Le roman « Que notre joie demeure » de Kevin Lambert a suscit de la grogne au moment de sa parution. Alors qu’il rdigeait son bouquin, l’auteur aurait consult des personnes pour s’assurer qu’elles ne se sentiraient pas blesses par les propos du livre. Certains y ont vu un dsir d’être politiquement correct envers les divers groupes d’intrêt reprsents dans l’histoire.
Une fois la crise passe et les critiques adresses, je dois souligner l’excellence de la trame et l’habilet avec laquelle l’crivain nous transporte dans les salons de la grande bourgeoisie. Le roman a d’ailleurs obtenu le prix Mdicis 2023.
À travers les fenêtres ouvertes d’une luxueuse proprit de Montral, nous pntrons en courant d’air dans l’univers des gens aiss et devenons tmoins des attitudes, conversations et intrigues ayant cours tout au long de cette soire mondaine où une architecte de renom tient le rôle principal.
Nous participons la vie et l’histoire de cette femme clèbre qui planifie la construction d’un immense bâtiment dans un secteur moins nanti de Montral. D’où vient-elle et comment a-t-elle acquis ses lettres de noblesse ? Comment une personne du sexe fminin est-elle considre dans le milieu architectural et quelles embûches doit-elle encore affronter pour prserver sa rputation dans un environnement où le genre masculin prdomine largement ?
Le rcit se veut une prsentation habile des contraintes auxquelles doivent faire face les crateurs au Qubec et spcialement Montral lorsqu’il s’agit d’architecture. La nouvelle construction empiètera sur des espaces adopts de longue date par les moins nantis. Quel rôle joue l’information et comment les groupes de pression s’organisent-ils pour tenter de contrecarrer le projet en cours ? Quels sont les excès auxquels on doit s’attendre?
Le personnage principal traverse une tempête mdiatique un moment de sa vie où elle s’approche d’une retraite bien mrite. Comment considère t’elle sa contribution et de quelle façon s’ajuste-t-elle, si elle s’ajuste ?
L’auteur conserve notre intrêt du dbut la fin et adopte un style littraire favorisant l’immersion. Il utilise galement le genre fminin lorsque possible.
Bonne lecture !
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J’ai longtemps hsit me procurer ce roman graphique qui ne se trouvait que dans une des sept librairies que je côtoie rgulièrement. À l’heure où les couvertures sont souvent tapageuses et où les thèmes abords accrochent l’attention du potentiel client, je me retrouvais face ce livre tranquille prtendant nous parler des sept vies d’un parfait inconnu. Que faire ?
En fin de compte, je me suis dcid l’acqurir et je l’ai trouv tellement intressant que je l’ai lu d’une traite. Une très belle surprise, quoique j’aurais dû me douter que la qualit serait au rendez-vous en voyant le nom de l’auteur, Charles Masson. J’avais auparavant lu un autre roman graphique très intressant de cet auteur. Le bouquin s’intitulait « Droit du sol » et portait sur les difficults vcues par les autochtones qui doivent composer avec le colonialisme.
« Sept vies vivre » raconte de façon très intelligente et humaine la vie d’un homme ordinaire nomm Ren. Oubliez les ordinateurs et les rseaux sociaux. Le lecteur retrouve Ren et sa famille il y a plusieurs dcennies dans le massif des Bauges alors qu’il y passe son enfance et adolescence dans l’absence de confort et de luxe. Les habitants triment dur pour survivre dans ce coin de pays.
Ren a perdu sept frères et sœurs alors qu’ils taient en bas âge et il est bien dtermin vivre pleinement. Il descend dans la valle pour changer son existence. Les sept vies de Ren, ce sont les sept grands moments qui viennent modifier le destin de cet homme. Comme beaucoup d’entre nous, les vnements le bousculent. Dans son cas, ce sont la Seconde Guerre mondiale, l’entraînement militaire obligatoire de 1946 en France, les rencontres fortuites, et j’en passe. Comment s’adapter et conserver son humanit travers les surprises que rserve l’existence ?
Le scnario est solide et le graphisme intressant. Il n’y a pas de temps mort, ce qui est tout de même souligner pour un rcit de 225 pages. Une belle trouvaille rajouter dans votre bibliothèque.
