Roman graphique

Cette section comprend les romans graphiques, les livres graphiques et les bandes dessinées.

Le roman graphique « Magnum Génération (s) »

Le roman graphique Magnum Génération (s)
Le roman graphique Magnum Génération (s)

Au moyen de dessins et de superbes photographies, ce roman graphique relate les évènements qui ont contribué à la création de Magnum, la célèbre agence internationale de photographie.

Avant Magnum, on ne trouve que des photographes qui tentent de se faire connaître et de gagner un mince pécule face aux géants comme Time et autres médias qui dictent leurs volontés. Ces grandes compagnies recadrent les images originales, ne reconnaissent pas le droit d’auteur et engrangent des profits gigantesques sur le dos des photographes comme Robert Capa, David « Chim » Seymour,   Gerda Taro, Henri Cartier-Bresson et George Rodger. C’est en réaction aux abus que ces photographes créeront la nouvelle agence.

Le livre nous conscientise sur les risques énormes pris pour ramener des clichés des différents conflits planétaires. Robert Capa et Gerda Taro y perdront même la vie dans le feu de l’action.

Une page du roman graphique Magnum Generations
Une page du roman graphique Magnum Generations

On assiste à l’évolution de Magnum, son internationalisation et le changement de sa vocation première. D’un travail initialement axé sur la couverture des guerres, les photographes se tournent progressivement vers une diversification de leurs activités, autant pour accommoder les besoins spécifiques des médias que des productions cinématographiques.

L’agence les protège désormais des abus. Les photographes réalisent cependant qu’ils doivent demeurer à l’écoute des donneurs de contrats pour survivre financièrement. Ils se réservent tout de même une marge de manœuvre pour la création pure, selon la personnalité de chacun et chacune et l’humeur du jour.

De garder en vie cette agence constituée de professionnels aux ambitions différentes n’est pas une mince tâche. Elle connaît des crises, des schismes, des réinventions toutes essentielles à l’évolution de cette institution de renommée internationale.

Pour ceux qui ignorent tout de Magnum, ce roman graphique propose une première approche très accessible.

Titre: Magnum Generation (s)

Scénario: JD Morvan

Dessin: Arnaud Locquet, Scietronc, Rafael Ortiz

Couleur: Hiroyuki Ooshima

Éditions: Caurette, ©2022

ISBN: 978-2-38289-028-8

Le roman graphique « Jours de sable »

Le roman graphique "Jours de sable" par Aimée de Jongh.
Le roman graphique « Jours de sable » par Aimée de Jongh.

Le roman graphique « Jours de sable » se veut un rappel historique du fameux Dust Bowl qui a frappé le centre des États-Unis entre 1930 et 1940. Ce furent dix années de misère qui inspirèrent John Steinbeck   pour son œuvre « Les raisins de la colère».

Les tempêtes de sable et de poussière qui ont envahi une partie de l’Oklahoma, du Kansas, du Texas, du Nouveau-Mexique et du Colorado provenaient d’une multitude de causes combinées, dont la surutilisation du sol par les agriculteurs et des sécheresses à répétition.

Le Dust Bowl américain
Le Dust Bowl américain

En rajoutant les facteurs liés à la crise économique et aux multiples épidémies, on peut comprendre l’exode massif des ménages américains. Ils laissèrent tout derrière eux, incluant plusieurs membres de leur famille décédés des suites de complications respiratoires dues à la poussière. La plupart se dirigèrent vers la côte ouest, mais cet afflux important de la population ne fit qu’augmenter le chômage déjà présent dans cette région.

Une planche du roman graphique Jours de sable
Une planche du roman graphique Jours de sable

Le plus étrange, c’est que des décennies plus tard, les changements climatiques https://www.un.org/fr/climatechange/what-is-climate-change  vécus aujourd’hui dans ces mêmes états pourraient aider à la répétition du phénomène, sans qu’il couvre nécessairement une période aussi longue.

L’autrice Aimée de Jongh met en scène des personnes fictives, mais le scénario respecte la réalité vécue par la population. Dans son histoire, un jeune photographe quitte New York en 1937 avec le mandat d’aller faire un reportage sur le Dust Bowl. On lui a indiqué les sujets à couvrir, mais il prend conscience assez vite qu’il a affaire à un drame humain aux proportions insoupçonnées.

Le personnage principal du roman graphique tente de faire son travail dans la tempête de sable
Le personnage principal du roman graphique tente de faire son travail dans la tempête de sable

De demander à des gens qui souffrent et qui ont tout perdu de prendre la pose pour des médias de New York ne s’avère pas aussi simple qu’il l’avait cru. La situation se complique encore davantage lorsqu’il apprend à connaître ces personnes et qu’il peut lui-même expérimenter leurs difficultés.

En plus des cases habilement dessinées qui font le régal du lecteur, ce dernier a accès à de nombreuses photos d’époque glanées dans plusieurs musées, ainsi qu’à du contenu historique officiel. J’ai adoré ce bouquin gagnant de plusieurs prix en Europe.

Titre : Jours de sable

Autrice : Aimée de Jongh

Éditions : Dargaud, 2022

ISBN : 978-2-5050-8254-5

Super canon

Le roman graphique "Super canon" de Philippe Girard.
Le roman graphique « Super canon » de Philippe Girard.

Avec « Super canon — Le marchand d’armes qui visait les étoiles », l’auteur Philippe Girard nous offre un roman graphique de très grande qualité, autant par le scénario que par le dessin et les choix de couleurs. Pour cette œuvre, il a bénéficié d’une résidence d’auteur à Liège.

Il a certainement mieux apprécié son expérience en Belgique que sa résidence d’écrivain en Pologne où il avait dû se débrouiller seul, car les hôtes n’avaient pas respecté les présentations et rendez-vous prévus à l’horaire. À l’époque, il s’était servi de sa malchance pour, malgré tout, produire un ouvrage très intéressant portant le nom de « Le Starzec — un mois à Cracovie ».

Roman graphique "Le Starzec - Un mois à Cracovie" de Philippe Girard.
Roman graphique « Le Starzec – Un mois à Cracovie » de Philippe Girard.

« Super canon » se base sur une histoire vécue, celle de l’ingénieur canadien Gerald Vincent Bull. Bien sûr, il est impossible de retracer pas à pas la vie de cet homme et l’auteur a donc créé un personnage désigné Docteur Gerry.

À la lecture du bouquin, on réalise le talent incroyable de Gerald Bull, ce scientifique qui a révolutionné la balistique. On témoigne de son destin en dents de scie, tourmenté qu’il était entre ses rêves de jeunesse et ses ambitions sans limites.

Pour boucler ses budgets de recherche et garder sa compagnie à flot, il se transforme progressivement en marchand d’armes. Il se met au service de multiples États, dont le Canada, les États-Unis, Israël,    l’Irak, l’Iran, la Chine. Ce faisant, il devient l’objet d’une surveillance constante de la part de plusieurs agences et accumule les ennemis.

Une page du roman graphique "Super Canon" par Philippe Girard.
Une page du roman graphique « Super Canon » par Philippe Girard.

On a de toute évidence affaire à un génie qui a à dessein bloqué toute réflexion critique quant à ses armes de destruction. Il rêve d’un canon très puissant pour envoyer des satellites dans l’espace, mais les organismes de renseignement d’autres pays ont des projets très différents pour ses canons.

