Quelques citoyens de Qubec profitent des dernières lueurs du jour la Station de la plage alors que les averses de l’heure prcdente ont prcipit le dpart des autres occupants.
Les chos radars montraient des cumulus bourgeonnants (TCU) en rapprochement pour le secteur vers 19 : 00. Ceux-ci donnent gnralement des averses de courte dure et laissent passer la lumière ici et l entre les formations nuageuses.
Pour un photographe, le premier ingrdient afin de capturer un ciel un peu spcial se trouve prsent.
La deuxième condition exige que les rayons du soleil couchant traversent une plus grande distance dans l’atmosphère sans blocage par un système mtorologique loign. Cela permet d’observer des tons de rose et de rouge si impressionnants. On doit donc connaître les prvisions du lendemain pour s’assurer qu’aucun nuage n’envahira le ciel.
Ces deux conditions augmentent beaucoup les chances d’un ciel intressant la tombe du jour. Cela ne fonctionne pas toujours, mais disons que la planification amliore la probabilit d’une sance photo russie.
C’est ce qui s’est produit en cette soire d’août 2024.
La photo ci-dessus montre les nuances du ciel visible travers le plafond ajour de la Station de la plage. L’aspect minimaliste me plaît. Il me rappelle vaguement les toiles du peintre Christopher Pratt, un Canadien de Terre-Neuve-et-Labrador. Pour lui, l’intrêt premier consiste moins dans la reprsentation d’une structure architecturale comme telle que l’ajout d’une lumière qui transformera la perception du spectateur.
Les Îles-de-la-Madeleine, dans la Province de Qubec, sont reconnues pour les magnifiques couchers de soleil. La photo ci-dessus a t prise alors que je revenais de Havre Aubert avec ma famille durant l’t 2017. Les marais se trouvent entre Havre Aubert et Cap-aux-Meules, immdiatement le long de la route principale.
La journe avait t nuageuse et ne laissait pas croire qu’il serait possible d’obtenir un rsultat minimalement intressant en soire. Cependant, vers 20 heures, alors que le soleil tait encore relativement haut, quelques rayons de soleil ont commenc se faufiler travers les nuages restants. Le stratocumulus tant bien dlimit, il devenait vident qu’au moment où le soleil serait suffisamment proche de l’horizon, il clairerait les nuages par en-dessous en même temps que les marais. Il fallait saisir rapidement l’opportunit qui s’offrait, car la lumière idale ne durerait que quelques minutes.
Quand les vents sont calmes et que, pour les besoins de la photo, il faut se planter les deux pieds près des marais faire des essais et des ajustements, il faut accepter de faire des dons de sang aux moustiques. Ce soir-l, j’ai dû perdre une chopine de sang!
L’absence de vent a permis une bonne rflexion des poteaux lectriques dans la mare au premier plan.
La photo a t prise avec un appareil-photo plein format Canon 5DSR mont sur trpied. L’objectif utilis tait un Canon 70-200 f2.8L IS II USM muni d’un filtre gradu pour viter la sous-exposition du premier plan caus par les hautes lumières l’horizon. La priorit tait l’ouverture, et F18 avait t choisi pour assurer une bonne profondeur de champ. L’ISO tait 200 et la focale 135 mm.
Les installations du terminal d’Air Canada l’aroport international Lester B. Pearson de Toronto obligent le voyageur qui fait le trajet Toronto-Qubec sortir l’extrieur du bâtiment pour prendre l’avion. Cela a ses avantages, surtout lorsque le vol s’effectue en soire et qu’il y a, au moment de l’embarquement, un magnifique coucher de soleil.
Mais photographier directement les couleurs d’un coucher de soleil main leve et sans filtres ni trpied est une recette pour un dsastre. Pas question non plus de s’arrêter trop longtemps dans cette zone scurise où les agents et le flot des passagers en route vers le DHC-8-400 exigent une action rapide.
Une mthode efficace qui donnera des rsultats concluants est de photographier indirectement les couleurs du coucher de soleil en utilisant l’avion comme rflecteur.
Dans un premier temps, il est prfrable d’utiliser un objectif exigeant très peu de lumière. Cela permet de limiter la grosseur du grain photographique tout en offrant une vitesse suffisamment rapide pour viter une photo floue. La scène a donc t capture avec un appareil-photo plein format Canon 5DSR muni d’un objectif Canon EF 50mm f/1.4 USM.