Pour payer ses dettes d’tudes rapidement, Kate Beaton, une jeune rsidente de la Nouvelle-Ecosse, dcide en 2005 d’aller travailler dans le nord de l’Alberta pour les compagnies ptrolières exploitant les sables bitumineux. À l’poque, ce voyage vers l’ouest avait la cote auprès des Canadiens cherchant un emploi lucratif. Elle quitte donc les paysages paradisiaques du Cap-Breton pour plonger dans l’univers de Syncrude et ShellFort McMurray.
Elle ralise alors ce que constitue la vie sur des chantiers occups en majorit par des hommes loin de leur famille, dont plusieurs dmontrent des problèmes de comportement. Peu importe l’endroit où elle se trouve, elle subit du harcèlement sous forme de remarques dsobligeantes, d’insultes, et ventuellement le personnel en vient des agressions sexuelles.
Pour ces travailleuses, la solitude et la survie prennent une tout autre signification que pour le reste des employs masculins de ces postes isols.
Etant pourvue de multiples talents, dont ceux de raconteuse et dessinatrice, Kate Beaton publie en 2023 un roman graphique dcrivant ce qu’elle a vcu. Elle dnonce « un système prouvant et complexe, qui exploite aussi froidement les ressources naturelles que les êtres humains ».
« Environnement toxique » porte moins sur la destruction d’un habitat cause par l’exploitation des sables bitumineux que sur le milieu de travail toxique que doivent endurer le peu de femmes œuvrant sur ces chantiers.
Le Time Magazine, The Guardian et The New Yorker ont salu ce roman graphique gagnant du concours Canada Reads 2023. Il est paru en anglais sous le titre « Ducks », probablement pour rappeler tous ces canards englus dans le ptrole qui avaient fait la manchette l’poque.
Avec tout ce qui se publie aujourd’hui dans une anne, on doit forcment prendre des risques ici et l. Au Salon du livre de Qubec 2023, j’ai tent ma chance avec deux ou trois bouquins dont je n’avais pas entendu parler. Celui qui m’a surpris le plus tait un petit roman du nom de Von Westmount.
Le design de la couverture attirait l’attention. En voyant la maison cossue et le terme Westmount, je me doutais bien qu’un dtour dans l’ouest de Montral s’imposerait. Pour les personnes n’habitant pas le Qubec, on connaît Westmount en tant qu’un secteur plus ais financièrement et où la majorit des habitants utilisent la langue anglaise comme moyen de communication, dans un Qubec majoritairement francophone.
Pendant l’anne où l’on suit Aline, l’hroïne de Jules Clara, elle abat pniblement des petits boulots et mène sa vie tant bien que mal jusqu’ ce que le hasard lui permette de tenter sa chance avec un nouvel emploi.
Elle se retrouve ventuellement dans le milieu anglophone de l’ouest de Montral et, travers elle, nous tmoignons du mode de vie et des conversations se droulant dans une rsidence prive de la ville de Westmount. Est-ce que l’hroïne une fois installe dans cette rsidence cossue saura s’adapter rapidement ses nouvelles fonctions et faire les choix conformes ses intrêts et ses valeurs? Comment voluera sa vision de Montral au sens propre et figur?
J’ai ador ce petit livre jusqu’ la fin. Il convient de noter que certaines personnes ont eu de la difficult comprendre la conclusion, une conclusion qui me semblait certainement un choix logique inclure dans une histoire de ce genre.
Des gens ont aussi contest l’utilisation de la langue anglaise pour quelques sections du roman. En ce qui me concerne, je crois que cette langue avait tout fait sa place et jouait un rôle important dans le droulement du rcit. Mais il faut bien connaître l’anglais et non en balbutier quelques mots.
Bref, vous passerez un très bon moment avec Von Westmount si vous apprciez un livre bilingue et que vous vous intressez la dynamique spciale entre l’ouest et l’est de Montral.
