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Histoires vécues comme spécialiste en information de vol (FSS): Inukjuak FSS

Des raisins et des bleuets à Inukjuak

(Histoire prcdente : Le cockpit d’un Boeing 747 de KLM lors d’un vol de nuit au-dessus de l’Atlantique)

Durant les mois où il y avait un cuisinier sur place pour prparer les repas Inukjuak, nous avions la vie facile puisque tout tait prêt lorsque l’heure des repas arrivait. Il reste que les desserts auraient bnfici d’un peu de varit. Ces derniers taient base de raisins ou de bleuets, semaines après semaines, mois après mois.

Muffins aux carottes et raisins
Muffins aux carottes et raisins
Muffins aux bleuets et citrons
Muffins aux bleuets et citrons

Ainsi, nous avions le choix entre des gâteaux aux raisins, des tartes aux raisins, des poudings aux raisins, des muffins aux raisins et des biscuits aux raisins. Quand il n’y avait plus aucune possibilit d’ingrer des raisins supplmentaires, c’tait le tour des bleuets : les gâteaux aux bleuets, les tartes aux bleuets, les poudings aux bleuets, les muffins aux bleuets. Cependant, pour varier un peu, il n’y avait pas de biscuits aux bleuets. J’ai t longtemps sans pouvoir manger des raisins ou des bleuets suite ces mois intensifs de consommation des mêmes ingrdients.

Le cuisinier n’tant pas particulièrement patient, il me vint l’ide de le faire rigoler un peu en le faisant participer une attrape dont serait victime un nouveau spcialiste en information de vol (FSS) de Transports Canada arriv Inukjuak au dbut de l’après-midi. Ce dernier n’avait pris encore aucun repas la cuisine du staff house. Je savais que le repas du soir tait servi 17 h et qu’il fallait toujours s’organiser pour être l’heure. J’annonçai donc au cuisinier que j’arriverais cinq minutes en retard avec le nouvel employ. Le cuisinier pourrait ainsi entrer dans une terrible colère, simule mais convaincante.

L’heure du souper arriva, je savais qu’il tait 17 h mais l’entraînement du nouveau FSS se prolongea volontairement de cinq minutes. Puis, feignant la surprise, nous lui avons annonc qu’il fallait se diriger au plus tôt vers le staff house, car le cuisinier tait probablement rouge de colère. Dans le corridor menant la cuisine, nous entendions dj les chaudrons lancs sur le comptoir et le cuisinier crier que les nouveaux employs se prenaient pour des rois et manquaient de respect au personnel charg de les nourrir.

Le nouveau me signala qu’il n’avait plus vraiment faim. Visiblement, il ne tenait pas affronter la colère du cuisinier. La situation empira encore lorsque je l’incitai malgr tout se diriger vers la cuisine pour qu’il tente de s’expliquer. En le voyant arriver, le cuisinier redoubla d’efforts. Puis soudainement, tous les employs prsents clatèrent de rire et le cuisinier souhaita la bienvenue au nouveau FSS en le remerciant de lui avoir donn la chance de se dtendre un peu.

(Prochaine histoire : la glace et les navires)

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Le cockpit d’un Boeing 747 de KLM lors d’un vol de nuit au-dessus de l’Atlantique

(Histoire prcdente : une cuisine comme aide la navigation l’aviation)

Vue du cockpit et de l'quipage d'un B747 de KLM, sur un vol de Montral vers Amsterdam (EHAM). La photo a t prise alors que l'aronef se trouve  mi-chemin au-dessus de l'Atlantique en 1983.
Vue du cockpit et de l’quipage d’un B747 de KLM, sur un vol de Montral vers Amsterdam (EHAM). La photo a t prise alors que l’aronef se trouve mi-chemin au-dessus de l’Atlantique en 1983.

Il fut un temps où visiter le cockpit d’un aronef durant le vol tait fort simple. Une demande tait faite l’hôtesse de l’air, qui allait ensuite voir le commandant de bord pour obtenir son accord. Même durant cette priode cependant, plusieurs compagnies interdisaient les visites lorsque l’avion tait au-dessus de l’ocan.

