J’apprcie Erik Orsenna pour son rudition, sa pense cartsienne, sa posie et sa capacit rechercher le dtail qui amusera le lecteur tout en l’informant. Dans son livre, l’auteur aborde avec un même confort une grande varit de thèmes portant sur l’histoire, la religion, la philosophie, l’environnement, les changements climatiques, les nergies renouvelables, la science pure, la politique et l’conomie.
Etant d’abord un homme de terrain, il a rapidement reconnu la ncessit de dvelopper et conserver des contacts politiques dans de très nombreux pays de façon faciliter ses dplacements dans des zones souvent considres comme problmatiques. Le lecteur bnficie de ces accès privilgis.
Dans la « La Terre a soif », il nous prsente le portrait de trente-trois fleuves travers le monde. La liste n’est bien sûr pas exhaustive, car press par l’diteur après des annes de voyage et d’observations, il a bien fallu qu’il finisse par pondre son bouquin. Je sais bien que si cela ne tenait que de lui, il serait encore sur la route accumuler des informations toutes plus intressantes les unes que les autres.
Voici quelques-uns des fleuves dont il est question dans ce livre: Mississipi, St-Laurent, Nil, Loire, Congo, Gange, Mkong, Colorado et même les deux fleuves de Panama. Le plus petit des fleuves mentionns dans le livre coule en Bretagne et se nomme Trieux, alors que le plus important est l’Amazone au Brsil.
Avec certains pays plus puissants comme la Chine ou Israël, la ngociation pour l’administration quitable d’un cours d’eau s’avère difficile. Les barrages construits rduisent le dbit en aval et les plus petits pays environnants s’arrangent avec ce qui reste. La captation des eaux assèche aussi les terres sur de grandes distances, affectant la production agricole.
Le transport maritime local doit galement s’adapter la diminution du dbit, par exemple pour le canal de Panama : « Le manque d’eau, c’est justement la grande crainte de Panama. On se rappelle que le cœur du canal est le grand lac Gatún. S’il s’asschait, les bateaux buteraient sur des rochers et du sable : ils ne pourraient plus transporter leur cargaison d’une mer l’autre. Les camions devraient prendre le relais » (p.242).
À l’oppos, l’auteur montre qu’il y a moyen de grer un important cours d’eau en en faisant bnficier les pays riverains et cite en exemple la gestion du fleuve St-Laurent par les Etats-Unis et le Canada.
Contrairement ce que l’on pourrait penser quand il s’agit de traiter d’environnement et de raret de l’eau, tout n’est pas que ngatif dans ce livre. Au contraire, Erik Orsenna a compris que le lecteur en a un peu marre des propos alarmistes. L’auteur a donc conçu un bouquin très bien balanc où il est possible de faire voluer la pense du lecteur sans que ce dernier sente le besoin de prendre un antidpresseur chaque chapitre.
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Ce nouvel album des aventures de Blake et Mortimer constitue une très belle surprise. C’est la première fois que Jos-Louis Bocquet, Jean-Luc Fromental et Antoine Aubin travaillent ensemble et le rsultat de cette collaboration en a tonn plus d’un.
Depuis plusieurs annes, les combinaisons d’auteurs et de dessinateurs se succèdent pour assurer un rythme constant de publication, c’est–dire une bande dessine de Blake et Mortimer par anne.
Pour Dargaud-Lombard, il s’agit d’une source de revenus non ngligeable, cette srie ayant des adeptes travers le monde depuis plusieurs dcennies.
« Huit heures Berlin » nous plonge dans la guerre froide, au moment où le mur de Berlin vient d’être construit. Les lecteurs plus âgs connaissent les vnements entourant la construction du mur, mais pour les plus jeunes il s’agira gnralement d’une première approche de cette priode.
Tout y est dans cet album : quelques notions d’histoire et de politique, les reconstitutions d’poque quant l’architecture extrieure, le mobilier, les vhicules, les couleurs judicieusement choisies par Laurence Croix et surtout un scnario suffisamment bien ficel pour empêcher le lecteur de prvoir le droulement de l’intrigue.
On se promène entre l’Allemagne et les anciens pays du bloc communiste, on marche dans un tunnel cr l’poque par l’Occident pour couter les conversations ayant lieu Berlin-Est, on pnètre dans un ancien asile supposment abandonn depuis longtemps. De plus, comme toujours dans cette bande dessine, le mlange entre le rel et la science-fiction ajoute l’intrêt.
Les auteurs s’efforcent de rajeunir un peu le vieux Mortimer sans toutefois perdre en chemin les inconditionnels. Les femmes obtiennent parfois un rôle positif, parfois ngatif, mais elles ne sont plus des potiches tenant un sac main. Difficile imaginer qu’on aurait pu voir un jour dans un album de cette srie un nu sur un calendrier de garage. Quel scandale ! Ça n’aurait pas pass l’poque où Edgar P. Jacobs travaillait avec Herg pour les albums Tintin…
Bref, un beau succès que ce vingt-neuvième album de la srie. Il est vident que ce trio de crateurs se verra confier d’autres albums.
Avec les divisions internes que vivent les Etats-Unis sous Donald Trump, les citoyens n’hsitent pas passer leur message aux politiciens. En 2019 Brookline, dans la rgion de Boston, une simple marche dans le quartier a rapidement permis de prendre les photos ci-dessous.
Pour
ceux qui ne comprennent pas suffisamment l’anglais, je traduis les messages.
Dans la première photo, on peut lire : « Dans notre Amrique, tous
les gens sont gaux. C’est l’amour qui gagne. La vie des Noirs compte. Les
immigrants et les rfugis sont bienvenus. Les handicaps sont respects. Les
femmes sont responsables de leur corps. Les gens et la planète ont davantage de
valeur que le profit. La diversit est clbre. »
Dans
la photo ci-dessous, le message est clair : « Pas d’enfants dans des
cages ».
L’auteur est un journaliste et documentariste allemand qui a travaill pour Stern et Der Spiegel. Il est galement l’auteur de quatre autres livres. Le titre original de son livre crit en allemand est : « Der totale Rausch. Drogen im Dritten Reich ».
La recherche effectue pour ce livre dmontre que durant les annes prcdant la Seconde Guerre mondiale, la population allemande utilisait rgulièrement des drogues pour supporter plus facilement la dfaite de la Première Guerre mondiale. La consommation de narcotiques tait banalise. Il fallait changer les habitudes de la population.
Hitler est alors prsent comme « un modèle de vie pure tous gards […], l’ascète, l’ennemi des drogues qui fait fi de ses propres besoins » (p.25). Mais s’il y a quelqu’un en Allemagne qui en vient utiliser rgulièrement des drogues et a même accès son fournisseur personnel, en l’occurrence le fameux docteur Morell, c’est bien Hitler.