Il croit naïvement qu’il pourra servir plusieurs maîtres aux intérêts divergents, sans que cela puisse lui causer le moindre problème. Cela frise le raisonnement enfantin, l’aveuglement volontaire dans le but de s’offrir la grande vie.

Ma seule réserve à propos du contenu concerne la première page du récit. Je trouve qu’il existe une ambiguïté à propos de l’Irak et les armes de destruction massive (case 5, page 3). C’était effectivement la crainte initiale soulevée par les États-Unis, mais des suivis répétés des inspecteurs des Nations Unies avaient montré que Saddam Hussein   ne possédait pas de pareilles armes. On ne pouvait justifier l’invasion de l’Irak sur une telle base. Cette invasion a tout de même eu lieu, et on n’a pu trouver aucune de ces supposées armes en Irak. J’aurais souhaité que les conclusions de l’ONU soient mentionnées. Cela aurait permis que le scénario du bouquin s’établisse à partir d’une base ne laissant planer aucun doute.

Une planche du roman graphique "Super canon".
Une planche du roman graphique « Super canon ».

Autrement, chose certaine, vous apprécierez ce roman graphique extrêmement bien conçu.

Titre : Super canon

Auteur : Philippe Girard

Éditions : Casterman, 2023

ISBN : 978-2-203-24112-1

Roman graphique – La disparition de Josef Mengele

Le roman graphique "La disparition de Josef Mengele"
Le roman graphique « La disparition de Josef Mengele »

Le roman graphique « La disparition de Josef Mengele » constitue une très belle surprise pour moi, autant au niveau du scénario que du graphisme. Tous ceux qui s’intéressent aux histoires vécues dévoreront ce bouquin tant il représente une mine d’or d’informations étonnantes sur la vie, ou plutôt la survie, du criminel nazi en Amérique Latine.

Qui lui fournit l’argent dont il a besoin ? Comment assure-t-il sa protection ? Mène-t-il une vie de pacha ? Comment se comporte-t-il à l’étranger ? Sa réflexion sur les races connaît-elle un semblant d’évolution ou demeure-t-elle sclérosée ? Pourquoi l’Argentine favorise-t-elle la venue de ces assassins en fuite ?

Pour la population en général, il y a deux catégories de criminels nationaux-socialistes: la première concerne les noms les plus médiatisés lors du tribunal de Nuremberg. La deuxième implique les criminels nazis qui se sont enfuis à l’étranger, grâce à des soutiens politiques ou familiaux. Josef Mengele fait partie des deux groupes. Il se terre en Amérique latine et sait que plusieurs organisations le recherchent sérieusement, dont le Mossad israélien.

Comment demeure-t-il en liberté sur une si longue période? On comprend vite que le Mossad ne se concentre pas seulement sur les criminels nazis en fuite. Le bouquin nous présente quelques autres priorités pour l’agence, dont une très urgente : l’élimination d’anciens scientifiques allemands qui travaillent en Égypte à créer des armes à déchets radioactifs destinés à détruire Israël. Les services secrets doivent choisir entre Mengele, une menace passée, ou un danger plus immédiat. Les ressources des agences de renseignement étant limitées, ces dernières doivent s’ajuster et parer au plus pressant.

Des nazis se fondent dans le nouveau gouvernement allemand de l’époque.

Il y a cependant une troisième catégorie dont la population n’a que très peu entendu parler et dont on discute également dans le roman graphique : il s’agit de nazis qui ont réintégré le nouveau gouvernement allemand quelques années après la fin de la Seconde Guerre mondiale.

En effet, les puissances alliées de l’époque que sont les États-Unis, la Grande-Bretagne, la France et l’Union soviétique administrent les zones d’occupation du territoire allemand après la Seconde Guerre mondiale. Mais les tensions entre l’Est et l’Ouest s’accroissent rapidement. On s’accuse mutuellement d’expansionnisme impérialiste ou communiste.

Pour offrir une résistance mieux organisée face à l’Union soviétique, on doit rapidement redonner à l’Allemagne son autonomie. Les anciens nazis possèdent une expérience de gouvernance tout de suite disponible.

Si les Alliés adoptent la position tranchée d’empêcher les nazis d’atteindre des fonctions essentielles dans l’appareil public de la future République de Bonn, on doit alors trouver et former des personnes sans ou avec peu d’expérience pour remplir les tâches plus complexes. Le temps manque autant que la volonté d’aller au fond des choses.

De très nombreux nazis dénichent donc du travail au sein d’organismes du gouvernement. De fil en aiguille, certains de ces anciens nazis recyclés en agents de l’État feront partie des cercles rapprochés qui protégeront les criminels de guerre les plus importants enfuis à l’étranger. Josef Mengele tire profit de ce support en haut lieu.

Mais plusieurs autres Allemands, également haut placés, agiront dans le sens contraire, en tentant de débusquer les plus grands criminels, au risque de leur propre santé et sécurité. Une de ces personnes nous est présentée dans le livre : Fritz Bauer. Cet homme contacte le Mossad avec des informations qui mènent éventuellement à la capture d’Adolf Eichmann. Ce dernier subit son procès en Israël et connaît sa sentence : la pendaison. 

Eichmann et Mengele se rencontrent.
Eichmann et Mengele se rencontrent.

Mengele lit les journaux et se doute bien que sa fin ressemblera à celle d’Eichmann. Le roman graphique l’expose comme un animal traqué, qui parle tout seul. Il éloigne par ses propos racistes et passéistes les gens qui pourraient le plus l’aider dans les dernières années de sa vie. Il dépérit lentement et meurt sur une plage du Brésil en 1979. Mais on ne l’apprend officiellement qu’en 1985.

Le livre couvre une période de plusieurs décennies. On y trouve notamment un bref résumé des actions de Mengele comme médecin à Auschwitz. Il n’est pas seul, même s’il demeure le plus connu pour la population. En effet, de très nombreux adjoints scientifiques effectuent des expériences sur les humains, dont un deviendra recteur à l’université de Münster après la fin de la Seconde Guerre mondiale.

Les auteurs mentionnent au passage cette idée d’un quatrième Reich   poursuivie par Mengele et ses semblables. Bref, le lecteur ne s’ennuie pas avec ce roman graphique très habilement construit.

Titre : La disparition de Josef Mengele

Auteurs : Olivier Guez et Matz-Jörg Mailliet

Éditions : Les Arènes, Paris, 2022

ISBN : 979-10-375-0714-3

MBS – L’enfant terrible d’Arabie Saoudite

Le roman graphique "MBS, l'enfant terrible d'Arabie Saoudite"
Le roman graphique « MBS, l’enfant terrible d’Arabie Saoudite »

Lorsqu’ils entendent le nom de Mohammed Ben Salmane (MBS), la plupart des gens ne réagissent pas, faute de pouvoir l’associer à quoi que ce soit. Si on leur dit que c’est lui qui a fait découper un journaliste en petits morceaux et mis dans des sacs à poubelle dans l’ambassade d’Arabie Saoudite en Turquie, cela résonne davantage.

Le roman graphique « MBS — L’enfant terrible d’Arabie Saoudite » nous présente la vie de ce dirigeant implacable qui tente de tisser des liens avec les grandes puissances. En négociant son appui avec les États-Unis, la Russie, la Chine, l’Inde ou la France, il cherche à positionner son pays comme un joueur majeur sur l’échiquier mondial.