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À l’avant-plan, des femmes discutent et un homme porte toute son attention sur son tlphone portable pendant que derrière eux, le prêcheur et ses ouailles tentent, travers leur discours religieux, de ramener tout ce beau monde dans le droit chemin : deux mondes se côtoient dans ce parc de Boston. Si « le message, c’est le mdium », comme le disait Marshall Mc Luhan, il faudrait possiblement revoir la mthode de communication, car le mdium n’a pas l’air de très bien fonctionner!
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En fouillant gauche et droite dans les diffrentes librairies de Qubec, je fais souvent de très belles dcouvertes, comme ce livre de Robert Seethaler, publi initialement en allemand sous le titre de ,,Ein ganzes Leben’’ et qui en français se traduit par « Une vie entière ».
C’est un petit livre de seulement 145 pages mais dont l’criture tellement limpide a le pouvoir de propulser immdiatement le lecteur au dbut des annes 1900, au beau milieu des montagnes autrichiennes. C’est la priode où commence la construction des premiers tlphriques qui vont changer toute la dynamique de la socit en permettant graduellement aux touristes de plus en plus nombreux d’occuper un territoire autrefois très peu achaland.
L’auteur raconte la vie d’Andreas Egger, un homme simple et attachant dont la force de caractère lui permet de traverser n’importe quelle preuve. Il ne se distingue pas par son intelligence, qui est somme toute assez ordinaire, mais plutôt par sa capacit de survie et son dsir de toujours aller de l’avant. C’est un être que l’on aime et qui l’on ne souhaite que du bien.
Voici ce que dit l’diteur au sujet de Robert Seethaler : « Une vie entière,lu livre de l’anne (2014) par les libraires d’outre-Rhin, confirme ainsi la profondeur de son talent d’crivain, capable de mener avec une grande simplicit son lecteur au plus près de ses motions ».
En cette priode de pandmie, il s’agit d’une lecture très rafraîchissante pour tous!
Même si la Seconde Guerre mondiale est termine et que l’armistice est sign en 1945, quatre Japonais continuent de se cacher sur l’île de Lubang, dans les Philippines, attendant l’ordre officiel de leur suprieur de rendre les armes. Ils ont t oublis l, dans la jungle, et continuent de survivre du mieux qu’ils le peuvent en vitant les patrouilles parties leur recherche pour leur dire que la guerre est termine. Ils continuent d’accumuler des informations sur l’île pour les services de renseignements en esprant être utiles au moment où aura lieu un ventuel dbarquement japonais qui chassera les Amricains de l’île. Les annes passent et il ne restera plus qu’un seul soldat japonais, Hiro Onada, qui rendra finalement les armes en 1974, trente ans plus tard!
Le livre est une leçon de survie en milieu hostile. La discipline et la dbrouillardise qui sont requises pour subsister et assurer leur scurit sont extrêmement impressionnantes. Onada, même s’il s’est enfonc progressivement dans une ralit alternative, fait preuve d’une tnacit absolument remarquable.
Voici un passage qui montre la ralit de la jungle : « […] Il y a galement beaucoup d’abeilles sur l’île. D’immenses essaims volent dans les zones broussailleuses au pied des montagnes. J’en ai vu qui faisaient trente mètres de large et cent de long, volant ici et l avec des changements de direction imprvisibles. Si nous rencontrions l’un de ces essaims, la seule chose faire tait de retourner dans les bois ou bien, si nous n’en avions pas le temps, de nous couvrir la tête avec la toile de notre tente ou nos vêtements et de nous allonger par terre. Si nous faisions le moindre mouvement, elles passeraient l’attaque. Nous devions respirer le plus doucement possible, jusqu’ ce que l’essaim soit pass. » (p.216)
En 1957, des bombardements dans le voisinage les rassurent que la guerre continue. Mais ce sont des exercices militaires de l’arme de l’air philippine, et non une attaque amricaine.
Onada et QAnon
Au fur et mesure que les annes passent, d’innombrables occasions seront offertes aux soldats pour raliser que la guerre est termine. Ils auront même ventuellement accès une radio. Peu importe : tout ce qui sera lu, entendu ou dcouvert par hasard ne sera, selon eux, que le fruit d’une dsinformation provenant de l’ennemi.