Dans les documents prsents par l’auteur, Hitler est aussi dcrit comme le Patient A. « Hitler s’habitue aux piqûres rptition ainsi qu’ ces mystrieuses substances qui coulent dans ses veines pour soi-disant le revigorer ». (P.37.)
En 1937, les usines Temmler crent la première mthylamphtamine allemande, appele aussi pervitine. L’utilisation gnralise se rpand dans la population allemande de même que dans l’arme. La pervitine, c’est le coup de fouet artificiel qui dure plus de douze heures. C’est le remède artificiel qui « règle les problèmes » et qui tient aussi en veil le soldat allemand pendant plusieurs jours d’affile. « En consommer devient aussitôt aussi naturel que de prendre une tasse de caf » (p.44)
L’arme allemande, qui ne dort que tous les deux ou trois jours, fonce travers l’Europe. C’est le fameux Blitzkrieg. Les blinds ne s’arrêtent plus. Alors que les soldats allis doivent sommeiller tour de rôle, le soldat allemand fonce sans prendre de repos, nergis la mthamphtamine.
La Pologne est la première surprise. « […] pourvue de drogue foison, mais prive d’indications posologiques, la Wehrmacht fond sur le voisin polonais qui, lui, n’est pas dop et n’a pas ide de ce qui l’attend. » (p.63)
Trente-cinq millions de doses sont commandes pour l’arme et la Luftwaffe. « La Wehrmacht devient ainsi la première arme au monde tabler sur la drogue chimique […]. Une nouvelle forme de guerre va faire son apparition. » (p.76)
Peter Steinkamp, un historien de la mdecine, affirme que « le Blitzkrieg a t men grâce la mthamphtamine, pour ne pas dire qu’il tait fond sur l’usage de la mthamphtamine » (p.85)
Les officiers allemands n’obissent plus aux ordres, griss par les victoires rapides. « Guderian […] continue son offensive alors qu’il a formellement reçu l’ordre de faire halte » (p.86). C’est la même chose pour Rommel, qui n’obit plus aux ordres du gnral Hoth : « Il a perdu tout sens du danger [ce qui est] un symptôme typique d’une consommation excessive de mthamphtamine. Il poursuit son offensive de jour comme de nuit ». (P.88.) Hitler ne contrôle plus les gnraux des divisions blindes qui agissent maintenant de façon autonome.
Dcid reprendre le contrôle sur ses officiers, Hitler prendra alors une dcision qui vacue momentanment toute stratgie militaire. Il ordonne ses troupes de s’arrêter pendant dix jours, alors que celles-ci ont pratiquement termin d’encercler les Allis. Les officiers allemands insistent auprès d’Hitler pour achever la campagne militaire, mais « Hitler veut montrer l’arme de terre que c’est lui et personne d’autre qui mène cette guerre » (p.95). À Dunkerque, « plus de 340,000 soldats français, belges et britanniques s’chappent ainsi par la mer » (p.95).
L’auteur cite de nombreux documents de recherche faisant tat des tmoignages de soldats et officiers consommant massivement des produits dopants. Cette consommation excessive est pratique jusqu’aux plus hauts niveaux de la hirarchie militaire. La population civile en consomme galement : « Il ne faut pas bien longtemps pour que le nombre de comprims qui ont atterri dans les estomacs et le sang des Allemands passe la barre des cent millions de doses » (p.114).
Un Hitler quotidiennement dop et au jugement altr commet une autre grave erreur stratgique quant aux combats qui font rage en Russie. Il interdit tout mouvement de repli des troupes allemandes sans son autorisation. La Wehrmacht subit ainsi de lourdes pertes face aux divisions d’lite russes « fraîchement arrives de Sibrie » (p.135).
Une autre erreur stratgique survient en dcembre 1941 alors que l’Allemagne dcide de dclarer la guerre aux Etats-Unis : « [L’Allemagne] est dj puise par les combats qu’elle mène sur les diffrents fronts tandis que le colosse industriel d’outre-Atlantique est, lui, prêt mener bataille » (p.139).
L’entêtement d’Hitler « ne pas vouloir cder un pouce des territoires conquis trouve ici une raison plus profonde : que les chemines fonctionnent le plus longtemps possible l’est, dans les champs d’extermination d’Auschwitz, Treblinka, Sobibor, Chelmno, Majdanek et Belzec. Tenir toutes les positions, jusqu’ ce que tous les Juifs aient t tus. S’loignant toujours un peu plus des lois humaines [Hitler] continue sa guerre contre les faibles » (p.140).
L’auteur poursuit son rcit quant aux autres erreurs de stratgie militaire d’Hitler. Il donne galement des prcisions quant la liaison troite qui lie le Dr Morell et Hitler, de même que des dtails pointus quant aux cocktails de mdicaments consomms quotidiennement par Hitler, dont l’Eucodal, la cocaïne et la morphine. Profitant de son lien troit avec le patient A, le Dr Morell en profite galement pour accroître son influence et sa fortune personnelle.
Le lecteur constate le dclin progressif du Führer et les consquences des dcisions dsespres de ce dernier. Il est tout de même tonnant que dans les biographies d’Hitler cette consommation aussi intensive de drogues et ses consquences soient peine soulignes.
Vers la fin du livre se trouvent des passages importants, particulièrement difficiles, sur certaines expriences effectues sur les prisonniers des camps de concentration.
Le livre « L’extase totale » permet de comprendre de façon diffrente la Seconde Guerre mondiale et la psychologie du peuple allemand cette poque. Il est extrêmement surprenant de constater quel point les drogues chimiques ont jou un rôle primordial avant et pendant ce conflit mondial. Même la comprhension du Blitzkrieg s’en trouve altre.
La technologie de pointe et la stratgie militaire allemande combine l’usage intensif de drogues chimiques par les troupes ont, dans un premier temps, donn un avantage important aux Allemands. Cependant, avec le temps, un manque de contrôle adquat sur ces drogues et une absence volontaire de sensibilisation quant aux effets secondaires de la pervitine et autres mixtures chimiques ont eu des consquences ngatives irrversibles sur un grand nombre de soldats et d’officiers et occasionn de graves erreurs de stratgie militaire. La drape idologique a galement occasionn la perte de millions de vies humaines.
Sur l’mission « Fareed Zakaria GPS » diffuse sur CNN le 12 novembre 2017, Fareed a invit le premier ministre de Turquie, Binari Yildirim.
La Turquie prtendait que Fethullah Gulen, un imam amricain vivant aux Etats-Unis, tait derrière le coup manqu contre le prsident Erdogan en 2016. Erdogan dsire depuis ce temps que M. Gulen soit renvoy en Turquie.
Pour expliquer le refus des Etats-Unis de renvoyer M. Gulen en Turquie, Fareed Zakaria a alors dit quelque chose comme : « Mes contacts me disent qu’il n’y a rien de solide supportant le fait que Fethullah Gulen ait t l’organisateur du coup manqu contre la Turquie en 2016 ».