Le livre constitue également une première approche très intéressante de l’histoire de l’Arabie Saoudite, spécialement en ce qui a trait à la famille Saoud et son règne. On réalise l’importance des alliances et des manœuvres radicales pour atteindre un jour le pouvoir suprême.

Quatrième de couverte de MBS L'enfant terrible d'Arabie Saoudite
Quatrième de couverte de MBS L’enfant terrible d’Arabie Saoudite

La stabilité intérieure et de la région demeure une priorité de tous les instants pour MBS. Il doit ménager la chèvre et le chou sur plusieurs plans. Même s’il désire moderniser la société et plaire à la jeunesse, il doit en même temps éviter de trop mécontenter les religieux Wahhabites. Ces derniers bénéficient d’un prestige ancestral et possèdent une influence marquée sur la façon dont le peuple se comporte et réfléchit.

Quant à la façon d’imposer ses idées, MBS n’a rien inventé. Comme la plupart des dirigeants des grands pays de ce monde, il a appris à utiliser les médias et ne ménage aucune dépense pour obtenir les résultats escomptés.

Les patrons des organismes de renseignements et de nouvelles connaissent très bien les limites à l’intérieur desquelles ils peuvent opérer. Vous ne verrez pas de photos des conjointes ni d’articles qui permettraient d’éclairer la population sur la vie nocturne du leader et de ses amis.

Ce roman graphique conserve l’intérêt en intercalant des anecdotes surprenantes et des informations pertinentes accessibles à tous. Comme on peut le lire au verso du bouquin « Ce prince ambitieux se trouve être notre allié au Moyen-Orient : pétrole, lutte antiterroriste, paix israélo-arabe, vente d’armes… nous avons besoin de lui. Mais quel sera le prix à payer ? »

Titre : MBS — L’enfant terrible d’Arabie Saoudite

Auteurs : Antoine Vitkine et Christophe Girard

Éditions : Steinkis/Les Escales

© 2023

ISBN : 978-2-365696-88-3

Warbirds: B-25 Mitchell – Tonnerre sur Tokyo

Bande dessinée de la série Warbirds: B-25 Mitchell - Tonnerre sur Tokyo
Bande dessinée de la série Warbirds: B-25 Mitchell – Tonnerre sur Tokyo

Cette bande dessinée publiée en 2023 constitue la troisième de la série Warbirds, aux éditions Soleil.

Le 18 avril 1942, quelques mois après le raid sur Pearl Harbor, seize bombardiers B-25B Mitchell décollent du nouveau porte-avions Hornet pour une attaque-surprise sur cinq villes japonaises. Il s’agit en fait d’une mission connue sous le nom de « Raid Doolittle ».

Ces machines qui ne sont pas conçues pour opérer à partir d’un porte-avions ne pourront rejoindre leurs cibles et revenir à bon port en sécurité, faute de carburant suffisant. Tous les pilotes en sont parfaitement conscients et se portent volontaires.

La flotte de seize appareils, commandée par Jimmy Doolittle, atteint avec succès son objectif visant à semer la confusion chez l’adversaire et montrer que le Japon demeure vulnérable pour des attaques-surprises. Les Japonais se demandent comment des bombardiers américains ont pu atteindre et frapper leur pays ? D’où sont-ils décollés ? Ils savent bien que les B-25 Mitchell ne sont pas conçus pour décoller d’un porte-avions et qu’ils demeurent incapables de s’y poser.

Le génie de l’intervention tient à la combinaison de multiples décisions très risquées qui, ensemble, surprennent l’ennemi. Premièrement, faute de pouvoir faire atterrir les avions sur le Hornet, on les installe avec une grue, en sachant bien que jamais ils ne reviendront sur le navire.

De plus, on entraîne les commandants de bord à décoller sur des distances impensables pour eux, au moyen d’une technique poussée à l’extrême. Le déplacement rapide du vaisseau améliore la composante de vent de face si indispensable pour des manœuvres aussi périlleuses.

Les pilotes doivent faire preuve d’une très grande maîtrise pour respecter la trajectoire de départ sur une plateforme qui bouge de gauche à droite en pleine tempête. On doit absolument éviter les bâtiments sur le côté du Hornet et l’écart disponible entre le bout de l’aile et la tour du navire ne dépasse pas deux mètres. Malgré tous les obstacles, l’ensemble des B-25 réussit à décoller. Ce sera une mission sans retour vers le Japon.

Doolittle pilote le premier B-25 qui décollera du porte-avions. Il ne bénéficie que d’une très petite portion du pont pour s’exécuter, car il y a encore quinze autres bombardiers qui attendent leur tour pour s’envoler. Le deuxième pilote à quitter le pont évite de justesse un amerrissage, alors que l’appareil s’enfonce légèrement et qu’une roue du train d’atterrissage touche à l’eau. Mais l’avion gagne juste assez de vitesse pour demeurer en l’air.

Les bombardiers et équipages connaissent des sorts différents, une fois les pilonnages effectués sur les objectifs japonais. Les auteurs concluent ainsi : « Le raid détruisit 112 bâtiments et fit 87 morts, en environ 6 minutes. […] La destruction de 15 des 16 B-25, incapables de rejoindre un terrain chinois pour s’y poser, fut tout de même à déplorer, le 16e B-25 ayant atterri sans encombre en URSS. À déplorer aussi la mort accidentelle de trois aviateurs (avions 3 et 6) et la capture de 8 autres (avions 6 et 16) par les Japonais, dont 4 ne revinrent jamais au pays, 3 ayant été exécutés comme “criminels de guerre” et le 4e étant mort en captivité. Bien pire encore, les Japonais se vengèrent des Chinois, qui avaient aidé tous les aviateurs survivants, en organisant le massacre d’environ 250 000 civils dans les provinces du Zhejiang et du Jiangxi alors sous leur contrôle. Ce qui laissera des traces… ».

Des tests d’atterrissage et de décollage sur un autre porte-avions, le Forrestal, ont aussi été effectués des décennies plus tard avec un C-130 Hercules. J’ai tenté de reprendre l’expérience en simulation de vol. Le vol se trouve dans la section « vols virtuels exigeants » de mon blogue. Le Forrestal n’étant pas disponible sous forme virtuelle, je me suis servi du porte-avions USS Enterprise.

Titre : Warbirds : B-25 Mitchell : Tonnerre sur Tokyo

Auteurs : Richard D. Nolane et Vladimir Aleksic

Éditions : Soleil/D. Nolane/Aleksic

ISBN : 978-2-302-09745-2

© 2023

Tsar par accident

Tsar par accident: mythes et mesonges de Vladimir Poutine.
Tsar par accident: mythes et mesonges de Vladimir Poutine.

L’auteur Andrew S. Weiss a travaillé à la Maison-Blanche, au Pentagone, au département d’État, etc. Il signale : « Si à l’époque on m’avait dit qu’un ancien sous-officier du KGB – qui n’avait jamais vraiment brillé – un certain Vladimir Poutine […] – serait promu des arrière-salles du Kremlin directement à la tête du pays, je vous aurais dit d’aller vous faire soigner ». Il ajoute : « Ce que nous croyons savoir de lui est souvent un savant mélange de psychologie de comptoir et d’interprétations erronées de l’histoire millénaire de la Russie ». Sa mise en scène comme un dur à cuire « lui permet de passer pour plus intelligent – et plus compétent – qu’il ne l’est réellement. […] ».

