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Histoires vécues comme spécialiste en information de vol (FSS): Rouyn-Noranda FSS

Des procédures officielles imaginaires à la tour de contrôle de Val-d’Or

HS-125 Avion ambulance C-FSEN Valentine Lupien du Gouvernement du Québec vers 1986
HS-125 Avion ambulance C-FSEN Valentine Lupien du Gouvernement du Québec vers 1986

Durant les années ’80, alors que j’occupe la fonction de spécialiste en information de vol (FSS) à la station d’information de vol de Transports Canada à Rouyn-Noranda (CYUY), je reçois un téléphone de la part d’un contrôleur aérien de l’aéroport de Val-d’Or (CYVO) me signalant un problème avec l’ARCAL type K. Le système ARCAL est un équipement qui permet à un pilote d’ouvrir les lumières de piste à distance.

Normalement, le pilote a le choix entre trois intensités d’éclairage : faible, moyenne et élevée. Mais pour une période prolongée, l’intensité la plus faible de l’ARCAL ne fonctionnera pas. Le contrôleur me demande d’émettre un NOTAM signalant que personne ne peut utiliser l’ARCAL pour une période indéfinie.

Je ne suis pas d’accord avec cette demande. Un système ARCAL que l’on décide de rendre disponible facilitera la vie d’un pilote en lui permettant de choisir parmi les intensités restantes lors de l’approche ou du décollage. Les pilotes du HS125 du Gouvernement du Québec (photo ci-dessus) chargé des évacuations médicales durant la nuit apprécieront, j’en suis sûr.

Je mentionne donc au contrôleur que je ne connais pas de procédures approuvées pour les pannes concernant l’ARCAL de type K et que je ne vois pas pourquoi je considérerais comme totalement non fonctionnel un système dont seule une intensité sur trois pose problème.

Il me répond que ce sont des procédures écrites qui se trouvent à la tour de contrôle et qu’une demande doit être faite à son gestionnaire si je désire les obtenir. Comment est-il possible que des procédures régissant un système installé sur plusieurs aéroports à travers le Canada, avec ou sans tour de contrôle, puissent se trouver seulement dans des tours de contrôle sélectionnées? Cela est impensable.

Je demande donc, par gestionnaire interposé, de recevoir une copie des fameux écrits. Mais il semble maintenant que les procédures ne se trouvent pas à Val-d’Or, mais au bureau régional de Transports Canada à Montréal. J’essaie donc de les obtenir du bureau de Montréal, mais personne ne peut rien trouver de concret.

Il semble de plus en plus évident que les procédures ne sont que fabulation. Pourtant, tous les intervenants défendent les procédures fictives, pour les raisons les plus diverses.

À l’époque, il existe un programme intitulé « Prime à l’initiative ». Ce programme invite le personnel à faire connaître toute suggestion susceptible d’améliorer l’efficacité de la fonction publique. Si la suggestion est retenue par les plus hauts niveaux de gestion, une prime en argent et un certificat sont remis à l’employé par le sous-ministre des transports. Réalisant que je ne pourrai avoir gain de cause en discutant avec les instances régionales, je me sers donc d’une formule de prime à l’initiative.

Une année plus tard, je reçois un appel d’un inconnu qui dit travailler à Ottawa. Il me questionne concernant ma suggestion sur l’ARCAL de Val-d’Or. Il sous-entend que la proposition ne passera pas.

Je lui parle alors en tant que contribuable canadien. Je lui signale que j’ai payé, comme les autres canadiens, pour faire installer ce système de commande d’éclairage, et que tant qu’il y aura une intensité qui fonctionnera, le système devra être accessible pour les pilotes, que cela lui plaise ou non. S’il s’obstine, qu’il se prépare à rendre des comptes au public canadien et à Benoît Bouchard, alors ministre des Transports.