En 1983, lors d’un voyage au dpart de Montral vers la Hollande, j’ai tout de même pos la question au personnel de bord, esprant pouvoir prendre une photo souvenir.

Le vol s’effectuait sur un Boeing B747 de la compagnie KLM. Au beau milieu de la nuit, alors que l’appareil tait en vol de croisière depuis plusieurs heures et que la plupart des passagers taient assoupis, je demandai discrètement une hôtesse de l’air l’autorisation de visiter le cockpit. Naturellement, elle refusa. Revenant la charge, je lui mentionnai mon travail comme spcialiste en information de vol (FSS) pour Transports Canada Inukjuak (CYPH) et le fait que KLM communiquait rgulièrement avec nous pour recevoir les services essentiels. Afin de dissiper un dernier doute toujours possible, je lui donnai les numros des vols de KLM survolant le nord du Qubec, au Nunavik.

Elle accepta de transmettre le message et, vingt minutes plus tard, me dit : « Vous pouvez venir avec moi en faisant attention de ne pas rveiller les passagers de première classe installs près de l’escalier tournant qui mène au cockpit ». À mon entre dans le poste de pilotage, le commandant de bord se retourna, me salua en croquant dans une pomme et retourna son travail. Tout tait tranquille dans l’habitacle et on pouvait entendre un sifflement lger continuel caus par le frottement de l’air.

Après une courte discussion avec le personnel, je demandai aux deux pilotes et l’ingnieur de bord de fermer les yeux un court instant, le temps de la prise d’une photo avec flash. Une photo qu’il me serait impossible de prendre aujourd’hui, dans les mêmes circonstances, cause du niveau de scurit plus lev.

Et, tant donn que je venais de commencer des vacances annuelles dans un cockpit d’avion, je pensai qu’il serait intressant, une fois rendu en Hollande, de visiter le fameux monde miniature de Madurodam, histoire de ne pas s’loigner trop longtemps du monde de l’aviation…

Le monde miniature de Madurodam en Hollande, 1983
Le monde miniature de Madurodam en Hollande, 1983
Madurodam, Hollande 1983
Madurodam, Hollande 1983

(Prochaine histoire : des raisins et des bleuets Inukjuak)

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Une cuisine comme aide à la navigation aérienne.

(Histoire prcdente : l’OVNI invent Inukjuak en 1983)

Inukjuak durant le long blizzard qui empêcha les atterrissages durant plusieurs jours.
Inukjuak durant le long blizzard qui empêcha les atterrissages durant plusieurs jours.

L’hiver » 82 — » 83 fut froce Inukjuak (CYPH). Il y eut une priode où les vents taient suffisamment forts et les visibilits tellement rduites qu’une corde avait t attache entre le bâtiment où rsidaient les employs et la station d’information de vol de Transports Canada, de façon permettre aux employs de circuler en scurit. Les spcialistes en information de vol (FSS) tenaient la corde pour passer d’un bâtiment l’autre. Et gare celui qui tentait de transporter son plateau avec son repas entre les deux bâtiments. Une main tenait la corde et l’autre le plateau qui allait dans toutes les directions. À une occasion, une partie des aliments s’est retrouve dans le banc de neige.

À cause des vents, la neige s'accumulait parfois jusqu'au toit de la station d'information de vol d'Inukjuak
À cause des vents, la neige s’accumulait parfois jusqu’au toit de la station d’information de vol d’Inukjuak

Après une tempête qui sembla interminable, je me souviens que le personnel avait eu creuser des marches dans la neige durcie de façon pouvoir accder la porte de la station d’information de vol.

Il fallait parfois creuser dans la neige pour atteindre la porte et entrer dans la station d'information de vol de Inukjuak
Il fallait parfois creuser dans la neige pour atteindre la porte et entrer dans la station d’information de vol de Inukjuak

Bref, au bout de douze jours d’un blizzard qui avait empêch tout dcollage et atterrissage, le lait tait maintenant rationn dans le village et rserv aux enfants. À peine cent pieds au-dessus de nous, il paraît que le ciel tait bleu, d’après les pilotes qui avaient tent de s’approcher. Ces cent pieds de visibilit pouvantable et les vents incessants constituaient des obstacles qui empêchaient tout atterrissage. Un bon matin, un pilote de Twin Otter de Austin Airways dcida qu’il se risquait.