Le premier ministre de Turquie, bien prpar, lui a alors rtorqu : « Quand vous avez dit que Oussama Ben Laden tait derrière les attaques du 11 septembre 2001, nous n’avons pas demand de preuves. Nous vous avons seulement support ». [Et immdiatement t en guerre en Afghanistan sans preuve de l’implication de Ben Laden].
En d’autres mots, pour demeurer amie avec les Etats-Unis, la Turquie n’a pas demand que ces derniers prsentent des faits probants que Ben Laden tait derrière les attentats du 11 septembre 2001,un fait que ce dernier a ni dès le premier jour. La Turquie savait que les Etats-Unis avec des intrêts stratgiques en Afghanistan et elle a support n’importe quelle raison, avec ou sans preuve, qui justifierait une invasion de l’Afghanistan.
Maintenant, la Turquie dit que les Etats-Unis ne sont pas d’accord pour supporter les intrêts stratgiques turcs, de la même façon que cela a t fait pour les Amricains. C’est un peu comme dire aux Etats-Unis : “Ne demandez pas de preuves, faites-le, comme nous l’avons fait pour vous”. En 2016, sur le même sujet, Erdogan disait : “Si nous sommes des partenaires stratgiques ou des partenaires modèles, faites ce qui est ncessaire”.
Nous pouvons tirer deux ides de la discussion entre Fareed Zakaria et Binari Yildirim :
1) Que l’imam Fethullah Gulen n’a possiblement rien voir avec le coup manqu de 2016 contre la Turquie, pas plus que Ben Laden n’a voir avec les attaques du 11 septembre 2001. Mais tant donn que Gulen s’oppose fortement Erdogan, il est considr comme une menace pour les intrêts stratgiques turcs (ou pour la possibilit d’Erdogan de rester indfiniment en poste en Turquie?).
La Turquie s’attend ce que les Etats-Unis s’abstiennent d’obtenir des preuves d’une quelconque implication de Gulen et elle dsire malgr tout que le religieux soit renvoy en Turquie en signe de bonne volont et d’amiti entre les deux pays.
2) Que les amis des Etats-Unis ne semblent pas poser beaucoup de questions et vouloir des preuves quand il s’agit des attaques du 11 septembre 2001. Ils suivent le courant et espèrent un retour des faveurs lorsque viendra le temps…
Fareed a rapidement chang de sujet…
Pour des explications quant au coup manqu de 2016 contre la Turquie, cliquez sur le lien suivant sur CNN : Le coup manqu contre la Turquie .
Au sujet des attaques du 11 septembre 2001, vous trouverez plusieurs faits prsents dans un livre crit par un ancien journaliste français bien connu, Eric Reynaud, et rsums dans la section « sujets controverss» de mon site web.
La population de l’Iran vient de rlire un leader modr. Bonne nouvelle pour le pays et les voisins. Au même moment, Donald Trump, en voyage au Moyen-Orient, renforce l’ide d’une ncessaire diminution des tensions politiques dans la rgion.
Mais du même coup, les Etats-Unis annoncent la signature d’un contrat d’une valeur de 350 milliards de dollars avec l’Arabie Saoudite pour la livraison et l’entretien d’armements sur une priode de dix ans. Et avant ce contrat, l’Arabie Saoudite tait dj au premier rang des pays de la planète qui dpensent le plus pour les armements.
L’Iran et l’Arabie Saoudite n’tant pas traditionnellement sur la même longueur d’onde, il est facile d’imaginer l’impact que ce contrat peut avoir sur les dirigeants Iraniens.
Si je ne m’entends pas bien avec mon voisin et que ce dernier signe un contrat de 350 milliards de dollars pour acqurir et entretenir des armes, je ne crois pas que ma raction naturelle en sera une de comprhension et de stabilit, et encore moins de dmilitarisation. Je vais tout d’abord me demander quoi toutes ces armes pourraient ventuellement servir, et si je suis moindrement raliste, j’imaginerai même qu’il y a des possibilits que mon voisin les utilise ventuellement contre moi.
Tous les pays du monde, même les pays dont on dit qu’ils sont « neutres », ont des intrêts stratgiques dfendre et promouvoir. Mais souhaiter une stabilit avec des contrats militaires de cette ampleur, c’est rêver en couleur.
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Politique amricaine: la construction d’un mur entre le Mexique et les Etats-Unis
L’importance de sauver la face en politique
La façon dont le nouveau gouvernement de Donald Trump traite le Mexique n’est pas politiquement habile. À cause d’une msentente sur l’immigration illgale entre les deux pays, le Prsident amricain estime ncessaire de rgler le litige sur la place publique en utilisant des expressions qui font perdre la face aux Mexicains aux yeux de la planète. Quand le gouvernement d’un pays perd la face, c’est un blocage assur et une escalade garantie des tensions. Dire aux Mexicains qu’ils vont payer pour un mur qui les empêchent d’entrer aux Etats-Unis est irresponsable.
L’apport conomique des Mexicains aux Etats-Unis
La croissance conomique amricaine a toujours profit d’une bonne proportion de gens qui travaillent pour un faible salaire et dans des conditions discutables, spcialement lorsqu’ils sont considrs comme travailleurs illgaux et arrivent justement du Mexique et d’Amrique Centrale. Se priver de cette main-d’œuvre et forcer les employeurs doubler sinon tripler les salaires ne pourra que faire augmenter les prix des produits amricains en risquant de les rendre non comptitifs. Cela aura galement pour effet d’appauvrir le Mexique et d’accroître les ingalits entre les deux pays, puisque beaucoup de travailleurs « illgaux » envoient une partie de leur salaire dans leur pays d’origine pour aider leur famille.
Un mur inefficace contre l’importation de la drogue
Le mur gnèrera des divisions et des tensions entre les propritaires terriens, les partis politiques et les pays et sa construction exigera de très fortes dpenses qui n’aideront pas rellement ralentir l’entre de la drogue aux Etats-Unis. Pourquoi? 95% des conteneurs arrivant de l’Europe et de l’Asie ne sont pas inspects en profondeur, autant cause de ressources humaines et matrielles insuffisantes que dans le but de ne pas retarder indûment les oprations commerciales. Le temps, c’est de l’argent. Il y aura toujours d’importantes lacunes dans le processus de vrification. Le livre « Ninety percent of everything » de Rose George traite du sujet:
Il n’y a pas de façon facile d’empêcher la drogue d’entrer en Amrique ou dans tout autre pays. L’importation continuera jusqu’ ce que les faiblesses dans le système soient corriges. Cela signifie un contrôle beaucoup plus efficace de ce qui se trouve dans les conteneurs. Et c’est plutôt l qu’il faut investir les milliards, pas dans la construction d’un mur…
Le slogan politique de Donald Trump « Make America great again » (rendre l’Amrique sa grandeur) ne fait aucun sens lorsqu’analys en fonction de ses paroles et actions.