Le roman graphique « Tsar par accident » raconte les hasards de la vie qui ont fait en sorte que Vladimir Poutine s’est retrouvé au pouvoir au moment où sa carrière plutôt sans éclats le destinait à un poste moins élevé. Mais on pourrait dire la même chose de certains dictateurs, présidents, rois et ministres de par le monde au cours des âges auxquels la chance a souri. Eux aussi ont su profiter des occasions favorables pour gravir des échelons trop importants pour leur talent naturel. La nation en paie alors le prix jusqu’au renversement, exil ou décès du personnage.

Il faut quand même donner à Poutine le fait qu’il s’obstine, qu’il s’accroche, malgré les revers et les refus. Pour accéder au KGB, on lui dit de faire des études ou d’entrer dans l’armée. Il s’exécute et reçoit son diplôme.

Il se retrouve donc au KGB en 1975. Mais ce ne sont pas les grandes missions dont il rêvait qui l’attendent, mais du travail de terrain local. Il n’impressionne pas ses supérieurs avec les résultats obtenus. À la suite d’une bagarre dans le métro, on le mute à Dresde en 1985 pour des missions vides de sens, faute de budget. En 1999, on apprend au président Clinton que Poutine sera le prochain président russe. Que s’est-il passé entre 1985 et 1999 pour que soudainement Poutine sorte à ce point de l’obscurité et soit propulsé comme président de la Russie ?

Il faut créditer son éthique de travail, mais avant toute chose sa loyauté envers ses patrons dans cette organisation qui privilégie les liens personnels. Eltsine, le président de l’époque, sentait sa fin venir et proposa un marché à Poutine. L’auteur écrit : « Il ferait de lui le président s’il acceptait de les protéger, lui et sa famille ».

Tout comme Hindenburg croyait pouvoir manipuler Hitler en lui permettant d’accéder aux hautes sphères du gouvernement, Eltsine pensait faire de même avec Poutine. Dans les deux cas, ce fut une erreur coûteuse pour l’Europe et le monde.

Le bouquin passe en revue la montée des oligarques russes, le rapprochement du pouvoir pour les amis de Poutine. Andrew Weiss souligne : « L’un des points que les étrangers ne saisissent pas toujours c’est que la Russie est une société qui fonctionne sur la base des liens personnels, plutôt que dans le cadre d’institutions ou d’un état de droit. »

Dans les années suivant la chute du Mur de Berlin, on constate la mainmise de secteurs importants de l’économie russe par des fonctionnaires et agents du KGB corrompus, de même que par la mafia. Comme l’écrit l’auteur : « Vladimir Koumarine, patron tout-puissant du gang notoire Tambov, faisait la loi dans le pays ».

Le support de Vladimir Poutine envers les États-Unis après les attentats du 11 septembre 2001 le rapproche de George W. Bush et de son père George H. W. Bush avec lesquels il va même à la pêche à Kennebunkport. Il espérait ainsi relancer l’économie moribonde russe et gagner en liberté pour contrôler les médias russes.

Le plus étonnant pour moi demeure le fait que Poutine approuva durant cette période l’implantation hautement controversée de bases américaines et de l’OTAN à travers l’ex-Union soviétique (Ouzbékistan, Tadjikistan, Kirghizistan). Par ce geste, il recherchait une stabilisation avec l’Ouest. Les causes des attentats du 11 septembre 2001 étant encore discutées aujourd’hui à travers le monde, spécialement dans les cercles les plus informés, Poutine a dû réfléchir plus tard à la pertinence et aux conséquences de sa décision d’autoriser de nouvelles bases américaines et de l’OTAN près de la Russie.

Le président russe s’aperçoit rapidement qu’il ne pèse pas lourd dans la balance diplomatique face à un superpouvoir comme les États-Unis. On ne le reconnaît pas en tant que joueur sur lequel il faut compter. Dans l’optique d’une meilleure compréhension entre l’Occident et la Russie, l’auteur souligne l’importance de mieux appréhender les griefs des deux camps. Il signale que cela manque cruellement.

D’autant plus que le Kremlin a la certitude que « les revendications de changement politique sont toujours le fait de conspirations soutenues par les Occidentaux ». À force de se surveiller les unes les autres et tenter d’influer sur la gestion intérieure d’autres pays, toutes les grandes nations projettent leurs intentions et ne croient plus qu’une manifestation peut provenir de la base à partir d’un désir sérieux d’amélioration de certaines politiques détestables.

L’auteur effectue un retour sur les problèmes entourant la sécurité territoriale de la Russie à travers les époques, envahie tour à tour par les Mongols, Napoléon et Hitler : « [La Russie] se repose traditionnellement sur les territoires annexés pour faire tampon entre la mère patrie et toute menace extérieure ». Il traite également du conflit tchétchène, de la lutte contre le terrorisme, de l’ingérence politique dans les États voisins et de l’implication russe dans les élections américaines de 2016.

Andrew S. Weiss couvre large et d’autres thèmes trouvent leur place dans le bouquin : l’histoire de la Guerre froide, Trump, Snowden, Wikileaks, les JO de Sotchi et le travail de Maria Butina, une agente russe qui réussit à pénétrer les cercles supérieurs du parti républicain américain.

C’est sa croyance dans le déclin irréversible de l’Occident qui a permis à Vladimir Poutine d’envahir l’Ukraine. L’auteur conclut avec une remarque sur l’invasion de ce pays et le bombardement sans discernement des cibles civiles : « Le monde est en train de comprendre que Poutine n’a jamais été le stratégiste qu’il a prétendu être. C’est un improvisateur pris dans son propre piège ».

Je me permets une remarque concernant l’invasion de l’Ukraine. Ce pays doit recevoir des avions de combat des États alliés pour protéger son territoire, ce qui offusque profondément la Russie. J’aimerais tout de même rappeler le fait que lors de la Seconde Guerre mondiale, l’Union soviétique a accepté énormément d’aide provenant de l’extérieur pour sa défense sur le Front de l’Est. Pour ne citer qu’un seul appareil et pays, l’Union soviétique a obtenu 877 bombardiers B-25 Mitchell des États-Unis.

Titre : Tsar par accident : mythes et mensonges de Vladimir Poutine

Auteur : Andrew S. Weiss et Brian « Box » Brown

Éditions : Rue de Sèvres

© 2022

ISBN : 978-2-81020-450-2

Le passager du Polarlys

Bande dessinée: "Le passager du Polarlys"
Bande dessinée: « Le passager du Polarlys »

La maison d’édition Dargaud a eu l’excellente idée de reprendre quelques-uns des romans « durs » de Georges Simenon (par opposition à ceux où le commissaire Maigret tient toute la place), et de les convertir en bandes dessinées. Ils entendent utiliser deux scénaristes à tour de rôle de même que des dessinateurs différents pour chacune des huit publications prévues dans les prochaines années.

La première de ces publications s’intitule « Le passager du Polarlys ». J’étais incertain lorsque j’ai vu ce nouveau titre en librairie, mais le nom de Georges Simenon sur l’album m’a convaincu de tenter ma chance. Et quelle belle expérience de lecture ce fut. Tout y est : une intrigue intéressante, des dessins très bien exécutés, des personnages attachants et, surtout, la mer avec ce qu’elle représente de défis, spécialement à l’époque où fût écrit le roman.