Le carr rouge tait utile pour aider les employs  retrouver un bâtiment durant un blizzard  Inukjuak
Le carr rouge tait utile pour aider les employs retrouver un bâtiment durant un blizzard Inukjuak

Le pilote devait composer avec l’absence d’une aide la navigation prcise, tant donn que l’aroport n’tait quip que d’un NDB. Il se fia donc sa connaissance des lieux et ce qui lui restait de jugement. Il savait que le bâtiment des employs tait vert et que juste gauche se trouvait la piste. J’imagine qu’il avait dcid qu’il pourrait compter sur la couleur du bâtiment pour lui indiquer le moment où il devrait faire son abrupt virage vers la piste. Il plongea dans la tempête, estimant la drive des vents de son mieux.

Au même moment, le cuisinier tait l’œuvre dans le bâtiment des employs. Il faisait face une immense baie vitre. Il fut sidr de voir apparaître le nez d’un Twin Otter quelques mètres de la fenêtre en même temps qu’un brusque virage tait effectu pour viter le bâtiment. On entendit immdiatement les deux moteurs de l’avion en pousse inverse maximale de façon immobiliser l’appareil le plus rapidement possible.

Le cuisinier conta et raconta encore son histoire au personnel, le temps de dcompresser un peu.

Une surprise n’attendant pas l’autre, la porte de l’avion s’ouvrit et, au lieu de transporter le lait et les provisions tant attendues par le village, ce sont plutôt une dizaine de passagers qui sortirent tout souriants. Cependant, ce n’tait l qu’une histoire abracadabrante de plus qui s’ajouterait dsormais toutes celles circulant parmi les pilotes offrant un service arien aux habitants des villages du Nunavik, le long des côtes des baies d’Hudson et d’Ungava.

(Prochaine histoire : le cockpit d’un Boeing 747 de KLM lors d’un vol de nuit au-dessus de l’Atlantique)

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L’OVNI inventé à Inukjuak en 1983.

(Histoire prcdente : allgations concernant le massacre de chiens de traîneaux durant les annes 50 et 60.)

Lâcher d'un ballon-sonde par Environnement Canada  Inukjuak en 1983
Lâcher d’un ballon-sonde par Environnement Canada Inukjuak en 1983

Un OVNI des plus invraisemblables fût cr Inukjuak (CYPH) autour de 1983, au moment où j’tais spcialiste en information de vol (FSS) pour Transports Canada.  Le personnel d’Environnement Canada en poste au bâtiment d’arologie avait la tâche de lancer deux fois par jour des ballons sondes pouvant atteindre des altitudes suprieures 70,000 pieds. Ces ballons remplis d’hydrogène tiraient une radiosonde transmettant des donnes telles que la vitesse des vents et la temprature toutes les altitudes.

Une bonne journe, un des observateurs attacha une petite pile sur la sonde de même que cinq ampoules alimentes par cette pile. Le taux d’ascension du ballon fut corrig en fonction du poids additionnel. La noirceur venue, le ballon fut lâch. Tout ce qu’un observateur pouvait voir dans le ciel tait cinq lumières se dplaçant l’une derrière l’autre, en gardant le même espacement. La vitesse et l’altitude de cette formation inconnue taient impossibles dterminer puisqu’il n’y avait pas de rfrence terrestre.

Vu du sol, cet OVNI pouvait être cent pieds d’altitude comme une très haute altitude. L’objet tait totalement silencieux et semblait se dplacer une vitesse impressionnante. Un OVNI est maintenant identifi, des dcennies plus tard.

(Prochaine histoire : une cuisine comme aide la navigation arienne)

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Allégations concernant le massacre de chiens de traîneaux durant les années ` 50 et `60.

Chiots esquimaux canadiens devant une maison de Inukjuak en 1983
Chiots esquimaux canadiens devant une maison de Inukjuak en 1983

(Histoire prcdente : acquisition d’une sculpture Inuite Inukjuak en 1982)

Lorsque j’tais en poste Inukjuak (CYPH) comme spcialiste en information de vol (FSS) pour Transports Canada, entre 1982-1983, j’adorais faire des promenades le long du littoral de la baie d’Hudson. Une belle journe, j’eus la chance d’être accompagn par un gros chien esquimau canadien appartenant un employ d’Environnement Canada. Le chien avait trouv la façon de se librer de sa laisse et j’avais profit de sa compagnie pour explorer les environs.