À la lecture de cette histoire vcue, il est possible de faire un rapprochement entre le tmoignage d’Onada, le guerrier japonais isol dans sa jungle, et un adepte de QAnon : les deux ne peuvent accepter une dfaite et croient en une mission presque divine. Comme le dit si bien Onada lui-même : « À cette poque, Kozuka et moi avions dvelopp tellement d’ides fixes que nous tions incapables de comprendre tout ce qui en diffrait. Si quelque chose ne correspondait pas notre vision des choses, nous l’interprtions de façon lui donner la signification que nous voulions » (p.192).
Lorsqu’une personne est progressivement amene croire une ralit alternative et qu’elle dcide de s’y accrocher pour sa sant mentale ou physique, ou les deux, une même conclusion demeure : peu importe les preuves, les discours, les nouvelles ralits qui seront prsentes, cette personne continuera persister dans sa ligne de pense. Il faudra qu’un vnement dramatique se produise dans sa vie pour qu’elle dcide peut-être de changer de voie et de revenir la ralit objective.
Il y en a pour tous les goûts dans le Microfictions de 2007. Les nouvelles ne sont pas exactement pour les âmes sensibles et les lecteurs qui perçoivent tout au premier degr. Quand Rgis Jauffret traite du comportement humain, il tire dans toutes les directions : souffrances de la vie, relations humaines, manque d’empathie, problèmes sexuels, vie de la famille, obsit, suicide, mdiocrit intellectuelle, avortement, solitude et vieillissement, stress, stupidit, maladies mentales, socit et politique, bourgeoisie, entrepreneuriat. Le sociopathe, le bourgeois, le fraudeur et bien d’autres vivent leur heure de gloire dans le bouquin.
Plusieurs nouvelles amusent le lecteur par les tournures de phrases et l’humour noir utiliss. D’autres surprennent par l’intensit des propos et une pause peut être ncessaire avant de continuer la lecture. Il y a des nouvelles qui frappent comme un marteau. Si vous êtes habitus la censure et la mesure dans tout ce que vous lisez, vous serez certainement secou par Microfictions!
Comme l’aurait peut-être dit Rgis Jauffret : « Si vous trouvez les nouvelles trop noires, arrêtez-vous avant d’avoir envie de vous dfenestrer! »
Voici quelques citations pour vous mettre l’eau la bouche :
« Les terroristes ne plaignent pas leurs victimes avec la sensiblerie d’une amie des bêtes qui vient d’craser une poule » (p.49).
« Personne dans l’arogare, part une femme endormie sur un chariot qui semblait être une grande bourgeoise tombe de haut » (p.163).
« Je me suis tout de suite senti l’aise dans cet endroit prestigieux où l’intelligence faisait bon mnage avec la rpression » (p.393).
« L’un d’entre eux s’est tu l’t dernier dans un accident de la route. Je n’ai pas regrett d’être toujours en vie pour pouvoir profiter d’une nouvelle aussi rjouissante » (p.462).
« Avec ma mère, nous nous passerions très bien de l’humanit. Elle me nourrirait des lgumes du potager, et afin de nous divertir tous les deux je la poursuivrais dans la campagne avec une pioche » (p.622).
« Le mois prochain, j’accueillerai mes quarante ans comme une tante loigne qui on offre une tasse de th avant de la foutre dehors » (p.647).
« Nous serions honnêtes si nous en avions les moyens. Au lieu de voler, nous frauderions comme les riches qui font magouiller leur feuille d’impôt par un avocat » (p. 671).
« […] et je me demande de temps en temps si je ne ferais pas mieux de devenir dans une autre vie un de ces fils papa qui passent l’t sur un yacht et le reste de l’anne dans un pensionnat suisse où les profs les servent avec l’obsquiosit des esclaves qui craignent d’être vendus des terroristes pour leur servir d’otages » (p.697).
« Elle s’est mise pleurer petites gouttes, on aurait dit une bruine de larmes » (p.826).
« Je lui ai donn une petite tape dans le dos, et je suis parti en claquant bruyamment des dents pour ne pas l’entendre sangloter » (p.842).