Vous ne pouvez pas rendre l’Amrique sa grandeur si votre plateforme politique ne prsente pas un plan d’action dtaill pour la population. Des formules faciles telles que « Regardez-moi cette foule! », « Nous allons construire un mur! » et « J’aurais bien aim lui casser la gueule! » ne sont pas des promesses pour un futur glorieux.
Vous ne pouvez pas rendre l’Amrique sa grandeur si vos ides conomiques impliquent d’isoler les Etats-Unis de ses partenaires commerciaux de longue date. Les Etats-Unis ont cr 255,000 emplois dans le seul mois de juillet (2016). Pour un pays qui, selon Trump, cède tout l’avantage de ses partenaires commerciaux, cela semble un peu contradictoire. Une plateforme populiste n’aidera pas les Amricains grandir et comprendre comment fonctionnent les affaires.
Vous ne pouvez pas rendre l’Amrique sa grandeur en accroissant les tensions entre groupes ethniques l’intrieur des Etats-Unis.
Vous ne pouvez pas rendre l’Amrique sa grandeur en mentant constamment. Plusieurs dclarations de Trump se sont avres mensongères.
Vous ne pouvez pas rendre l’Amrique sa grandeur si les quelques propositions gnrales que vous mettez de l’avant se contredisent entre elles. Donald Trump promet d’abaisser le dficit amricain (23 trillions de dollars) et, du même coup, rpète qu’il dpensera des milliards et des milliards de dollars pour remettre jour la capacit militaire du pays. Ceci est totalement contradictoire et implique que la population amricaine devra payer pour les nouvelles dpenses en même temps qu’elle absorbe les fortes compressions budgtaires. Etant donn que les riches Amricains ne veulent pas payer davantage, et que les Amricains les plus pauvres sont peine capables de survivre, cela implique qu’une classe moyenne en train de disparaître s’occupera de rgler la note. Cela ne rendra pas l’Amrique sa grandeur, mais crera plutôt la crise interne la plus grave qui ait jamais frapp les Etats-Unis.
Vous ne pouvez pas rendre l’Amrique sa grandeur en tant impoli et brusque, en insultant et vous moquant de quiconque ne partage pas vos ides. Cette attitude n’aide pas rendre l’Amrique sa grandeur.
Vous ne pouvez pas rendre l’Amrique sa grandeur en tant condescendant envers les prisonniers de guerre. Pendant que certains Amricains taient faits prisonniers de guerre, Donald Trump profitait d’une vie confortable dans la scurit de sa demeure.
Vous ne pouvez pas rendre l’Amrique sa grandeur en abaissant le dbat politique un niveau jamais atteint auparavant.
Vous ne pouvez pas rendre l’Amrique sa grandeur en considrant que la dictature est synonyme de leadership. Vu sous cet angle, Hitler serait un grand leader et nous connaissons tous les consquences de ses actions. Offrez la prsidence un go gigantesque et hors de contrôle et les Amricains, autant que le reste du monde, en paieront le prix.
Vous ne pouvez pas rendre l’Amrique sa grandeur en ridiculisant le Mexique, un voisin extrêmement important. Ce pays est un partenaire commercial majeur des Etats-Unis et a galement une culture fantastique, pour quiconque est suffisamment curieux pour ouvrir un bouquin et s’instruire sur le sujet. Mais cela prend de la curiosit et le sentiment qu’il y a d’autres personnes importantes sur cette planète autre que soi-même.
Vous ne pouvez pas rendre l’Amrique sa grandeur si les candidats rpublicains la vice-prsidence et la prsidence se contredisent l’un et l’autre sur des sujets très importants la tlvision nationale, et si le candidat la vice-prsidence se retrouve incapable de dfendre les positions du candidat la prsidence.
Vous ne pouvez pas rendre l’Amrique sa grandeur si le candidat rpublicain la prsidence ne comprend pas les consquences qui dcoulent d’une attitude nationaliste populiste. Les Allemands sont passs travers cette exprience dans le pass. J’ai inclus un vido qu’il vaut vraiment la peine d’couter jusqu’au bout :
Esprons que le ressentiment actuel exprim envers l’afflux de plus d’un million de rfugis accepts rcemment en Allemagne ne favorisera pas la monte de l’extrême droite et une rptition des erreurs du pass.
Vous ne pouvez pas rendre l’Amrique sa grandeur en gouvernant par la peur. Cela n’offre pas un futur prometteur. Vous avez alors une population qui a besoin de plusieurs armes feu par personne pour pouvoir se sentir en scurit et bien dormir la nuit.
Vous ne pouvez pas rendre l’Amrique sa grandeur si vous poussez la population s’armer plus que tout autre pays dans le monde. Les tueries entre Amricains placent le pays en première position pour la violence dans le monde. Vous pouvez redonner de la grandeur l’Amrique en rduisant le nombre d’armes en circulation et en augmentant le contrôle quant l’acquisition de ces armes.
Vous ne pouvez pas rendre l’Amrique sa grandeur si vous ne comprenez pas bien, en tant que prsident, ce qui se passe rellement en Syrie en 2016. Rsumer la situation de façon simpliste ne fait qu’augmenter la confusion. En Syrie, il y a des crimes de guerre qui sont perptrs. La population civile et les hôpitaux sont dlibrment bombards pour protger et amliorer les positions stratgiques militaires.
Vous ne pouvez pas rendre l’Amrique sa grandeur en disant qu’Hillary Clinton sera envoye en prison si vous devenez prsident des Etats-Unis. Ceci se fait sous les rgimes autoritaires autour de la planète et ne constitue en rien une promesse qui aidera amliorer la crdibilit des Etats-Unis dans le monde libre.
Vous ne pouvez pas rendre l’Amrique sa grandeur en dstabilisant les allis de l’OTAN ou en disant que vous utiliseriez la bombe nuclaire contre l’Europe si cela tait ncessaire.
Vous ne pouvez pas rendre l’Amrique sa grandeur en promettant que vous mettrez de l’avant des rformes sur les impôts des socits qui feront en sorte que cela nuise vos propres entreprises. Quelqu’un qui s’est battu pour maintenir ses hôtels et casinos en vie ne changera pas soudainement d’ide une fois lu prsident des Etats-Unis. Il ne mettra pas en place des mesures qui mettront en danger ce qu’il a pris tant de temps sauvegarder. Cela ne fait pas de sens. La personne qui est la mieux place pour modifier une loi qui risque de nuire des entreprises est celle qui ne possède pas elle-même ces entreprises.