Il n’tait pas et il n’est toujours pas frquent d’apercevoir un chien sans surveillance sur le territoire habit par les Inuits, spcialement durant l’t. Ces derniers ont l’habitude d’aller porter les chiens en surplus sur quelques îles se trouvant proximit des diffrents villages le long des côtes de la baie d’Hudson et d’Ungava. Naturellement, les Inuits revenant de la pêche s’arrêtent frquemment sur les îles où se trouvent les chiens et laissent de la nourriture. Ce procd est toujours en place en 2013, car il fonctionne bien. Selon un Inuit d’Inukjuak avec qui je discutais rcemment, l’île permet aux chiens de conserver leur libert de mouvement au lieu d’être prisonnier d’une corde. De même, les moustiques y sont beaucoup plus rares et les chiens ne s’en portent que mieux.

En 1982, j’entendais des rumeurs selon lesquelles un chien laiss libre tait susceptible d’être abattu, mais je n’ai jamais assist rien de tel. La politique locale veut que des chiens errants ne soient pas tolrs, car ils pourraient reprsenter une menace pour la population. Dans tout ce qui se dit concernant des chiens abattus pour les raisons les plus diverses, le thème qui revient le plus est celui de l’allgation de massacres de chiens esquimaux durant les annes ` 50 et `60. La documentation trouve cet gard fait tat d’un millier de chiens qui auraient t abattus au courant des annes, la plupart inutilement, dans les diffrents villages longeant les côtes de la baie d’Hudson, de l’Ungava et le long du dtroit de Davis.

Un rapport intrim d’enquête sur ce sujet a t remis en 2009 la Corporation Makivik et au Gouvernement du Qubec par le juge la retraite Jean-Jacques Croteau, de la Cour Suprieure du Qubec. On apprend de ce rapport qu’autant la GRC que la Sûret du Qubec avaient particip l’limination de chiens de traîneaux au cours des annes, en interprtant de façon personnelle et passablement restrictive une loi datant de 1941 et traitant des « Abus causs l’agriculture ». Le texte de loi visait, lors de sa cration, crer un système de non-responsabilit pour une personne qui abattrait un chien errant selon des conditions spcifiques stipules dans le texte de loi. On faisait rfrence ici des actions prises contre des chiens errants attaquant des moutons et des animaux de ferme.

Un chien esquimaux canadien (Jordan)  Inukjuak en 1983
Un chien esquimau canadien (Jordan) Inukjuak en 1983

Rapidement, les forces policières utilisèrent outrance ce passage de la loi pour l’appliquer sur un territoire qui n’tait pas vis par la loi. Je peux me tromper, mais je crois que personne n’a encore observ un Inuit leveur de moutons sur une ferme dans le Grand Nord. Les vènements les plus importants se produisirent après que la GRC eut laiss la responsabilit du territoire la Sûret du Qubec. Cette force policière fit preuve d’une mconnaissance complète de la culture Inuite. Selon les preuves prsentes dans le rapport, des policiers arrivaient dans un village sans prvenir et tuaient les chiens errants, les pourchassant même sous les maisons, sans avoir pris soin de vrifier si le chien tait malade ou dangereux. On trouve dans le rapport le tmoignage de deux Inuits de Kangiqsujuaq affirmant avoir vu deux policiers arriver par hydravion, et sans dire un mot qui que ce soit commencer pourchasser les chiens errants travers le village. Trente-deux bêtes furent limines et les policiers quittèrent le village sans donner d’explications.