Deux mois plus tard, je reçois un chèque et une lettre du sous-ministre me remerciant pour la suggestion améliorant l’efficacité de la fonction publique. Il aura fallu quatorze mois pour passer des procédures fictives à un système fonctionnel de gestion des pannes de l’ARCAL. Et les nouvelles procédures concernent maintenant tous les aéroports canadiens équipés d’un tel système de commande à distance de l’éclairage d’une piste.

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Histoires vécues comme spécialiste en information de vol (FSS): Rouyn-Noranda FSS

Le Cessna 172 qui traînait un bloc de ciment de 100 kilos à Rouyn-Noranda.

Spécialiste en information de vol (FSS) au travail à Rouyn-Noranda vers 1986
Spécialiste en information de vol (FSS) au travail à Rouyn-Noranda vers 1986

Durant une belle journée d’été de juillet à l’aéroport de Rouyn-Noranda (CYUY), un pilote d’un aéroclub local contacte la station d’information de vol (FSS) de Transports Canada pour obtenir les informations relatives à un décollage. Il volera avec un Cessna 172. Il obtient les détails et commence à circuler vers la piste. Je note rapidement que l’aéronef semble traîner derrière lui un objet. L’utilisation des jumelles confirme la présence d’un bloc de ciment d’une centaine de kilos attaché par une corde, bloc qui sert normalement à immobiliser l’avion après chaque vol.

Avion Cessna C172 C-GUCU à Rouyn-Noranda vers 1986
Avion Cessna C172 C-GUCU à Rouyn-Noranda vers 1986

Il apparaît clair que le pilote n’a pas fait l’inspection de son avion avant de démarrer le moteur, procédure obligatoire pour noter toutes anomalies. Traîner ce bloc de ciment sur l’asphalte doit certainement nécessiter plus de puissance de la part du moteur. Je demande au pilote : « Ne trouvez-vous pas qu’aujourd’hui il vous faut plus de puissance pour circuler? » Il me répond qu’en effet il a noté le besoin d’augmenter les révolutions du moteur et que cela est probablement dû à la grande chaleur et à l’humidité.

Sans plus attendre, je lui réponds : « Avez-vous fait votre inspection avant-vol pour vous assurer que tout était correct? » Là, de toute évidence, il comprend que quelque chose cloche. Il immobilise l’aéronef sur la voie de circulation, sort de l’appareil et constate l’énorme bourde qu’il vient de commettre. Sans rien dire de compromettant sur les ondes puisqu’il sait que les communications radio sont enregistrées, il m’annonce qu’il retourne à l’aéroclub parce qu’il a « oublié quelque chose »…

Le poste de travail de l’ancienne station d’information de vol de Transports Canada à Rouyn-Noranda ne permettait qu’une vue partielle de la piste 08/26, mais une vue complète de la voie de circulation où se trouvait le Cessna 172 alors qu’il traînait son bloc de ciment.

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Le journal « Le Moyen Terme »

Une section de la page titre de mon journal "Le Moyen Terme"
Une section de la page titre de mon journal « Le Moyen Terme »

Comme les stations d’information de vol (FSS) de Transports Canada au Québec étaient disséminées sur un très grand territoire, les communications entre les employés des différentes stations étaient passablement limitées. Il était assez difficile d’obtenir des informations sur les mouvements de personnel, informations vitales lorsque venait le temps d’argumenter pour choisir l’endroit de la prochaine mutation.

Comment dire à un gestionnaire qu’il y a de la disponibilité à Montréal si l’employé n’a pas devant lui, au moment de la discussion, toutes les informations concernant les mouvements de personnel. Pour corriger la situation, une fois en poste à Rouyn-Noranda FSS, je décidai donc de créer mon propre journal, intitulé « Le Moyen Terme ».

Le nouveau journal était distribué à toutes les stations d’information de vol du Québec, à l’école de Transports Canada à Cornwall (IFTC), au bureau régional de Montréal et à Ottawa. Soudainement, les spécialistes en information de vol du Québec avaient accès à une information vérifiée et actualisée régulièrement.