« Une grande dmocratie ne peut s’empêcher d’inspirer la terreur ses citoyens, et chaque lection nous prouve quel point ils rclament davantage de svrit, de rpression, et d’arbitraire s’il le faut, pour qu’ils puissent continuer vivre dans un pays pacifique où l’ordre règne comme dans une maison bien tenue » (p.939)
« Personne ne m’avait jamais sodomis. Il est vrai que je perds un peu la mmoire, mais il me semble que je m’en souviendrais » (p.981)
Ce roman Microfictions 2018 de Rgis Jauffret rassemble des centaines de nouvelles faisant toutes environ une page et demie, pour un total de 1024 pages.
Microfictions 2018 a gagn le Goncourt 2018 de la nouvelle.
J’ai achet le livre sur recommandation de la revue « Le Libraire ». Je ne m’attendais cependant pas trouver des nouvelles de ce genre. J’ai persist dans la lecture pour dcouvrir progressivement un auteur hors-normes. Les tournures de phrases, la capacit de synthèse et le vocabulaire mritent vraiment une lecture attentive. Les propos peuvent cependant être drangeants pour certaines personnes.
Les nouvelles sont souvent percutantes et portent entre autres sur : la dtresse, le suicide, la violence conjugale, la maltraitance, les problèmes sexuels, le harcèlement, le vieillissement, la maladie mentale, les carts de richesse, la folie, l’exclusion sociale, etc.
Rgis Jauffret a choisi d’y inclure une bonne dose d’humour noir, et même très noir parfois, pour quilibrer le propos et parfois passer un message.
J’ai choisi quelques citations, travers les 1000 pages de
texte, pour donner une ide du style de l’auteur :
« La
rceptionniste m’a tendu la cl avec tellement de haine dans le regard qu’il me
semblait la voir suinter au coin des yeux ». P.53
« Je n’en pouvais dj plus de cette soire dont nous
tions en train de grimper les premiers kilomètres ». p.58
« À notre poque flaccide, un cadeau doit rveiller son
bnficiaire comme une racle ». P.75
« Je n’aimais pas assez les enfants pour rater mon
existence cause d’eux ». P.101
« Ma mère n’est pas morte, mais elle a le regard vague
depuis son attaque et chaque fois que je la vois je ne peux m’empêcher de
fixer longuement ses mollets en me demandant lequel de ses pieds a dj disparu
dans la tombe ». P.133
« Il m’est arriv de me demander si je me jetterais un
jour corps perdu dans l’existence ». P.180
« Fonder une famille reviendrait jeter mes gamètes
dans un utrus comme une paire de ds dans un cornet. Je prfère thsauriser
plutôt que de risquer un mauvais placement ». P.180
« […] des militaires traînant des pieds pour mener une
guerre mtaphysique contre l’arme d’anges dchus que Lucifer jette sur les
vierges afin de capturer leurs hymens dont il nourrit ses enfants qui rissolent
de jour comme de nuit sur leur lit chauff blanc dans la maison flambante où
il vit en bourgeois dans la haine du Christ ». P.185
« Nous l’avions envoy en colonie de vacances. Par
prudence nous avions choisi un organisme laïc. Il n’en avait pas moins t
abus par un moniteur et il nous tait revenu libidineux comme une chatte en
chaleur, se dandinant, se frottant aux meubles, s’enroulant autour des jambes
des invits en minaudant ». P.197
« Les filles ont accept d’appeler maman la mère de substitution dont je me suis amourach pour tirer
avec moi la charrette du quotidien ». P.208
« À huit ans il sait dj compter jusqu’ l’infini. Je
dois l’obliger reprendre son souffle sinon il s’touffera en essayant
d’atteindre en apne le dernier des nombres ». P.213
« Non, je ne critique pas nos enfants. Ils sont polis,
polyglottes, ouverts aux nouvelles technologies. Nous les avons si bien levs
qu’ils sont ennuyeux comme des caniches de concours ». P.238
« Il ne me pardonnera jamais de l’avoir surpris emboît
dans un jeune homme ». P.253
« La transplantation sera ralise par un robot assez intelligent
pour se contenter d’un dficient mental en fait de chef de service ». P.283
« Il a su autrefois lire et crire son nom, mais par
paresse il prfère prsent laisser son empreinte ADN en crachant sur les
documents administratifs plutôt que de les signer ». P.345
« J’ai plus honte de toi encore que de mes hmorroïdes.