Le rapport mentionne que les Inuits du nord du Qubec n’ont jamais t consults quant la porte de la loi sur « Les abus l’agriculture », une loi totalement inapproprie pour eux et ne tenant aucun compte de leurs droits ancestraux. Les Inuits dpendaient complètement des chiens pour se dplacer, chasser et pêcher. On peut lire le passage suivant, dans les dernières conclusions du rapport : « Après 1960, les actions et comportements des forces policières dpassèrent les bornes. C’tait n’y rien comprendre. Les officiers dmontraient un manque total de conscience par rapport aux droits fondamentaux des Inuits, leur culture et l’importance des chiens pour leur subsistance. Le comportement des officiers, qui ne pouvait être ignor par les administrations civiles provinciale et fdrale, eut pour effet de nuire grandement 75 propritaires de chiens et leur famille dans leur capacit de subvenir leurs besoins en nourriture ». Aucune aide ne fut offerte par les autorits pour compenser la perte des chiens.

Le juge note finalement qu’il n’a d’autre choix que de dclarer qu’il y a eu bris de la part du Canada et du Qubec dans leurs obligations fiduciaires envers les Inuits. J’imagine que des compensations montaires ont t offertes, moins que ce rapport ne soit que le premier d’une longue srie visant tablir les responsabilits et compensations futures.

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(Prochaine histoire : l’OVNI invent Inukjuak en 1983)

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Acquisition d’une sculpture Inuite à Inukjuak en 1982

(Histoire prcdente : Inukjuak : dernier espoir pour un Twin Otter bas en carburant)

Occasionnellement, un sculpteur Inuit visitait la station d’information de vol (FSS) de Transports Canada Inukjuak (CYPH), de même que les bâtiments environnants pour tenter de vendre sa dernière cration. Le problème principal est que ces visites taient interdites par la cooprative des travailleurs dont font partie les sculpteurs. S’il se faisait prendre vendre sans passer par un intermdiaire, il perdait son droit de vendre sa production la cooprative du village. Mais les tentations de passer outre aux règlements en place taient importantes, et ce, pour plusieurs raisons.

Premièrement, certains sculpteurs considraient qu’ils ne recevaient pas suffisamment d’argent de la cooprative pour leur travail, surtout que la plupart connaissaient le prix de vente rel de leur œuvre une fois celle-ci rendue sur les talages des magasins du Sud. Deuxièmement, il y avait des sculpteurs qui avaient un srieux problème d’alcoolisme. Ils ne pouvaient se procurer leur boisson Inukjuak, mais savaient que les Blancs avaient gnralement de l’alcool en leur possession. Ils prenaient alors la chance de vendre leur cration en se dplaçant vers les bâtiments où se trouvaient les Blancs, une fois l’obscurit venue.

Certains Blancs profitaient de cette dpendance l’alcool pour acqurir de très belles pièces en change d’une bouteille. Il y avait et il y a toujours plusieurs problèmes associs avec une telle attitude : premièrement, le Blanc perptue les difficults vcues par les communauts autochtones par rapport l’alcool. Nous connaissons tous les ravages causs par l’alcool et les drogues dans certains villages du nord du Canada et c’est pour cette raison que plusieurs emplacements ont mis en place une interdiction stricte de consommation d’alcool. Aucun magasin n’en vend.

Mais un habitant d’un village nordique sait que le Blanc possède de l’alcool dans sa maison. Des employs sont parfois revenus du travail pour s’apercevoir que leur maison avait t visite par un intrus. Rien n’avait t vol sauf l’alcool, bien que des objets de valeur aient t immdiatement la disposition du voleur. Le problème est que des gestes violents sont commis surtout lorsqu’il y a intoxication. Il importe d’viter d’être un acteur indirect d’un drame potentiel.

Le sculpteur tant l’auteur de sa cration, il a parfaitement le droit de prendre un risque pour tenter d’obtenir un meilleur prix pour son travail en vitant la cooprative. Cependant, cela est un coup de ds : ses tentatives vont lui rapporter plus d’argent jusqu’ ce qu’il se fasse prendre.

Une rare occasion d’acheter une pièce directement d’un sculpteur s’est prsente un soir d’hiver alors que je travaillais la station d’information de vol. Un sculpteur s’est prsent avec une sculpture qu’il a dpose sur le comptoir. Elle semblait être de grande taille, du moins d’après le format de l’emballage. Elle tait protge par une simple couverture et devait bien avoir dix-huit pouces de haut par douze ou quinze pouces de large.