Vous ne pouvez pas rendre l’Amrique sa grandeur en lisant quelqu’un qui dteste les frquents breffages. Être prsident des Etats-Unis requiert d’être disponible, intress et capable d’couter les multiples breffages quotidiens. Vous devez avoir la personnalit pour accepter cela, même si vous voudriez plutôt être ailleurs.
Vous ne pouvez pas rendre l’Amrique sa grandeur en demeurant silencieux sur la façon de diminuer de façon raliste les diffrences de revenus entre Amricains. Je ne parle pas d’galit de revenus, mais d’une diminution des extrêmes entre riches et pauvres. Cela aiderait certainement remettre de l’avant le « rêve amricain », abaisserait les tensions sociales et le taux de criminalit et donnerait davantage de sens au slogan « Redonner l’Amrique sa grandeur… ». Mais nous n’en sommes pas encore l…
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Les dbats politiques tlviss de 2016 sur CNN entre Hillary Clinton et Donald Trump ont mis de l’avant le racisme aux Etats-Unis. La ville de Chicago y a t mentionne, car elle dtient le record national pour le nombre de morts violentes. Le livre « Histoire de Chicago » permet, entre autres, de mieux comprendre ce qui alimente les ingalits sociales entre Noirs et Blancs depuis la cration de cette ville.
Le lecteur comprend que ce ne sont pas les dficiences culturelles qui sont la base des problèmes, mais plutôt le racisme institutionnalis et les choix conomiques des diffrentes administrations municipales.
La ville s’est construite avec en toile de fond la couleur de la peau qui dtermine le type d’emploi que quelqu’un peut occuper. Eventuellement, même la planification urbaine a t pense de sorte que les Blancs et les Noirs soient spars : le mur artificiel que constitue la Dan Ryan Expressway ou le Dearborn Park en sont de bons exemples.
En 2016, les sondages montrent, de façon surprenante, un appui très important au candidat rpublicain la prsidence des Etats-Unis, Donald Trump. Trump connaît bien Chicago et il y a fait construire sa « Trump Tower ».
Le candidat du Parti rpublicain reprend dans sa plateforme politique certains des lments qui ont fait la popularit et le succès de la famille Daley qui a rgn sur Chicago durant des dcennies : l’exploitation de la peur entre les groupes ethniques pour bâtir et maintenir un pouvoir politique, l’ide de construire un mur et l’utilisation de la torture comme solutions simplistes des problèmes complexes.
Ce populisme plaît une certaine classe d’lecteurs amricains qui sont très facilement effrays par les diffrences entre les gens et les cultures.
Bref « Histoire de Chicago » est un livre qui est toujours d’actualit et dont les auteurs ne craignent pas de soulever des sujets politiquement dlicats.
Chicago
Chicago devint un territoire des Etats-Unis avec le trait de Paris en 1783. Il s’en suivit une appropriation des terres des Indiens au moyen des manœuvres les plus diverses, dont la signature de contrats alors que les autochtones taient ivres. Vers 1830, après l’loignement dfinitif des Indiens, la fièvre spculative commença.
Le rail
À partir des annes 1860, Chicago fit en sorte de devenir le centre travers lequel s’arrêtaient les grandes compagnies ferroviaires du pays. La ville se dveloppa très rapidement. Les passagers, le btail, les crales et autres marchandises devaient dsormais transiter par Chicago. La ville dpendait du train pour croître et les compagnies de train dpendaient de Chicago pour être profitables.
L’accroissement rapide de la population de Chicago fut essentiellement dû la migration en provenance de l’Europe (Irlandais, Allemands, Polonais, Italiens). La dynamique changeante et souvent violente entre tous les groupes ethniques prsents Chicago est vraiment bien dtaille dans le livre.
Les grands magasins
Un peu avant 1900, on assiste la cration des grands magasins, avec la possibilit de commander par catalogue et payer par crdit. De nouvelles catgories d’employs et de gestionnaires s’ajoutent au monde ouvrier et aident former la classe moyenne.
L’immigration des Noirs vers Chicago
À partir de 1910, l’immigration des Noirs en provenance du sud des Etats-Unis augmente. Chicago tait une ville abolitionniste. Cela ne veut pas dire qu’elle tait en faveur de l’galit raciale, mais plutôt contre l’esclavage. En fait, Chicago est progressivement devenue la ville la plus sgrgue des Etats-Unis.
Les Noirs arrivaient en masse en provenance du sud des Etats-Unis, non pas seulement pour des raisons conomiques, mais galement pour chapper la violence raciale et la sgrgation qui svissaient dans de nombreux Etats. Bien que loin d’être idale, la situation Chicago tait meilleure que dans le sud du pays.
La Première Guerre mondiale rduisit de façon importante le nombre d’immigrants en provenance de l’Europe. Cela constitua un srieux problème pour une ville qui recevait de nombreux contrats militaires et avait besoin d’un très grand nombre d’employs pour ses diffrentes usines. Cela favorisa galement la « grande migration », « c’est–dire l’intensification spectaculaire de la migration des Afro-Amricains vers les grands centres urbains du Nord-Est et du Middle West […] » (p.143)
Les abattoirs de Chicago
Chicago tait reconnue pour le nombre très lev de ses abattoirs, et en particulier les abattoirs de porc. La senteur et la pollution occasionnes par cette activit taient pouvantables. Des laboratoires de chimie permettaient l’utilisation de toutes les parties de l’animal. À ce sujet, l’crivain Georges Duhamel disait dans son livre : À Chicago, « on utilise tout, sauf le cri des porcs » (p.63).
Les travailleurs noirs n’avaient pas le droit de travailler dans l’industrie sidrurgique de Chicago et devaient se contenter des abattoirs où ils taient engags comme travailleurs manuels. Mais l encore, ils n’avaient pas accès des emplois qualifis.
La Seconde Guerre mondiale
Durant la Seconde Guerre mondiale, Chicago tait en concurrence avec d’autres grandes villes amricaines pour obtenir de juteux contrats militaires. Elle ne mnagea pas ses efforts pour montrer son support au gouvernement amricain et elle finit par profiter de milliards de dollars pour la construction de tanks, tracteurs, torpilles, obus et avions (dont le bombardier B -29).
Pour compenser le manque de main-d’œuvre, tant donn que beaucoup d’hommes s’taient enrôls en tant que volontaires et taient partis la guerre, les femmes entrèrent massivement sur le march du travail. Les employeurs y virent l’occasion d’augmenter les profits en rduisant le salaire des femmes, qui n’tait plus que 65 % de celui des hommes pour un travail comparable. Cela reprsente la façon dont les femmes ont t remercies pour leurs efforts et leur collaboration.