Du reste avec ton mari et tes gosses vous leur ressemblez comme deux gouttes
d’eau. La diffrence c’est que vous n’êtes pas oprables et qu’on ne peut pas
davantage adopter un trou-du-cul que l’abandonner au bord d’une autoroute comme
un chien dont on ne veut pas s’encombrer pendant les vacances. Je regretterai
toujours de ne pas t’avoir porte dès ta naissance aux enfants trouvs. Tu
aurais fait le malheur d’une autre pendant que j’aurais lev Laurent avec
autant de fiert que Marie a torch Jsus. » p.364
« Elle est rapparue scintillante de haine » p.439
« Le ciel rose pommel de nuages ressemblait une
photo de maladie de peau. » p.451
« Nos filles sont maintenant adultes, intelligentes,
resplendissantes, exasprantes de perfection ». p. 453
« Elle avait des parents catholiques aux yeux noirs et
durs comme les clous de la croix du Christ ». P.455
« Même si vous avez tous les deux plus de quatre-vingts
ans, ce n’est pas une raison pour refuser d’voluer ». p.471
« Un garçon aussi terne que notre Carole avec son intelligence basique sans aucun accessoire ni enjoliveur ni option d’aucune sorte. Ils auraient form un couple insipide qui aurait mis au monde des êtres appartenant comme eux la grosse cavalerie de l’humanit. » P.482
« Celui qui survivra l’autre dcdera en essayant
d’attraper la main tiède de l’infirmière affame qui se drobera pour aller
terminer sa barquette de hachis Parmentier la cantine » p.487
« […] cet endroit où j’ai effectu mon enfance avec autant de joie qu’une peine de prison. » p.515
« Quand vous êtes n dans un sale tat, si vous voulez jouer les Romo vous avez intrêt être un gnie du piano ou un cerveau assez hypertrophi pour dcouvrir chaque matin un nouveau cousin au boson de Higgs ». P.524
« Son corps dcapit tait rest devant le comptoir des
hors-d’œuvre ». p.560
« Elle se ressemblait, même si son visage froiss
aurait mrit un coup de fer. » p.576
« La terre est
un lieu de passage, une rue, un boulevard, une place publique dont on a depuis
longtemps arrach les bancs et lubrifi le bitume afin d’assurer aux humains
une meilleure glisse vers le crmatorium ». P.591
« Je portais un appareil d’orthodontie pos l’œil par
une organisation de dentistes chrtiens qui donnait mon sourire des airs de
clôture lectrifie ». P.609
« La solitude fait un bruit de frigo qui se dclenche rgulièrement toutes les vingt minutes […] » P.655
« N de parents
communistes assez cruels pour aller chaque anne en pèlerinage sur les lieux
des anciens goulags, assez cons pour se suicider en 2007 le jour anniversaire
de la mort de Staline […] » P.671
« Je suis entre dans la police par goût de la rpression » P.683
« Ta voix tait indcrottable. Un larynx aussi encombr qu’un intestin grêle dont aucun phoniatre ne viendrait jamais bout. Nous qui esprions faire de toi un artiste lyrique pour dissimuler ta mdiocrit intellectuelle derrière les contre-ut et les trilles ». P.715
« À dix-sept ans notre aîn a rvolutionn le monde des
mathmatiques en inventant un onzième chiffre […] » p.722
« Je vais
entamer bientôt des pourparlers avec mon dcès. Il a beau faire preuve de la
plus grande discrtion, comme tout le monde il est avide d’exister. » P.832
« Encore sa manie vgtarienne de servir de la laitue
fatigue mêle de tomates molles, d’œufs durs au goût de vomi avec une
guirlande lumineuse qui clignote au fond du plat pour donner un air de fête
ce fatras ». P.840
« J’ai suivi l’enterrement de mon père la fosse
commune avec les gens du village sous l’objectif d’une chaîne de tlvision
locale l’quipe nonchalante qui semblait accompagner le cortège par
dsœuvrement. » P.850
« La gomtrie ne peut pas servir continuellement
d’excuse un enseignant pour humilier un être humain ». p.893
« On peut avoir une opinion diffrente sans organiser une fatwacontre les lèves qui comme moi se rebellent contre sa conception fondamentaliste des maths ». P.893