On longe la Norvège avec ses petits villages aux accès périlleux par gros temps pour un navire sommairement équipé. Les couleurs choisies se prêtent également bien au drame qui se déroule sur le bateau. Bref, on termine la lecture et on a aussitôt le goût de reprendre le récit. Vous ne serez pas déçus.

Titre : Le passager du Polarlys

Auteurs : José-Louis Bocquet et Christian Cailleaux, d’après l’œuvre de Georges Simenon © 1932

Éditions : Dargaud Benelux (Dargaud-Lombard s. a.)

© 2023

ISBN : 978-2-5051-1223-5


Une saison à l’ONU

Une saison à l'ONU
Une saison à l’ONU

Le roman graphique « Une saison à l’ONU » facilite la compréhension des différents défis auxquels fait face l’ONU, cet organisme nécessaire, mais largement freiné dans ses interventions.

Les crises internationales et la complexité des manœuvres politiques quotidiennes n’échappent pas à l’auteur, mais celui-ci choisit néanmoins d’emprunter un ton léger pour conserver l’intérêt du lecteur tout au long du livre. Les histoires cocasses, l’humour et les confidences alternent pour rendre ce récit vivant.

On sait combien l’ONU a de la difficulté à faire adopter des résolutions, autant à cause des pressions provenant de toutes parts que de l’application du droit de veto par les grandes puissances. Le Nord-Américain entend davantage parler de l’utilisation du droit de veto par la Russie ou par la Chine que par les États-Unis. L’auteur chiffre cette utilisation pour toutes les grandes puissances et cela a de quoi surprendre.

Le lecteur comprend mieux la maîtrise grammaticale et les compromis nécessaires qui permettront à une note en provenance de l’ONU de recevoir un accord au niveau international. On doit savoir diluer, noyer le poisson, ménager les sensibilités si l’on veut pouvoir publier sans générer trop d’opposition.

Bref, « Une saison à l’ONU » constitue un roman graphique rempli d’histoires vécues intéressantes et pertinentes. Le bouquin démystifie certaines activités de l’ONU à New York autant qu’à l’étranger.

Titre : Une saison à l’ONU

Auteur et autrice: Karim Lebhour et Aude Massot

Éditions : Steinkis

© 2022

ISBN :  978-2-36846-610-3

Environnement toxique

Environnement toxique par Kate Beaton
Environnement toxique par Kate Beaton

Pour payer ses dettes d’études rapidement, Kate Beaton, une jeune résidente de la Nouvelle-Écosse, décide en 2005 d’aller travailler dans le nord de l’Alberta pour les compagnies pétrolières exploitant les sables bitumineux. À l’époque, ce voyage vers l’ouest avait la cote auprès des Canadiens cherchant un emploi lucratif. Elle quitte donc les paysages paradisiaques du Cap-Breton pour plonger dans l’univers de Syncrude    et Shell à Fort McMurray.

Elle réalise alors ce que constitue la vie sur des chantiers occupés en majorité par des hommes loin de leur famille, dont plusieurs démontrent des problèmes de comportement. Peu importe l’endroit où elle se trouve, elle subit du harcèlement sous forme de remarques désobligeantes, d’insultes, et éventuellement le personnel en vient à des agressions sexuelles.

Pour ces travailleuses, la solitude et la survie prennent une tout autre signification que pour le reste des employés masculins de ces postes isolés.

Étant pourvue de multiples talents, dont ceux de raconteuse et dessinatrice, Kate Beaton publie en 2023 un roman graphique décrivant ce qu’elle a vécu. Elle dénonce « un système éprouvant et complexe, qui exploite aussi froidement les ressources naturelles que les êtres humains ».

« Environnement toxique » porte moins sur la destruction d’un habitat causée par l’exploitation des sables bitumineux que sur le milieu de travail toxique que doivent endurer le peu de femmes œuvrant sur ces chantiers.

Le Time Magazine, The Guardian et The New Yorker ont salué ce roman graphique gagnant du concours Canada Reads 2023. Il est paru en anglais sous le titre « Ducks », probablement pour rappeler tous ces canards englués dans le pétrole qui avaient fait la manchette à l’époque.

Bonne lecture !

Titre : Environnement toxique

Autrice : Kate Beaton

Éditions : Casterman

© 2023

ISBN : 978-2-203-24223-4

Agrandissement sur toile de « La vallée des immortels, tome 1, étape 1 ».

Blake et Mortimer: La vallée des immortels tome 1
Blake et Mortimer: La vallée des immortels tome 1

En février 2023, j’ai commencé le transfert de la couverture de l’album Blake et Mortimer « La vallée des immortels – tome 1 » sur une toile de 24 x 36 pouces.

La photo ci-dessus montre l’album original posé sur le haut de la toile et le travail en cours. Il reste encore beaucoup à faire avant de terminer le dessin et le lettrage.

Viendra ensuite l’étape de la coloration, pour obtenir des tons aussi fidèles que possible avec l’album original. La couverture comporte de très nombreuses couleurs, ce qui n’est pas le cas avec plusieurs autres albums Blake et Mortimer.

Cet album particulier me rejoint davantage pour plusieurs raisons. Tout d’abord, les auteurs utilisent dans le scénario un avion de type Cessna C-170B, ce qui me rappelle des souvenirs de pilotage. En effet, une heureuse coïncidence fait qu’en 1981, j’avais traversé le Canada en pilotant ce petit appareil datant de 1952. Ce dernier n’était équipé d’aucun instrument de navigation aérienne, à l’exception d’une vieille boussole. Nous n’étions pas encore à l’ère du GPS! J’ai publié le récit de ce voyage entre St-Jean et Edmonton sur mon blogue.

Une autre raison qui augmente mon intérêt pour l’album est également liée à un souvenir. Sur la couverture, Mortimer se retrouve dans Wan Chai District, un quartier que j’ai pu visiter en 1990 lors d’un voyage à Hong-Kong et les Nouveaux-Territoires. À l’époque, le Boeing B-747 de Cathay Pacific avait utilisé le légendaire aéroport de Kaï Tak pour son atterrissage et nous avions survolé lors de l’approche une manifestation gigantesque de plus de 100,000 personnes qui voulait rappeler l’anniversaire du massacre de Tiananmen Square.  

Agrandissement sur toile de « La vallée des immortels, tome 1, étape 2 ».

Blake et Mortimer en peinture: la vallée des immortels.
Blake et Mortimer en peinture: la vallée des immortels.

Voici l’étape 2 du travail d’agrandissement de la bande dessinée de Blake et Mortimer : la vallée des immortels. L’album original se trouve au bas de l’image pour donner une idée de l’échelle.

Pour occuper tout l’espace d’une toile 24×36 à partir d’un album de bande dessinée standard, il faut transformer l’échelle en ajoutant 10 % de plus sur la hauteur. Cependant, quand vient le temps de dessiner le cercle parfait se trouvant tout en haut et à gauche de l’album, il faut revenir à une échelle normale de façon à ne pas trop transformer les visages des deux héros qui nous regardent de face. Le tableau contenant deux échelles ne donnera pas une copie conforme, mais sera tout de même acceptable et réaliste.