Il m’annonça immdiatement qu’il dsirait des spiritueux et rien d’autre. Je lui rpondis que je ne buvais pas de spiritueux. Il me demanda alors de la bière. J’avais de la bière chez moi, mais refusai de lui dire. Je lui offris alors de l’argent qu’il refusa net : il voulait de l’alcool en ce dbut de week-end. Je refusai de modifier ma ligne de conduite et, quelques secondes plus tard, voyais le sculpteur disparaître avec sa cration, confiant qu’il trouverait rapidement le client recherch.

(Prochaine histoire : allgations concernant le massacre de chiens de traîneaux durant les annes » 50 et « 60)

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Inukjuak FSS: dernier espoir pour un Twin Otter en manque de carburant.

(Histoire prcdente : un nettoyage urgent)

Le Twin Otter de Bell Canada, au second plan, lors d’une belle journe d’hiver  Inukjuak. Au premier plan, un modèle de ski-doo de l’poque.
Le Twin Otter de Bell Canada, au second plan, lors d’une belle journe d’hiver Inukjuak. Au premier plan, un modèle de ski-doo de l’poque.

Un soir d’hiver, vers 1983, Inukjuak FSS reçu un appel radio d’un aronef de type Twin Otter oprant pour Bell Canada qui tait en difficult. Le brouillard avait envahi la côte de la Baie d’Hudson plusieurs endroits, et les atterrissages aux aroports de dgagement prvus par le pilote taient maintenant impossibles. Les conditions mto tant encore acceptables Inukjuak, notre aroport devint la dernière option pour le pilote. Malheureusement, nos lumières de pistes taient dfectueuses et une solution devait donc être trouve rapidement.

Des appels tlphoniques furent faits. Plusieurs Inuits arrivèrent en ski-doo et installèrent leur machine de chaque côt de la piste, intervalles plus ou moins rguliers, de façon clairer les limites extrieures de la surface d’atterrissage. Le pilote fit une approche normale et l’aronef se posa sans problème. Ce genre de service rendu par les Inuits n’tait pas une première. Les pilotes taient toujours heureux de compter sur cet clairage auxiliaire d’urgence fourni par les habitants des villages nordiques lorsqu’un ppin se prsentait.

(Prochaine histoire : acquisition d’une sculpture inuite Inukjuak en 1982)

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Un nettoyage urgent dans une maison d’Inukjuak

(Histoire prcdente : l’Inuit qui voulait tirer des Blancs avec une carabine de calibre .303)

Dans un village nordique, au dbut des annes ` 80, il y avait encore passablement de maisons qui n’taient pas quipes de toilettes telles qu’on les connaît aujourd’hui. Les occupants de ces proprits devaient se soulager en s’assoyant sur un rceptacle recouvert d’un sac poubelle que les gens appelaient « Honey Bag ». Heureusement pour le personnel d’Environnement Canada et de Transports Canada en poste la station d’information de vol d’Inukjuak, les quipements sanitaires taient la hauteur et il n’tait pas ncessaire d’utiliser des moyens de fortune.

Toujours est-il qu’un Blanc avait t engag comme directeur d’une institution publique locale et vivait avec sa famille dans une maison quipe de ce genre de toilette « Honey Bag ». En ce beau samedi, lui et sa conjointe recevaient des invits souper et ils s’occupaient des derniers dtails. La conjointe avait demand son mari, quelques jours auparavant, de sortir le « Honey Bag » de la maison et de mettre un nouveau sac sur le contenant.

L’homme avait un peu tard et le sac avait pris du volume et du poids. Le samedi venu, il ne pouvait plus procrastiner. Il prit le sac, le ferma et traversa le salon pour aller porter le tout l’extrieur. Au moment où il se retrouva au milieu de la pièce, au-dessus du tapis, le sac se brisa et tout le contenu se rpandit.

Il nous a t rapport qu’il y eut durant tout l’après-midi un mnage gigantesque pour tenter de corriger la situation. Nul moyen de savoir si les invits furent en mesure d’apprcier les arômes subtils du bon vin servi au souper…

(Prochaine histoire: Inukjuak : dernier espoir pour un Twin Otter en manque de carburant)

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L’Inuit qui voulait tirer des Blancs avec une carabine de calibre 303 à Inukjuak

(Histoire prcdente : l’avion tant attendu)

Notre lieu de travail et de rsidence  Inukjuak en 1982. Un des bâtiments est occup par la station d'information de vol de Transports Canada.
Notre lieu de travail et de rsidence Inukjuak en 1982. Un des bâtiments est occup par la station d’information de vol de Transports Canada.