Transformation de l’conomie de Chicago
Chicago a vcu une profonde transformation durant les annes 70. L’ordre industriel s’est termin avec la fermeture des abattoirs en 1971, en même temps que les aciries approchaient aussi de leur fin. S’en est suivie une ouverture sur l’international et le dveloppement d’une nouvelle conomie base sur les services spcialiss tels que la finance, l’immobilier, l’assurance, le marketing, la publicit et les services juridiques.
Le maire de Chicago, Richard M. Daley, a favoris la venue d’une classe socioprofessionnelle de crateurs dans la ville (design, arts, musique, etc.) en traitant cette classe comme un autre « groupe ethnique » qui avait besoin d’un espace privilgi pour s’exprimer.
Le dveloppement des grands ensembles durant les annes 1960 -1970
Durant les annes 1960-1970, Chicago connaît une transformation importante de son paysage. On assiste de grands dveloppements (Magnificent Mile, Sandburgh Village, Marina City, Lake Point Tower, Dearborn Park) qui se concentrent dans les quartiers où vivent les Blancs, dans le nord de la ville. Le Chicago Tribune dit de Dearborn Park qu’il est « une forteresse rserve aux Blancs et destine protger le quartier financier contre les Noirs ».
L’administration Daley doit lutter contre l’exode vers les banlieues et favorise alors la construction de gratte-ciels pour conserver les Blancs dans le centre-ville et percevoir davantage de taxes foncières. Deux Bourses d’change sont cres, le Chicago Board of Trade (CBOT) et le Chicago Mercantile Exchange (CME). La cration de ces deux nouvelles Bourses et des grands ensembles ne changent en rien la dynamique entre Blancs et Noirs.
La sgrgation raciale
Bien que Martin Luther King ait t une figure dominante dans la lutte pour les droits civiques des Noirs aux Etats-Unis, les auteurs mentionnent que les Noirs de Chicago n’ont pas attendu un grand leader pour promouvoir leurs droits et qu’ils avaient dj commenc se mobiliser des annes plus tôt.
Les ides de Martin Luther King quant l’intgration des Noirs ne plaisaient pas tous les Noirs, spcialement les politiciens noirs de Chicago qui bnficiaient d’un traitement favorable de la machine Daley en favorisant le statu quo.
Le Chicago du maire Richard M. Daley connaissait beaucoup de succès. Pour se maintenir au pouvoir, la machine Daley « tablait sur le maintien de communauts spares et concurrentes » (p.322-323). La sparation entre Blancs et Noirs tait entretenue et planifie. Il y avait et il y a toujours deux Chicago.
Une autoroute, la Dan Ryan Expressway a même t positionne de façon crer un mur artificiel entre le quartier de Daley, Bridgeport et celui de la Black Belt : « C’tait l’obstacle le plus massif que la ville pouvait construire, dfaut de construire un mur, pour sparer le South Side blanc de la Black Belt » (p.259).
Le fonctionnement de la machine Daley
On ne peut pas parler de Chicago sans souligner l’importance de la machine politique de la famille Daley : « Par leur contrôle autoritaire de la “machine”, Richard J. Daley et son fils Richard M. Daley, chacun dans son propre style, ont domin la scène politique de Chicago pendant quarante-trois ans, entre 1955 et 2011.
Pendant cette priode qui vit le dveloppement puis le dclin du mouvement moderne des droits civiques, la ghettoïsation d’normes pans du West Side et du South Side, une vague massive d’immigration en provenance d’Amrique latine et la mtamorphose de la ville de gant de l’industrie en centre de l’conomie mondiale de services, c’est tout juste si Chicago a connu une seule lection municipale lgitime ou un seul vrai dbat au conseil municipal » (p.16)
Il y avait une corruption rampante et des budgets clandestins au sein de l’administration Daley. La Mairie attribuait en toute opacit des quartiers favoriss des sommes d’argent rserves aux quartiers dfavoriss.
« […] Tandis que les gros hommes d’affaires, les hommes de la pègre et tous ceux ayant des liens avec la famille Daley s’enrichissaient, les Noirs et les Latinos dmunis taient abattus aux coins des rues ou torturs dans des arrière-salles de commissariat » (p.394)
Les cabinets d’avocats et les entrepreneurs versaient d’normes sommes d’argent en change de contrats importants. La machine Daley ne manquait jamais d’argent.
Les tensions raciales et les politiques muscles de rpression du maire Daley
« Dès les annes 1930, Chicago tait devenu, selon l’historien Frank Donner “la capitale nationale de la rpression policière” » (p.321)
La migration noire dans les annes 1940 et 1950 effraie la population de Chicago qui se sent assige, ce qui augmente des tensions raciales dj prsentes et entretenues. Il devient plus facile d’accepter davantage de policiers que de logements sociaux.
Les tactiques muscles du maire Daley sont le plus videntes lors de la Convention dmocrate de 1968, alors que les policiers et 7000 soldats de la Garde nationale tombèrent « bras raccourcis sur la foule [de 10,000 jeunes manifestants] dans une explosion de violence aveugle ». (p.315).
L’exploitation des peurs raciales connaissait beaucoup de succès Chicago. Daley dfendait ses politiques en disant que « la plupart des gens s’inquitaient bien plus d’une meute des Noirs que d’un maire qui ordonne l’usage de la force ltale pour y mettre un terme et qu’ils se reconnaissaient bien moins dans des manifestants pacifistes que dans les policiers qui les frappaient coups de matraque ». (p.319)
La propagande des mdias et la police de la machine Daley taient efficaces pour convaincre les Noirs de ne pas changer l’ordre tabli. La torture tait pratique courante au commissariat de la zone 2 dans le South Side, entre 1972 et 1991.
L’arrive prochaine du Noir Harold Washington la mairie, durant les annes » 80, attisa encore davantage les craintes que tout change dans la façon de faire Chicago. Tout tait organis pour miner la candidature de Washington, mais il finit malgr tout par l’emporter, grâce au vote noir.
Il y avait beaucoup de mouvements politiques de gauche qui avaient chacun leurs objectifs et qui n’ont pas su s’unir sous une même bannière progressiste. Cela a laiss la marge de manœuvre ncessaire la machine Daley. Cette dernière travaillait en coopration avec les autorits fdrales pour organiser la rpression d’Etat.
Problèmes sociaux dans les quartiers dfavoriss
La canicule de 1995 fit 739 victimes Chicago. La prcarit sociale favorisa une augmentation du nombre de dcès, mais il fut plus simple de dterminer que les victimes de la chaleur taient responsables de leur sort.
Les Noirs et les Latinos croyaient et croient toujours que leurs problèmes d’coles et de quartiers proviennent de dficiences culturelles. En tentant de saisir la nature relle de leurs problèmes, ils ngligent les aspects du racisme soutenu et les choix conomiques des diffrentes administrations depuis la cration de la ville.