Dans un deuxième temps, il suffit de recadrer la photo au moyen d’un logiciel de traitement d’image de façon liminer tous les dtails inutiles. Il y a deux objectifs : 1) il est videmment ncessaire de conserver dans la photo les parties de l’avion susceptibles de mieux reprsenter le coucher de soleil et 2) utiliser au mieux les lments offrant un intrêt graphique pour le spectateur.
Si je n’avais conserv qu’une srie de hublots en gros plan pour ne montrer que le coucher de soleil dans toute sa splendeur et ses couleurs, il n’y aurait eu que des couleurs claires, sans contrastes. Cela aurait donn une photo sans intrêt. Le fait de conserver la partie sombre du haut de l’appareil ajoute un fort contraste de luminosit, permet d’inclure les lignes diagonales du Q-400 (1-2-3-4-5) et une rflexion des reflets eux-mêmes (6) sous l’aile de l’appareil. Le tout est reprsent dans la photo ci-dessous.
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Vers 1989-1990, il y a Iqaluit, au Nunavut, rsidant dans le même bâtiment de huit tages que moi, un Inuit très rserv. Il passe son temps libre lire en marchant, perdu dans ses penses, un peu comme un prêtre. Nous nous saluons au hasard des rencontres, sans plus.
Un soir où je m’apprête quitter mon appartement pour aller travailler sur le quart de nuit la station d’information de vol de Transports Canada Iqaluit, j’aperçois dans le couloir un individu en proie une violente crise de colère et qui crie et use de toute sa dtermination pour dfoncer le mur du couloir coups de marteau. Il y met de l’nergie et les travaux avancent…
Je reconnais cet individu que je salue quotidiennement et je fais donc face un problème : pour aller travailler la station FSS, je dois passer près de lui, car il n’y a pas d’autre issue pour quitter le bâtiment. Est-il trop en crise pour même me reconnaître?
Je me rapproche et prends la chance de passer juste derrière lui. Il arrête soudainement de frapper, se retourne le marteau la main en me dvisageant un instant. Puis il me dit, calmement, comme le gentleman qu’il est habituellement : « Good evening! ». Je le salue, marche environ dix mètres en continuant mon chemin vers la sortie et je l’entends alors se remettre crier et attaquer le mur avec son marteau.
Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il y avait parfois des soires où il tait possible d’assister aux scènes les plus invraisemblables. Et, quand cela prcdait le dbut d’un quart de nuit, dans un poste nordique, nous avions l’impression d’être soudainement plongs dans un monde surrel.
J’ignore la façon dont cet pisode s’est termin. Le lendemain matin, mon retour, tout tait redevenu calme. La seule trace laisse par l’individu tait un mur endommag. Dès le dbut de la semaine, les rparations seraient effectues et les dbordements de la fin de semaine deviendraient rapidement choses du pass.
Note: pour cette histoire vcue, tant donn que je n’avais pas de camra bord de l’aronef lors du vol de 1980, j’ai reproduit l’exprience sur un simulateur, en utilisant un Piper Cherokee, faute de pouvoir mettre la main sur un Grumman Cheetah.
Peu après l’obtention de ma licence de pilote priv, en 1980, on m’avait demand d’aller chercher un appareil stationn Earlton (CYXR) en Ontario, soit trois cents milles marins au nord-ouest de St-Jean-sur-Richelieu, et de le ramener St-Jean. Pour y aller, j’tais en compagnie d’un pilote d’exprience et nous avions donc quitt ensemble bord d’un monomoteur de type Grumman Cheetah (AA-5A). Pour le retour, chacun pilotait un avion, et nous nous suivions. Mon compagnon ouvrait la voie avec son appareil car il avait avec lui toutes les cartes de navigation VFR ncessaires et s’occupait de la route suivre jusqu’ St-Jean. Tout ce qu’il me demandait tait de le suivre.
En chemin, nous avions dû contourner un front froid et cela avait retard notre arrive pour St-Jean. Dès le dbut du voyage, on m’avait assur que nous arriverions avant la noirceur. Il me semblait maintenant que ce serait un peu juste.
Mon compagnon avait acclr lgèrement, de façon battre la nuit de vitesse. Les minutes passaient et deux constats s’imposaient : premièrement, le coucher de soleil tait magnifique. Deuxièmement, je n’avais pas mon annotation de vol de nuit. Ce coucher de soleil signifiait qu’il restait environ trente minutes avant la noirceur totale.
Je lui avais demand, via la radio, s’il croyait toujours que nous atteindrions St-Jean dans les dlais prvus. Il estimait dsormais que nous serions la limite.