Note : Il ne s’agit ici que d’une histoire vcue qui sort de l’ordinaire. Les relations normales entre Blancs et Inuits sont tout fait pacifiques. D’ailleurs, nous connaissons tous des situations dans les villes du sud où des Blancs ont tir sur d’autres personnes. L’histoire qui suit traite donc d’une situation isole.

À Inukjuak en 1982-1983, la disposition des bâtiments est simple. En haut de la côte se situe tout le village, habit en très grande majorit par des Inuits. En bas de la côte, près de la piste d’atterrissage et de la baie d’Hudson se trouvent les quelques bâtiments où œuvrent les employs d’Environnement Canada et de Transports Canada. Il n’y a que des Blancs qui vivent et travaillent sur cette parcelle de territoire.

Un soir d’hiver ` 82 — ` 83, quelqu’un frappe la porte et entre immdiatement sans attendre qu’on lui rponde. Il s’agit d’un policier auxiliaire, c’est–dire un jeune homme non arm qui prête main-forte l’occasion l’unique policier du village. Le jeune homme nous annonce que le policier est absent du village et qu’il doit donc se dbrouiller seul. Il nous dit : « Barrez vos portes et teignez les lumières; ne sortez que si cela est essentiel, car il y a un Inuit arm d’une carabine de calibre .303 qui veut tirer des Blancs ».

Dans la maison, c’est videmment la surprise la plus complète. Il est facile de dduire que le tireur qui cherche des Blancs ira vers la solution la plus facile et s’approchera de nos bâtiments pour prendre quelqu’un pour cible, au hasard. Je vais donc dans le rduit conserves qui me sert de chambre et prend une valise verrouille qui dort depuis des mois sur une tablette. J’en sors une Remington 700 BDL Bolt Action et remplis le chargeur. Nous tablissons un plan, avec les deux autres personnes prsentes dans la maison, pour aller chercher une spcialiste en information de vol (FSS) qui est seule dans un autre bâtiment où se trouve la station d’information de vol. Elle n’est possiblement pas avise des derniers dveloppements, pas plus qu’elle n’est arme. Un de nous la ramènera la maison et je complèterai le quart de nuit sa place.

Nous laissons temporairement une personne dans la maison, avec une carabine pour se protger en cas de besoin. Cet employ est nouvellement arriv Inukjuak. Je me souviens encore de sa raction au moment où nous nous apprêtions sortir. Je l’entends encore dire : « Mais quelle place de fous est-ce ici? »

Nous fermons les projecteurs extrieurs et sortons avec nos armes pour nous rendre la station. Circulant dans la noirceur, accroupis comme en temps de guerre, jusqu’au bâtiment de Transports Canada, nous trouvons l’employe occupe ses tâches normales, ignorant complètement la prsence possible d’un tireur proximit. Je prends la place de l’employe pour terminer le quart de nuit pendant que celle-ci retourne la maison accompagne d’un employ arm.

Une fois seul dans la salle d’opration, je ferme les lumières tout en gardant une petite lampe pour clairer la console des frquences radio. Je dpose la carabine plat sur un comptoir, le verrou de scurit enlev pour plus de rapidit d’usage en cas de besoin. La console radio est situe face une grande baie vitre : cela nous laisse carrment exposs pour quelqu’un qui dciderait de tirer travers la vitre. Il faut donc essayer de se tenir l’cart des fenêtres sauf au moment de rpondre des appels radio, et ce jusqu’ ce que nous recevions des nouvelles fraîches quant au tireur.

Twin Otter en rapprochement pour Inukjuak lors d'une journe très venteuse de 1982.
Twin Otter en rapprochement pour Inukjuak lors d’une journe très venteuse de 1982.