L’ajout des couleurs constitue une étape un peu plus exigeante, car il arrive souvent que chaque couleur à imiter en nécessite quatre pour obtenir l’ambiance désirée. L’expérience passée montre qu’il faut laisser sécher plusieurs minutes sur une autre toile toute couleur nouvellement créée pour s’assurer qu’on ne s’éloigne pas trop de la couleur recherchée. Les erreurs demeurent malgré tout inévitables…

En travaillant les jours de mauvaise météo, à raison de quelques heures par jour, il semble bien que je compléterai la toile d’ici l’été.

Je publierai un troisième et dernier article lorsque j’aurai effectué le travail.

Blake et Mortimer version finale.

La vallée des immortels tome 1 version finale du tableau 24x36 en peinture acrylique.

La vallée des immortels tome 1 version finale du tableau 24×36 en peinture acrylique.

J’ai finalement complété la dernière étape de la toile de 24 po x 36 po de Blake et Mortimer « La vallée des immortels, tome 1 ». Je croyais terminer le tout avant l’été, mais d’autres obligations plus pressantes ont bouleversé l’horaire prévu.

L’ensemble aura pris à peu près 200 heures et nécessité la création d’environ 130 couleurs pour tenter d’imiter l’album, du moins en partie.

J’ai volontairement éclairci l’œuvre originale, surtout le côté gauche, car je suspends le tableau sur un mur et je trouvais la scène beaucoup trop foncée. Ma version respecte l’idée du clair-obscur tout en ajoutant un peu de lumière. Peindre la toile soi-même permet aussi de jouer davantage avec les différentes nuances des briques du mur de gauche.

Huit heures à Berlin.

Blake et Mortimer: Huit heures à Berlin.
Blake et Mortimer: Huit heures à Berlin.

Ce nouvel album des aventures de Blake et Mortimer constitue une très belle surprise. C’est la première fois que José-Louis Bocquet, Jean-Luc Fromental et Antoine Aubin travaillent ensemble et le résultat de cette collaboration en a étonné plus d’un.

Depuis plusieurs années, les combinaisons d’auteurs et de dessinateurs se succèdent pour assurer un rythme constant de publication, c’est-à-dire une bande dessinée de Blake et Mortimer par année.

Pour Dargaud-Lombard, il s’agit d’une source de revenus non négligeable, cette série ayant des adeptes à travers le monde depuis plusieurs décennies.

« Huit heures à Berlin » nous plonge dans la guerre froide, au moment où le mur de Berlin vient d’être construit. Les lecteurs plus âgés connaissent les événements entourant la construction du mur, mais pour les plus jeunes il s’agira généralement d’une première approche de cette période.

Tout y est dans cet album : quelques notions d’histoire et de politique, les reconstitutions d’époque quant à l’architecture extérieure, le mobilier, les véhicules, les couleurs judicieusement choisies par Laurence Croix et surtout un scénario suffisamment bien ficelé pour empêcher le lecteur de prévoir le déroulement de l’intrigue.

On se promène entre l’Allemagne et les anciens pays du bloc communiste, on marche dans un tunnel créé à l’époque par l’Occident pour écouter les conversations ayant lieu à Berlin-Est, on pénètre dans un ancien asile supposément abandonné depuis longtemps. De plus, comme toujours dans cette bande dessinée, le mélange entre le réel et la science-fiction ajoute à l’intérêt.

Les auteurs s’efforcent de rajeunir un peu le vieux Mortimer sans toutefois perdre en chemin les inconditionnels. Les femmes obtiennent parfois un rôle positif, parfois négatif, mais elles ne sont plus des potiches tenant un sac à main. Difficile à imaginer qu’on aurait pu voir un jour dans un album de cette série un nu sur un calendrier de garage. Quel scandale ! Ça n’aurait pas passé à l’époque où Edgar P. Jacobs travaillait avec Hergé pour les albums Tintin…

Bref, un beau succès que ce vingt-neuvième album de la série. Il est évident que ce trio de créateurs se verra confier d’autres albums.

Tableau de Tintin et l’île noire.

Figurines de Tintin et du docteur Müller.
Figurines de Tintin et du docteur Müller.

Dans la photo ci-dessus, vous avez certainement reconnu Tintin habillé en Écossais alors qu’il fait face au méchant docteur Müller. Ces deux personnages font partie de l’album de bandes dessinées Tintin et l’île noire . Les Francophones ont probablement tous lu cet album dans leur jeunesse. Et, même devenus adultes, certains d’entre nous (j’en suis) avons revisité cette œuvre de Hergé pour y rechercher des détails qui nous ont forcément échappé jadis.

Les restrictions et le confinement liés à la pandémie de Covid-19 m’ont permis de consacrer davantage de temps au dessin et à la peinture. J’ai décidé de recopier la couverture de l’album de Tintin « L’île noire » en employant de l’acrylique.  

Le dessin à l’échelle d’un album Tintin se rapproche d’un ratio 2 : 3 et donc le format 24 pouces par 36 pouces faisait parfaitement l’affaire. Ci-dessous, on peut comparer la différence d’échelle entre le livre original et le dessin en devenir.

Dessin au crayon et à l'échelle de Tintin.
Dessin au crayon et à l’échelle de Tintin.

Un crayon à mine 2H pour le dessin sur la toile exigera moins de travail au moment d’effacer les traits les plus évidents et de poser la peinture. Celui que j’ai utilisé (HB) était trop foncé et a demandé plus d’attention que prévu.

Reproduire un album de Tintin nous amène à constater progressivement le génie de Hergé, ce créateur belge. On s’attarde sur ses choix éditoriaux, la composition, les angles. Dessiner les rochers de l’île noire et leurs ombres est, à cet égard, très révélateur.

Dessin 24x36 de Tintin et l'île noire
Dessin 24×36 de Tintin et l’île noire

Dans la photo ci-dessus, Tintin se dirige vers l’Île noire. On le sent anxieux, d’où sa posture légèrement penchée vers l’avant. Il scrute l’île droit devant. Hergé aurait pu le dessiner bien droit sur son bateau, confiant. Il a choisi de le positionner comme étant plutôt observateur d’une situation problématique. De même, Milou nous regarde avec un air inquiet et on doit répéter exactement son expression pour ne pas changer l’atmosphère de la scène.

Il manque encore les oiseaux noirs autour de l’île, dont un semble se diriger tout droit vers Tintin. Vous les verrez dans le prochain article : ils sont nombreux, noirs et ne semblent pas très amicaux.

Le ciel, quant à lui, n’est pas couvert de jolis cumulus mais plutôt de nuages striés et effilés envahissant l’horizon, plusieurs ayant l’apparence pointue d’une dague. Placés de façon oblique à travers la couverture pour plus de dynamisme, Hergé leur a également donné une forme légèrement circulaire.

Le ciel est peint en premier sur le tableau de Tintin.
Le ciel est peint en premier sur le tableau de Tintin.

Au moment de peindre les lettres, on se rend compte des choix éditoriaux de Hergé. Plusieurs de ces particularités exigent notre attention, dont la lettre « O » qui n’est pas ronde mais ovale et penchée sur le côté. Également, Hergé aligne les deux mots du titre à droite et cela a une incidence au moment de calculer les espaces entre les lettres.

