère ». p.90
Pour obtenir davantage d’informations sur le dossier Jauffret/Strauss-Kahn, les documents suivants sont utiles :
ISBN : 978-2-02-109759-7 (pour le grand format). Mais je sais que ce format est difficile à obtenir aujourd’hui. Cependant, le format poche est toujours en vente dans les librairies.
La série de sept articles suivants traite de la construction d’un patio. Ce nouveau patio était nécessaire parce que l’ancien datait de plus de trente ans et montrait des signes évidents de fatigue, en plus de gêner grandement les travaux de creusage le long de la fondation visant à changer le drain français et isoler la fondation.
Ci-dessus, l’ancien patio de bois est démoli avec une pelle mécanique. Là où la machine ne peut se rendre, je termine la démolition à la main. Par la suite, le creusage commence pour atteindre la fondation.
Une fois la tranchée creusée, les employés de la compagnie Garco installent le drain et préparent la surface de béton qui recevra le nouvel isolant (uréthane soufflé).
Lorsque le drain est complété et que l’uréthane a été soufflé, un employé se charge de refermer le trou, en ajoutant de la terre, de la roche et du sable, ce dernier n’étant requis que pour les terrains moins stables.
Il faut maintenant penser à rebâtir un patio. Les économies sont importantes lorsque l’on fait les travaux soi-même. On m’a signalé que généralement, le coût de la main-d’œuvre équivaut à 2.7 fois le coût des matériaux. Dans le cas d’un grand patio constitué majoritairement de planches de cèdre dont chaque planche sera sablée et teinte à la main, les économies s’élèvent à plusieurs dizaines de milliers de dollars.
À 62 ans, je n’ai malheureusement aucune expérience dans le domaine. Une gestion du risque (financier surtout) est nécessaire et, étant donné que les travaux seront exécutés sans aide, je préfère travailler à partir de plans conçus par une compagnie. Un spécialiste du domaine de la construction m’a offert ses conseils avant que le projet ne débute, car il n’était pas question de recommencer la terrasse.
Sur le plan proposé, il doit y avoir onze pieux de métal ancrés dans le sol pour recevoir le patio. Il faut donc mesurer l’endroit où iront les onze poteaux de métal de la compagnie Techno-Pieux, car ils ne sont pas responsables de faire les calculs à ma place.
J’utilise donc un pointeur laser pour la première fois. Il n’est pas évident de travailler avec cet appareil à l’extérieur, le point rouge du laser étant difficile à voir en pleine lumière (le modèle de base que je me suis procuré ne rendait certainement pas le travail facile). Éventuellement, j’en suis venu à bout. Une chance que je ne faisais pas le boulot pour un client, il aurait trouvé que je coûte cher en temps.
Le technicien de Techno-Pieux se met au travail. Il se fie aux poteaux de bois pour planter ses pieux et vérifie ensuite avec son laser (vraiment meilleur) si ses poteaux sont parfaitement enlignés. Le problème qui se produit parfois est qu’il rencontre une roche et doit recommencer et repositionner ses pieux légèrement à côté de la ligne idéale.
Une légère pente est également nécessaire pour faciliter l’écoulement de l’eau sur le patio. Les pieux ne doivent donc pas être parfaitement au niveau à partir de la maison jusqu’au bout du patio.
Une drille à percussion louée est suffisante pour faire les trous dans le béton qui serviront à fixer la première pièce de bois dans le solage de la maison. Les vis sont posées en alternance pour éviter de créer des faiblesses dans le bois. C’est sur cette pièce de bois que reposera une petite partie du patio. Un ruban isolant spécial est posé sur le bois pour le préserver de la pourriture qui pourrait survenir après plusieurs années, lorsque l’eau s’insère sous les planches du patio.
Suite dans le prochain article : « Construire un patio (2 de 7) ».