« Le recensement de 1980 indiqua que dix des seize quartiers les plus pauvres des Etats-Unis se trouvaient Chicago, dans la Black Belt, bien entendu » (p.334)
En 2002, Chicago tait la capitale amricaine des meurtres avec 647 victimes. En 2008-2009, la ville dtenait le record de meurtres d’lèves d’coles publiques lis des gangs.
Il existe aujourd’hui deux Chicago
Chicago profite aujourd’hui de l’existence de quartiers ethniques bien dfinis qui attirent les touristes en quête d’exotisme. Cependant, les politiques de sgrgation raciale en place ont fait en sorte d’isoler les quartiers Noirs et en 2016 Chicago a toujours la triste rputation d’être la capitale des homicides aux Etats-Unis.
« La situation de Chicago ressemble de plus en plus un scnario de science-fiction. Alors qu’une partie de la ville possède une capacit conomique qui la classe parmi les cinq premières du monde, l’autre partie est fige dans une situation d’austrit qui pourrait bien devenir irrversible » (p.443)
« Passer par le Nord », d’Isabelle Autissier et Erik Orsenna, est un livre essentiel pour le lecteur qui dsire avoir un aperçu des profondes transformations occasionnes par le rchauffement plantaire sur les enjeux gopolitiques, conomiques et cologiques dans l’Arctique.
Le livre est en même temps une leçon de gographie, d’histoire, de politique, d’cologie et d’conomie. Il intressera coup sûr tous ceux qui s’intressent au trafic maritime et au dveloppement des nouvelles routes de navigation, de même qu’ la course vers l’appropriation et l’exploitation des immenses ressources gazières et ptrolières du Nord.
De façon conserver l’intrêt du lecteur, plusieurs cartes gographiques diverses chelles sont incluses dans le livre. Elles sont très utiles lorsque vient le temps de mieux comprendre l’histoire et les rôles passs et prsents des mers, îles et territoires tels que : mer de Kara, mer de Barents, mer des Laptev, îles Aloutiennes, îles de Nouvelle-Sibrie, Wrangel, archipel François-Joseph, Nouvelle-Zemble (l’île aux dchets), Terre du Nord, dtroit de Bring, Svalbard, Spitzberg, Oslo, Tromsö, Kirkenes, Mourmansk, etc.
Certains des fleuves de la Russie, qui sont parmi les plus longs au monde, sont galement prsents : l’Ob, l’Ienisseï, la Lena et la Kolyma.
Les chiffres sont loquents : pour aller de Rotterdam vers Yokohama, il faut naviguer 20,600 kilomètres si l’on passe par le Canal de Suez. Il n’en faut que 12,800 en passant par la route maritime nord-est le long de la Sibrie et 11,800 en passant par les pôles en l’absence de glaces durant l’t (cette nouvelle route pourrait s’ouvrir dès 2025). Les besoins en ressources de la Chine et de l’Inde, conjugus la fonte des glaces dans le Nord, sortent rapidement la Sibrie de son isolement.
Les personnages importants
Le lecteur sera certainement intress par les informations concernant les personnages qui ont jou un rôle significatif dans la dcouverte et l’exploitation des mers, îles et terres se trouvant de chaque côt de la route maritime du Nord. On y trouve par exemple le Viking Otar, Willem Barents, Simon Dejnev, Vitus Bering, Pierre Le Grand, Alexander Baranov, Ivan Veniaminov, Adolf Erik Nordenskjöld, Ada Blackjack, etc.
Le premier passage de l’Atlantique vers le Pacifique par le Nord revient un Sudois du nom d’Adolf Erik Nordenskjöld en 1879. Il faut attendre trente-six ans, soit en 1915, pour tmoigner du deuxième passage complet, cette fois-ci par des brise-glaces russes sous les ordres de Boris Vilkitski.
L’importance des brise-glaces
Les brise-glaces sont extrêmement importants pour la Russie, tant pour assurer sa souverainet reconnue et dfendre ses nouvelles prtentions territoriales que pour des raisons conomiques (maintenir ouvert le passage de la route maritime du Nord-Est contre rmunration et assurer une continuit dans l’exploitation des gisements gaziers et ptroliers le long de la côte sibrienne).
Les Etats-Unis doivent galement construire des brise-glaces, autant pour des raisons gopolitiques et conomiques que pour assurer la scurit des oprations des navires de croisière qui s’annoncent toujours plus nombreux et envisagent maintenant d’emprunter certains passages troits et risque dans l’Arctique.
Collaboration et obstacles en mer de Barents
Une collaboration vidente existe entre la Russie et la Norvège quant la pêche dans la mer de Barents et au sud du Svalbard, un secteur qui devient stratgique avec la migration de plusieurs espèces de poissons vers le nord cause du rchauffement plantaire. Les cosystèmes sont cependant menacs, le rchauffement tant trop rapide et les poissons n’ayant pas le temps de s’adapter.
Quels sont les obstacles que prsente la mer de Barents pour les ptroliers, les navires et les plateformes? Tout d’abord le brouillard qui dure des semaines, les « lows » qui dtruisent les embarcations et tordent les superstructures. Et enfin, les embruns verglaçants qui ajoutent un poids excessif et gèlent toutes les manivelles prsentes sur les embarcations et plateformes. En cas d’accident dû l’exploitation gazière et ptrolière, les conditions mtorologiques extrêmes prsenteront des dfis très importants.
Un mot sur la Sibrie
L’exploitation des richesses minières en Sibrie passe initialement, sous Lnine, par les camps de travail (goulag), car il n’y a vraiment pas de volontaires pour s’exiler dans cette rgion hostile. Les auteurs suggèrent la lecture du prochain livre de Eric Hoesli pour quiconque voudrait en apprendre davantage sur la Sibrie. Il a dj publi un livre très prim sur le Caucase en 2006 : À la conquête du Caucase.
Oslo : Tschudi et Aker Solutions
Les auteurs prsentent deux compagnies norvgiennes bases Oslo et dont les activits ont trait la logistique en mer : Tschudi et Aker Solutions.
Les gisements de gaz naturel de Chtokman et de Yuzhno-Tambeyskoye
Le lecteur apprciera certainement le chapitre sur les « eldorados glacs ». Il y est question des gisements de gaz naturel de Chtokman et de ceux du champ de Yuzhno Tambeyskoye (25% des rserves mondiales). Les dfis pour l’exploitation sont nombreux : des investissements de vingt milliards de dollars, une alliance ncessaire entre la Russie, la France (Total) et la Chine (CNCP), d’immenses infrastructures construire, la stabilisation des installations au moyen de milliers de pieux, une lutte constante contre la glace, la construction de trente mthaniers dont seize brise-glaces et l’obligation d’utiliser la voie maritime du Nord.