J’avais des collaborateurs d’un peu partout et, le journal gagnant en crédibilité, des gens m’écrivaient même d’Ottawa. Je finançais le journal, rédigeais la plupart des articles et postais une nouvelle édition tous les deux mois. N’étant redevable à personne, je m’assurais d’une totale liberté. Cela n’empêcha pas la réception éventuelle d’une lettre d’avocat, mais dans un milieu aussi contrôlé, cela n’était pas étonnant. Je présentai cette lettre d’avocat à un juge bien connu qui se chargea de l’affaire gratuitement. La cause s’arrêta net.

Chaque édition était constituée de dix à quinze pages. Elle était tapée à la main sur une vieille machine à écrire et les erreurs étaient corrigées avec du liquide correcteur. Certaines informations n’avaient pour but que de divertir alors que d’autres étaient davantage de nature éditoriale. Ces dernières suscitaient généralement des réactions positives des employés et cela contribuait à maintenir une correspondance continue.

La page "Faits et rumeurs" du journal "Le Moyen Terme"
La page « Faits et rumeurs » du journal « Le Moyen Terme »

La section possiblement la moins appréciée par le bureau régional était intitulée : « Où sont-ils? ». Sur cette page, nous retrouvions le nom de tous les employés présents à une station en particulier, de même que son ancienneté. Désormais, ces données devenaient accessibles à tous très rapidement. Les informations fournies par la gestion pouvaient être vérifiées par les employés et servir de base d’argumentation lors des discussions concernant une mutation. Cela ennuyait possiblement des gestionnaires qui avaient eu, jusqu’à tout récemment, une tâche relativement plus aisée dans les attributions de poste.

Page "Où sont-ils?" de mon journal "Le Moyen Terme"
Page « Où sont-ils? » de mon journal « Le Moyen Terme »

Après plusieurs parutions, un gestionnaire profita de mon passage au bureau régional de Transports Canada à Montréal pour m’intimer de cesser la parution du journal. Je lui répondis qu’il n’en serait rien et que le journal avait visiblement son utilité pour plusieurs employés. Cette réponse, à l’époque, ne fût pas de nature à me faire bénéficier de support en haut lieu, mais cela n’étant pas mon but, le journal continua de paraître pendant encore près de deux ans. Je décidai de mettre fin à sa parution lorsque je n’eus plus assez de temps pour le rédiger, occupé avec plusieurs cours universitaires à distance en même temps que je travaillais sept jours par semaine à la station d’information de vol d’Iqaluit (CYFB). Tant qu’à diluer ou diminuer le contenu et la qualité du journal que j’avais créé, je choisis alors de cesser sa parution.

(Note : personnages créés par Gotlib)

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Histoires vécues comme spécialiste en information de vol (FSS): Rouyn-Noranda FSS

En route vers la deuxième mutation : Rouyn-Noranda FSS

Nouvelle station d'information de vol de Rouyn-Noranda. Photo prise autour de 2002. Auteur inconnu.
Nouvelle station d’information de vol de Rouyn-Noranda. Photo prise autour de 2002. Auteur inconnu.
Ancienne station d'information de vol de Rouyn-Noranda. Photo prise en 1984
Ancienne station d’information de vol de Rouyn-Noranda. Photo prise en 1984

Novembre 1983. Il était maintenant temps de quitter Inukjuak (CYPH) après y avoir travaillé comme spécialiste en information de vol (FSS) tous les jours pendant plus d’un an. La nouvelle station d’information de vol de Transports Canada était située à l’aéroport de Rouyn-Noranda (CYUY). Mais les choses se compliquèrent au moment du départ, la météo se dégradant rapidement. Un Twin Otter de la compagnie Air Creebec ferait désormais le vol, à partir de Kuujuaraapik (CYGW). Mais il y aurait désormais de multiples arrêts le long de la Baie-James.