En essayant de reproduire exactement une couleur, on doit effectuer plusieurs essais pour découvrir la recette. Souvent, on combine trois ou quatre couleurs afin d’en arriver à un résultat satisfaisant. Et lorsque la tonalité nous satisfait, une surprise nous attend : une fois posée sur la toile, la peinture acrylique change de couleur et devient beaucoup plus foncée en séchant. Tenter de prévoir le résultat après séchage devient nécessaire pour éviter d’avoir à recommencer.

Peinture acrylique en progression de Tintin et l'île noire.
Peinture acrylique en progression de Tintin et l’île noire.

La photo ci-dessus montre les nuages presque complétés. Les régions de ciel en jaune ont posé un problème, car, une fois sur la toile, la couleur est devenue trop sombre en séchant. J’ai dû trouver une recette de jaune plus pâle que celle de la couverture originale pour qu’en séchant la couleur devienne plus foncée et rejoigne celle de l’album.

Détail du château de Tintin et l'île noire.
Détail du château de Tintin et l’île noire.

La photo ci-dessus montre la progression du château et de l’île, mais cette fois avec les oiseaux en prime. Hergé a dessiné beaucoup d’oiseaux noirs autour du château, ce qui ajoute à l’air sinistre de l’endroit. Mais il a aussi pensé à dessiner deux oiseaux plus gros au premier plan, dont un qui semble se diriger vers Tintin.

Peinture en progression de Tintin et l'île noire.
Peinture en progression de Tintin et l’île noire.

Le tableau avance rapidement. J’y ai déjà travaillé près d’une centaine d’heures pour me rendre à ce stade. La mer a reçu toutes ses touches de peinture noire pour former l’apparence de vagues.

Copie à l'échelle de Tintin et l'île noire.
Copie à l’échelle de Tintin et l’île noire.

La photo ci-dessus donne une idée de la grandeur du tableau. On doit souvent poser le tableau sur une table pour peindre les éléments qui nécessitent une très grande précision.

En arrière-plan sur la photo, on aperçoit à la télévision un journaliste de la chaîne canadienne de nouvelles RDI. Il commente la situation de blocage des rues à Ottawa par des camionneurs durant la pandémie de Covid-19. Les protestataires se battent pour leurs droits, mais ne respectent pas les droits des citoyens d’Ottawa qui, pendant des semaines, se retrouvent prisonniers de leur quartier. Le gouvernement canadien mettra finalement un terme à la situation en invoquant la Loi sur les mesures d’urgence    avec, en prime, une poursuite de 306 millions de dollars intentée par les résidents contre les manifestants.

Tableau 24x36 de Tintin et l'île noire complété.
Tableau 24×36 de Tintin et l’île noire complété.

Ci-dessus se trouve le tableau une fois complété. Vous noterez que les tons de blancs de la barque diffèrent à l’arrière et sur le côté. On retrouve du blanc combiné avec du noir et une touche de jaune pour le côté de la barque, plutôt que le blanc pur requis pour l’arrière. Ce n’est qu’à force d’effectuer des essais de couleurs que je me suis rendu compte de la nécessaire présence du jaune.

Les vagues aplaties par la barque ne sont plus que des bouillons de forme arrondie derrière l’embarcation. Cependant, sur les côtés, l’apparence diffère car le mouvement du bateau casse les vagues : Hergé s’assure donc d’un traitement différent de l’écume. Il a pensé à tout, comme d’habitude !

Il est maintenant temps de passer à un autre projet, possiblement « Blake et Mortimer » ces héros de Edgar P. Jacobs, ce grand maître du style de la ligne claire qui a initialement travaillé avec Hergé.

Glénat vient d’ailleurs de publier un livre sur le sujet, dont le titre est : Edgar P. Jacobs le rêveur d’apocalypes. Si le sujet vous intéresse…

Mégantic – Un train dans la nuit.

Bande dessinée "Mégantic - Un train dans la nuit".
Bande dessinée « Mégantic – Un train dans la nuit ».

Nous avons tous entendu parler du drame vécu par les habitants de Lac-Mégantic en 2013, alors qu’un train pétrolier sans conducteur de la compagnie CP tirant des centaines de wagons de pétrole explosif, déraille en pleine nuit, explose et tue 47 habitants de la ville.

La bande dessinée (ou roman graphique pour certains) « Mégantic – Un train dans la nuit » vient compléter ce que l’on pensait connaître de cette histoire vécue, en exposant plusieurs informations capitales passées sous silence ou survolées trop rapidement par les médias.

L’autrice Anne-Marie Saint-Cerny a travaillé durant des années sur le dossier et, pour bien transmettre le contenu et les émotions en images, s’est assuré le concours de Christian Quesnel. Le résultat est extrêmement intéressant. La formule fonctionne : les dessins sont d’une grande précision, la mise en page laisse de l’espace pour la réflexion, les couleurs sont choisies judicieusement.

Dans l’explosion du train à Lac-Mégantic, il y a plusieurs facteurs en jeu, dont :

    1. Des dirigeants de la compagnie CP qui font des choix catastrophiques.

    1. Un désir de satisfaire, comme toujours, les exigences des actionnaires. On coupe le personnel et on s’auto-évalue quant à la sécurité.

    1. Un seul chauffeur est autorisé pour un train transportant des centaines de citernes d’explosifs.

    1. Les politiciens donnent leur accord avec les nouvelles coupes proposées par la compagnie.

    1. On a affaire à de la pensée magique : en cas de pépin avec le chauffeur, le train s’arrête tout seul grâce à un mécanisme qui, pourtant, est toujours susceptible de faire défaut éventuellement.

    1. Les rails ne sont pas ce qu’il y a de plus récent.

    1. Le transport de la marchandise dangereuse est accordé à une compagnie à la réputation douteuse, la MMA.

    1. Les citernes DOT-111 utilisées sont décriées comme étant trop fragiles pour les matières dangereuses et ciblées dans plus de 25 enquêtes.

    1. Il y a également une entente pour trafiquer les bons de connaissement du pétrole. Au lieu d’indiquer comme il se doit le code PG1 (le plus dangereux, le plus explosif), on décide d’inscrire PG111 (pas dangereux).

    1. La locomotive de tête est usée au maximum.

    1. Le chauffeur signale un problème avec sa vieille locomotive. On lui dit de forcer la note, de continuer sa route.

    1. À Lac-Mégantic, le train chauffe. On dit au chauffeur d’appliquer les freins, de laisser l’engin fonctionner, qu’il va refroidir. On autorise le chauffeur à quitter les lieux et aller se coucher. C’est une des répercussions d’autoriser un seul conducteur.

    1. Dans la nuit, un feu est signalé sur la locomotive de tête, celle qui avait des problèmes. Le moteur est coupé par les pompiers. « En éteignant le moteur, la pression d’air dans les freins pneumatiques est relâchée. Éventuellement, le train commencera à se mettre en mouvement seul et descendre la pente vers Lac-Mégantic ».

Avec un seul chauffeur qui est forcément aller dormir huit heures, il y a maintenant 5 000 000 de litres d’explosifs en marche que personne n’arrêtera.

« Les pompiers croient combattre du pétrole peu inflammable. Ils ignorent que le CP et World Fuel ont falsifié les papiers, camouflant leur pétrole classé le plus explosif et dangereux ». Il y a 47 morts, dont plusieurs suicidés.