Le quart de nuit improvis se termine sans anicroche dans la station d’information de vol, mais j’apprends que plusieurs coups de feu ont t tirs sur un vhicule qui circulait non loin de nos installations. Les projectiles ont transperc les portes, mais, par chance, elles n’ont pas touch les occupants du vhicule. Dans les heures suivant cet vnement, une quipe d’intervention tactique de la Sûret du Qubec se rend Inukjuak et maîtrise le tireur.

Même si cette histoire s’est droule il y a maintenant des dcennies, je me souviens encore très bien de l’atmosphère qui rgnait cette soire-l. Quand des civils non entraîns doivent charger des armes feu dans le but potentiel de s’en servir contre un autre humain, cela ne s’oublie pas.

(Prochaine histoire : un nettoyage urgent)

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L’avion tant attendu à Inukjuak

(Histoire prcdente: le gestionnaire qui avait perdu l’apptit)

Deux Twin Otters de la compagnie Austin Airways dchargent leur cargo  Inukjuak en 1982.
Deux Twin Otters de la compagnie Austin Airways dchargent leur cargo Inukjuak en 1982.

Durant les annes où la station d’information de vol (FSS) de Transports Canada Inukjuak (CYPH) tait en activit, il y avait une chose sur laquelle un pilote d’Austin Airways pouvait compter : dès l’arrive de l’avion, il y aurait presqu’ coup sûr des gens sur place pour aider aux oprations de dchargement ou pour offrir les services requis permettant l’aronef de redcoller le plus rapidement possible. En effet, les Inuits du village tlphonaient rgulièrement la station FSS pour savoir si des avions taient prvus, et si tel tait le cas, l’heure estime d’arrive. Nous tions habitus aux questions telles que : « What time plane? », « Is that food plane? », « Is that mail plane? ».

Dès l’atterrissage nous pouvions voir arriver, en provenance du village, des pick-up, un camion-citerne et plusieurs vhicules trois roues Honda. Le maître de poste venait chercher le courrier, les gens du village se pressaient pour saluer les membres de leur famille, et les quelques commerçants aidaient au dchargement de leur matriel ou s’occupaient du ravitaillement en carburant.

L’intrêt tait similaire en ce qui concerne l’arrive des premiers navires de la saison, tard en t. Outre la prsence occasionnelle d’un brise-glace, nous assistions l’arrive d’un navire de la compagnie Shell charg de ravitailler les villages. Des barges charges de centaines de caisses et de machinerie lourde atteignaient enfin les villages du Nord le long des baie d’Hudson et d’Ungava après plus d’une semaine de navigation, profitant de la mare basse pour livrer leur cargaison. Certains de ces vaisseaux avaient t endommags par les glaces durant leur voyage et devaient parfois être rpars sur place avant de pouvoir reprendre leur route.

Piano et matelas laisss sur place en l'absence des clients. Inukjuak 1982
Situation inusite: un piano et des matelas sont laisss sur place en l’absence des clients. Inukjuak 1982

Une bonne journe, un avion de patrouille anti-sous-marine CP140 Aurora venant de terminer son travail au-dessus de la baie d’Hudson nous contacta pour recevoir des informations. Puisque ses oprations semblaient momentanment termines et qu’il se dplaçait maintenant vers un autre secteur, il lui fût demand de faire une « passe » basse altitude au-dessus de la station d’information de vol. Le pilote accepta et dans les minutes qui suivirent, l’avion passa en trombe près de nos installations pour disparaître quelques instants plus tard dans les nuages. Je me souviens encore du dluge d’appels tlphoniques que le passage de l’aronef occasionna dans le village. Faute de pouvoir apercevoir l’aronef, les gens surpris demandaient : « Is that food plane? » « Is that mail plane? ».

Un survol basse altitude est demand, l’occasion, pour observer un aronef de près et pouvoir entendre le son des moteurs au moment du passage. Cela permet galement la prise d’une photo. Chaque pilote que j’ai connu au cours des annes acceptait avec joie cette occasion de mettre un peu de piquant dans sa routine.

Le Twin Otter C-GMDC de la compagnie Air Inuit refait le plein de carburant  Inukjuak en 1982
Le Twin Otter C-GMDC de la compagnie Air Inuit refait le plein de carburant Inukjuak en 1982

(Prochaine histoire: l’Inuit qui voulait tirer des Blancs avec une carabine de calibre .303)

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