Je m’tais inform de l’existence possible d’un bouton qui permettrait d’clairer les instruments la nuit. Le bouton ayant t trouv, les instruments avaient soudainement pris une couleur rosâtre. Il fallait maintenant connaître les instruments essentiels pour un vol de nuit. Il en avait nomm quelques-uns.
Les minutes passant, la pnombre s’tait installe. Il nous serait dsormais impossible de battre la nuit de vitesse, car nous n’avions pas encore travers la zone de contrôle de l’aroport international Pierre-Elliott Trudeau de Montral.
En approchant de Montral, je tentais de communiquer avec mon compagnon, mais il ne rpondait plus.Le seul repère de navigation disponible dans cette nuit naissante tait le petit phare rotatif rouge situ sur la queue de son appareil. Etrangement, son intensit s’affaiblissait graduellement. Mon compagnon s’loignait, son appareil tant plus rapide que le mien.
J’avais augment la puissance et appauvri le mlange pour gagner quelques nœuds, tout en me concentrant sur le petit point rouge qui pourrait me diriger vers St-Jean-sur-Richelieu. Je n’tais pas trop content de ma performance. J’aurais dû insist dès le dbut pour avoir une copie des documents de navigation. Mais le vol paraissait si simple. Leçon apprise.
Nous passions maintenant travers la zone de contrôle de l’aroport international de Montral. Dans la nuit, les lumières stroboscopiques des gros appareils taient visibles, sur les approches l’atterrissage ou lors des dcollages. En abusant un peu du moteur, j’avais peu peu diminu la distance me sparant de mon compagnon. Je ne faisais que le suivre dans le plus grand silence, faute de documents qui fourniraient les frquences VHF locales utiliser.
Le feu clignotant rouge qui me prcdait au loin s’tait soudainement mis perdre de l’altitude dans la nuit. Nous devions approcher de St-Jean puisque la descente venait de commencer. Mon compagnon communiquait certainement avec la tour de contrôle pour annoncer ses intentions. Pourquoi ne pas en profiter pour lui demander des conseils sur la façon d’atterrir de nuit? La rponse avait t courte et hsitante, car il savait que les communications radio taient enregistres. Tout ce qu’il avait pu trouver rpondre tait: « Je ne sais pas trop quelles informations te donner, prends ton temps. » Le contrôleur arien avait entendu cela et s’tait empress de m’offrir la prsence des services d’urgence, une offre que j’avais poliment dcliner.
Un pilote d’hydravion en vol dans le secteur avait entendu la communication et dit au contrôleur : « Dites-lui d’allumer son phare d’atterrissage ». Je lui avais rpondu que ce dernier tait brûl. Cela avait t constat dès le dcollage de St-Jean, mais ça ne devait pas poser de problème puisque nous devions voler de jour seulement.
La première tape en vue d’un atterrissage exige de se situer par rapport l’aroport et aux trois pistes. Quand on n’a jamais vol de nuit, le spectacle est diffrent et demande un ajustement. Une fois la piste en service (piste 11) reconnue, tout ce qu’il me restait donc faire tait d’imaginer que l’instructeur qui m’avait form tait assis côt de moi. Il exigerait les bonnes positions dans le circuit, les bonnes hauteurs en fonction des diffrentes tapes, les bonnes vitesses et les degrs de volets appropris pour finalement terminer avec un angle d’approche adquat.
Tout ce que je savais du vol de nuit, l’poque, se rsumait un seul aspect minemment pratique : il y avait un bois au dbut de la piste 11 et je ne voulais pas arriver trop bas et accrocher le sommet d’arbres invisibles dans la nuit. Toutefois, arriver trop haut au-dessus du seuil de piste signifierait que les roues toucheraient trop loin après le seuil et que la longueur de piste restante serait insuffisante pour immobiliser l’avion de la façon idale, c’est–dire en un seul morceau.
En finale, bien que mon attention tait entièrement rserve aux procdures, je sentais tout de même que le rythme de mes battements de cœur tait plus rapide. En courte finale, tout s’tait pass rapidement. L’avion avait survol le bois, la piste s’tait rapproche rapidement et les deux roues du train principal avaient touch la piste dlicatement. Le freinage s’tait fait immdiatement et tout tait dsormais termin.
L’essentiel tait rgl. J’avais par la suite demand au contrôleur arien de me guider sur les voies de circulation jusqu’ l’aroclub. Il en avait finalement profit pour demander, un sourire dans la voix : « Est-ce que tu vas le suivre ton cours de vol de nuit?»!.
(Prochaine histoire: Atterrissage de nuit sur une patinoire).