Le rchauffement plantaire
Il est beaucoup question dans le livre de l’effet accumul des activits militaires, industrielles et commerciales sur la vie animale et l’environnement. La fragilit du milieu arctique est très bien dmontre. Le lecteur sera surpris par l’tendue des dchets nuclaires autour de la rgion de la Nouvelle-Zemble.
Le rchauffement plantaire occasionne une migration des espèces vers le nord, une augmentation du nombre des navires de pêches dans l’Arctique et des tensions politiques entre les nations concernant la proprit de la zone se situant entre 12 et 200 milles des côtes. Les espèces natives se font progressivement chasser au profit des espèces invasives.
« La diminution des glaces polaires entraînera une augmentation de la frquentation arctique par des navires susceptibles d’engendrer des collisions et d’mettre toutes sortes de bruits qui drangent les animaux, les empêchent de se nourrir correctement, de communiquer entre eux ou avec leurs petits. Les essais sismiques ou les sonars basses frquences des pêcheurs et des militaires sont particulièrement dvastateurs » (p.203)
« À quelques exceptions près (Norvège, Japon, Islande), le moratoire concernant la chasse la baleine est respect. La prdation officielle par les Inuit et le braconnage russe sont limits. » (p.203)
Augmentation des phnomènes mtorologiques extrêmes.
« La diminution de la banquise agira sur les courants ocaniques, mais aussi sur l’atmosphère en ralentissant la circulation des jets de haute altitude. Ce phnomène se traduira par une augmentation des vnements [mtorologiques] exceptionnels (vagues de froid ou de chaleur, scheresses ou inondations) nos latitudes moyennes. » (p.219)
Temps de raction face un dsastre cologique dans l’Arctique
Le Bureau of Ocean Energy Management(USA) « envisage que 61 000 barils [de ptrole] se dverseraient chaque jour dans la mer si un puits explosait. La compagnie Shell indique qu’elle mettrait trente-huit jours forer un puits de secours alors qu’il lui en a fallu quatre-vingt-cinq dans le golfe du Mexique, infiniment plus accessible et moins dangereux. En admettant qu’elle montre la même clrit que pour Deepwater Horizon, ce qui serait dj un exploit, plus de 800 000 tonnes de ptrole se rpandraient dans l’Arctique.
Plus vraisemblablement, les conditions d’intervention au milieu des glaces, du brouillard, des tempêtes rendraient le travail irralisable au cours d’un seul t. La nuit polaire venant, il faudrait se rsoudre laisser le puits fuir tout l’hiver, voire plusieurs annes de suite. » (p.229)
Le mthane
« Le mthane a un pouvoir en termes d’effet de serre vingt-trois fois suprieur celui du CO2, que l’on prsente dj comme notre pire ennemi. » (p.216)
« En mer des Laptev, de vritables fontaines de plusieurs centaines de mètres de diamètre crachent le mthane. On voit bouillir la mer comme dans de gigantesques chaudrons. 80% des eaux de surface et 50% des eaux profondes prsentent des concentrations de mthane allant de 8 … 1 400 fois la moyenne ocanique! » (p.216)
Braconnage des dfenses de mammouths
Le livre contient un court passage sur le braconnage des dfenses de mammouths enfouies dans le sol sur Grande île Liakhov. L’opration est finance par des maffieux. Les dfenses sont sculptes et revendues chèrement des collectionneurs chinois.
Le rchauffement climatique, et le dgel gnralis qu’il provoque en Sibrie, protgerait ainsi indirectement l’lphant d’Afrique en rendant disponibles les dfenses de mammouths. La nouvelle et immense rserve d’ivoire en Sibrie fait augmenter l’offre et fait baisser les prix, rendant les dfenses de l’lphant d’Afrique soudainement moins intressantes financièrement.
Quelques noms retenir
On trouve un des ports principaux de la nouvelle route maritime du Nord dans la ville de Kirkenes en Norvège. Sa position gographique est idale et son plan d’eau est protg des tempêtes. La ville favorise le dveloppement du port. L’efficacit des employs norvgiens est reconnue et on y a l’habitude de traiter avec les Russes, voisins immdiats.
Mourmansk, en Russie, est galement appele un avenir prometteur du fait du rchauffement climatique. On y exploite dj des dizaines de mines, dont plusieurs contiennent des terres rares qui sont obligatoires pour le fonctionnement des technologies modernes.
Dans l’Arctique, la disparition de la banquise d’t est prvue entre 2020 et 2030. Le passage du Nord-Est pourrait être accessible au-del des 200 milles de la ZEE, ce qui favorisera l’Islande « qui pourrait devenir un hub de rpartition entre l’Amrique et l’Europe. » (p.218). « Et il se dit dans les couloirs que des investisseurs de Pkin offriraient 5 milliards de dollars pour prendre le contrôle du futur port de Reykjavik, celui qui se veut le hub du Nord. » (p.245)
Conseil de l’Arctique
L’Arctique est depuis longtemps un endroit stratgique où de nombreux pays, dont quelques grandes puissances, revendiquent une part importante du territoire et des ressources qui s’y trouvent. Avec la fonte acclre des glaces, les choses se compliquent encore davantage.
En 1996 le Conseil de l’Arctique a t cr pour faciliter les communications et rduire les tensions politiques entre les pays ayant des prtentions sur le territoire et les ressources. On y trouve le Canada, le Danemark, les Etats-Unis, la Finlande, l’Islande, la Norvège, la Suède et la Russie. Des associations de populations autochtones font galement partie du groupe, mais en tant que « participants permanents ».
Militarisation du Nord
La guerre froide entre la Russie et les Etats-Unis a provoqu la construction par les Amricains et Canadiens de la ligne DEW, ligne qui a ventuellement t remplace par le North Warning System.
Aujourd’hui, la militarisation de la rgion se poursuit : « La Russie multiplie les signaux et les actes de militarisation dans la zone. Manœuvres militaires (parachutages, patrouilles ariennes), reconstruction des installations dans toutes les îles (Wrangel, Nouvelle-Sibrie, Nouvelle-Zemble, archipel François-joseph …), commande de nombreux bateaux dont des sous-marins de nouvelle gnration (sous-marins d’attaque et lanceurs d’engins), grand programme de modernisation des missiles Boulava … La base sous-marine [de la Flotte du Nord russe], près de Mourmansk (Severomorsk), semble en cours de rhabilitation complète » (p.238)
La route maritime passant par le pôle Nord
La route maritime du passage du Nord-Est qui longe la côte sibrienne sera favorise tant que les glaces n’auront pas fondu aux pôles (prvu pour 2025 au lieu de 2060 initialement prvu). Donc, dès 2025, une nouvelle route maritime passant directement par le pôle Nord s’offrira aux armateurs. À ce moment, ils pourront dcider s’ils vitent la côte sibrienne et le fardeau administratif impos en s’pargnant au passage mille kilomètres supplmentaires pour un trajet entre Rotterdam et Yokohama.