« Elle a intgr dès la semaine suivante un pensionnat clos de murs dans le Vercors pour mditer sur les vertus de l’abngation dont ont fait preuve son arrière-grand-père et bien d’autres antismites chrtiens au nom de la haine du Boche en s’engageant dans la rsistance au mpris de leurs convictions raciales ». P. 901
« Les habitants d’un endroit pareil ne valent pas plus
cher que son climat. Dans le coin aucune famille sans son meurtrier, son
voleur, son auteur de crime sexuel dont chaque rveillon un pervers oncle
saoul raconte avec envie la carrière » p.959
« Elle allait rater sa licence, un diplôme certes
mdiocre, mais qui lui manquerait le jour où elle serait en panne de papier de
toilette ». P.965
« Quand je suis enfin couch je me dis que j’aurais mieux fait de naître sous forme de foule pour n’être pas seul supporter ma vie navrante ». P976
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Frdric Lenoir est un homme aux multiples facettes : philosophe, sociologue, chercheur, il est l’auteur de nombreux ouvrages qui ont t traduits dans une vingtaine de langues. Ci-dessous se trouvent quelques passages de son livre « La puissance de la joie ». Ces citations visent vous donner une ide de l’tendue des sujets couverts dans ce livre pratique qui mrite d’être relu plusieurs reprises.
« Le bonheur, c’est de continuer dsirer ce qu’on possède dj ». (Formule attribue St-Augustin). p.24
« Ce qui fait la valeur d’une vie n’est pas la quantit de choses que nous y avons accomplies, mais la qualit de prsence qu’on aura place dans chacune de nos actions ». p. 60-61
« La joie […] est le fruit d’un amour altruiste qui consiste se rjouir du bonheur de l’autre. » p.71
« La comparaison et la jalousie secrètent du malheur, alors que de se rjouir des qualits et de la russite d’autrui est source de joie. » p. 72
« La vie est un change permanent. Nous recevons, apprenons donner. » p.78
« La sagesse stoïcienne nous invite ne pas lutter vainement contre les vnements de la vie qui ne dpendent pas de nous. Le lâcher-prise, dans ce sens, n’est pas du fatalisme, mais une prise de distance, une forme de dtachement. Il est l’acceptation de la vie. » p. 82
« Il est capital de prendre soin de son corps, de tout faire pour le maintenir en bonne sant par une nutrition saine et quilibre, un bon sommeil, de l’exercice physique. » p. 91
« Il est stupide et vain de vouloir être aim par tout le monde. Cela est valable aussi dans toutes les situations professionnelles. » p.106
« La plus grande servitude, celle qui nous plonge dans la plus grande peine, c’est la servitude l’gard de nos propres passions. Rien n’est plus important que d’accomplir ce patient travail sur nous-mêmes : nous affranchir de nos tyrans intrieurs, non seulement pour parvenir la joie mais aussi pour amliorer le monde. » p. 108
« Un être humain qui est parvenu surmonter ses passions, les transformer en joies actives, ne peut plus nuire autrui. Il a vaincu en lui l’goïsme, la jalousie, l’envie, le besoin de dominer, la peur de perdre, le manque d’estime de soi ou une trop grande estime de soi, bref tout ce qui cre des conflits entre les individus et les guerres entre les peuples » p. 117
« J’ai une toute autre vision de l’amour. Je le vois comme une relation ouverte et saine, où l’on est heureux que l’autre ait un jardin secret, où il peut dambuler sa guise, avoir des amis, des relations qui lui sont propres sans que nous vivions pour autant dans une inscurit permanente. » p.133
« Ce n’est pas en refusant les souffrances de la vie qu’on trouvera le bonheur, mais en les acceptant lorsqu’elles sont invitables et en comprenant que nous pouvons aussi grandir travers elles ». p. 182-183
« La question primordiale n’est pas de savoir si nous sommes contents de nous-mêmes, mais si nous sommes contents de quoi que ce soit » (Nietzsche) p.185