Maintenant qu’il y a eu une catastrophe, les personnes impliquées directement ou indirectement se renvoient la balle, comme c’est la coutume lors de tragédies. Le livre mentionne, au niveau politique, les noms de Denis Lebel, Lisa Raitt, John Baird et plus tard Marc Garneau. Au niveau des compagnies, l’autrice mentionne Hunter Harrison, PDG de CP, et Edward Burkhardt, PDG de MMA.

Les changements se produisent, mais pas ceux que l’on pense…

Naomi Klein analyse la « stratégie du choc » conçue par Milton Friedman. Dans l’étape 1, « on profite de ce que la population est encore étourdie : elle ne pourra s’opposer à ce que l’on veut lui imposer ». On change le zonage en vitesse pour inclure l’expropriation de maisons qui sont totalement en dehors de la zone touchée par la catastrophe. Il y en a qui s’intéressent aux terrains…

Dans l’étape 2 de la « stratégie du choc », on « prétexte une décontamination obligatoire pour faire table rase de l’Ancien Monde. Exclure la population du lieu du drame, pour qu’elle ne puisse s’y accrocher, pour qu’il n’y ait plus de retour possible ».

Enfin l’étape 3 : « Face à une population dont le choc a été exacerbé par la destruction de ses repères et habitudes, on peut lancer une reconstruction ou « réinvention » qui sera reçue avec une acceptation résignée ». On a le cas de gens vivant à Fatima, un secteur éloigné et épargné par la catastrophe : le propriétaire doit signer en vitesse son expropriation sinon il perd tout. Quand les proprios sont enfin tassés, c’est une pharmacie Jean Coutu qui vient s’installer sur les terrains libérés.

Côté légal, on arrête les petits joueurs et on limite l’enquête au maximum. Des prises de contrôle sont effectuées et les rendements aux actionnaires démultipliés.

Le livre fait étalage de certaines manœuvres politiques et entrepreneuriales visant à protéger les compagnies ferroviaires. Même à l’aube de 2022, soit huit ans plus tard, les rails passent toujours au centre-ville de Lac-Mégantic.

« MMA-Canada, essentiellement en faillite, n’a rien payé et n’a pas été poursuivie en justice ».

« Rien n’a changé dans les lois ferroviaires au Canada depuis la tragédie : les compagnies s’auto-réglementent, s’auto-surveillent et, en cas d’accident, s’auto-enquêtent. Ainsi, c’est le CP lui-même qui a enquêté sur la mort de trois de ses employés lors d’un accident survenu en février 2019 en Colombie-Britannique. L’enquêteur du CP, empêché d’enquêter, a dénoncé son employeur et réclamé une enquête indépendante de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) et du Bureau de la Sécurité des transports du Canada (BST), une enquête immédiatement acceptée par l’enquêteur en chef responsable du cas au BST. Le jour même, cet enquêteur du BST a été démis de ses fonctions. L’enquêteur du CP a conclu sur un no-fault du CP ».

Titre : Mégantic – Un train dans la nuit.

Auteur : Anne-Marie Saint-Cerny

Éditions : Écosociété, 2021

ISBN : 978-2-89719-686-8

Chroniques de jeunesse.

Roman graphique Chroniques de jeunesse, de Guy Delisle
Roman graphique Chroniques de jeunesse, de Guy Delisle

Quand on se promène dans le Vieux-Québec et que l’on fait un détour par les remparts dans la haute-ville, en regardant vers le club nautique, il est impossible de manquer l’énorme tour en étages de l’usine qui fût successivement appelée l’Anglo Canadian Pulp and Paper Mills en 1927, puis la Reed Paper en 1975, puis la Daishowa en 1988, la Stadacona en 2001 et depuis 2004 la White Birch.

L’immense panache de fumée qui s’échappe de cette cheminée attire immédiatement le regard, d’autant plus que les grosses usines ne sont pas très nombreuses à Québec. Avec son nouveau roman graphique « Chroniques de jeunesse », Guy Delisle nous invite à faire une visite à l’intérieur du bâtiment au moyen d’un retour dans le passé, alors qu’il y a travaillé pendant quelques été comme étudiant.

Le livre est encore une fois très réussi. Le style unique et sans fioritures de Guy Delisle nous amène immédiatement dans un autre monde, celui de l’étudiant qui fait des quarts de nuit dans une usine pour gagner un salaire minimum. On y rencontre les journaliers de l’époque de même que le père de l’auteur qui a travaillé à l’usine comme dessinateur industriel pendant des décennies. L’auteur ne manque pas de souligner l’absence de communication qui existait alors entre un père et son fils, de même que les échanges assez directs qui existaient entre les journaliers et un étudiant qui faisait son possible pour apprendre sans faire trop d’erreurs.

Page du roman graphique "Chroniques de jeunesse" de Guy Delisle
Page du roman graphique « Chroniques de jeunesse » de Guy Delisle

J’aime lire à propos des histoires vécues et ai apprécié le ton très humain et humoristique emprunté par Guy Delisle, que ce soit à travers ses textes ou ses illustrations. En 152 pages, le lecteur rencontre une foule de personnages intéressants et ne peut qu’être surpris par le danger qui est toujours présent dans les opérations quotidiennes à l’intérieur d’une usine telle que la White Birch.

Bref, encore une fois, Guy Delisle a relevé le défi de présenter au lecteur un roman graphique qui nous apprend quelque chose tout en nous divertissant, en s’assurant toujours d’ajouter cette touche d’humanité et d’humour qui a fait le succès de l’auteur.

Titre : Chroniques de jeunesse

Auteur : Guy Delisle

Éditions : Pow Pow

ISBN : 9782924049914

© 2021

S’enfuir – Récit d’un otage.

S'enfuir récit d'un otage
S’enfuir récit d’un otage

Guy Delisle a mis quinze ans à écrire ce roman graphique qui raconte l’histoire de l’enlèvement contre rançon (K&R) en 1997 d’un citoyen français, Christophe André, alors qu’il travaillait pour une ONG médicale dans la région du Caucase.

Fidèle à ses habitudes, cet auteur québécois nous offre un récit passionnant et plein d’humanité. Une œuvre qui se penche sur une histoire vécue apporte souvent, lorsqu’elle est bien ficelée, un supplément d’intérêt. C’est ce qui se produit avec le travail de Guy Delisle. Ce roman graphique de 428 pages se lit d’un trait!

Comme cela se produit souvent lors d’événements dramatiques, l’être humain se découvre un caractère et des forces insoupçonnées qui lui permettent de faire face à la maltraitance, à la solitude et au stress.

S'enfuir récit d'un otage par Guy Delisle
S’enfuir récit d’un otage par Guy Delisle

Le rythme et la qualité des dessins et du scénario font en sorte qu’il est facile pour le lecteur de plonger dans l’histoire et de s’imaginer à la place du captif. Est-ce que les décisions prises par l’otage auraient également été prises par le lecteur? Aurait-il utilisé d’autres moyens pour faire face à sa captivité?

Je décourage tout de suite le lecteur de tenter de connaître la conclusion de cette prise d’otage avant d’entreprendre la lecture du bouquin parce qu’alors une partie de la tension inhérente au sujet disparaît. Résistez à la tentation, l’effort en vaut la peine!

Titre : S’enfuir – récit d’un otage.

Auteur : Guy Delisle

Éditions : Dargaud

©2016 et 2017

ISBN : 978-2205-07547-2