Avec les vents forts et les nuages bas, j’étais conscient que nous nous ferions brasser tout le long du vol. Les nuages n’étant qu’à quelques centaines de pieds au-dessus des conifères, les pilotes devaient effectuer toutes les étapes du vol et des différentes escales entre la cime des arbres et la base des stratus. Aucun aéroport ne possédait d’équipements permettant un atterrissage aux instruments. Les pistes étaient courtes, en gravier ou en terre, et des arbres empêchaient parfois des descentes et des montées à un taux considéré comme « normal » par la plupart des voyageurs.

Après quelques heures de vol dans cette turbulence mécanique soutenue, plusieurs passagers n’en purent plus et durent utiliser le sac fourni en cas de mal de l’air. Je me changeai les idées en regardant par la fenêtre. Il n’y avait pas de musique proposée durant le vol; les râlements des passagers servirent de bruit de fond.
Finalement, la nuit venue, l’atterrissage se fit à Val-d’Or (CYVO), sur une longue piste asphaltée équipée d’instruments adéquats. Une heure de route plus tard, j’étais à Rouyn-Noranda. Bienvenue dans le Sud…!

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Histoires vécues comme spécialiste en information de vol (FSS): Inukjuak FSS

La glace et les navires

(Histoire précédente : des raisins et des bleuets à Inukjuak)

Un opérateur radio à bord d'un navire ancré au large de Inukjuak vers 1982
Un opérateur radio à bord d’un navire ancré au large de Inukjuak vers 1982
La timonerie d'un navire de marchandise ravitaillant Inukjuak en 1982
La timonerie d’un navire de marchandise ravitaillant Inukjuak en 1982

Plusieurs bateaux naviguent le long des côtes de la baie d’Hudson et de la baie d’Ungava lorsque l’été arrive. Parfois, les spécialistes en information de vol (FSS) de Transports Canada à Inukjuak (CYPH) sont autorisés à monter à bord, le temps de quelques photos, comme cela a été le cas pour les deux photos ci-dessus.

Lorsque les navires effectuent de très longs trajets pour finalement atteindre les petits villages de la baie d’Hudson et de la baie d’Ungava, ils frappent régulièrement des petits morceaux de glace dans leur avancée. C’est à l’équipage de déterminer si la coque du bateau est suffisamment résistante pour emprunter le passage désiré.

Malheureusement, il n’est pas toujours possible de juger correctement de la situation et la coque du navire se brise alors sous l’impact avec le glacier. La photo ci-dessous montre le navire Kanguk, au large d’Inukjuak, à l’automne 1982, sa coque endommagée durant son voyage vers un des petits villages de la côte.

Coque brisée du Kanguk à Inukjuak
Coque brisée du Kanguk à Inukjuak

(Prochaine histoire : en route vers la deuxième mutation : Rouyn-Noranda FSS)

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Histoires vécues comme spécialiste en information de vol (FSS): Inukjuak FSS

Des raisins et des bleuets à Inukjuak

(Histoire précédente : Le cockpit d’un Boeing 747 de KLM lors d’un vol de nuit au-dessus de l’Atlantique)

Durant les mois où il y avait un cuisinier sur place pour préparer les repas à Inukjuak, nous avions la vie facile puisque tout était prêt lorsque l’heure des repas arrivait. Il reste que les desserts auraient bénéficié d’un peu de variété. Ces derniers étaient à base de raisins ou de bleuets, semaines après semaines, mois après mois.

Muffins aux carottes et raisins
Muffins aux carottes et raisins
Muffins aux bleuets et citrons
Muffins aux bleuets et citrons

Ainsi, nous avions le choix entre des gâteaux aux raisins, des tartes aux raisins, des poudings aux raisins, des muffins aux raisins et des biscuits aux raisins. Quand il n’y avait plus aucune possibilité d’ingérer des raisins supplémentaires, c’était le tour des bleuets : les gâteaux aux bleuets, les tartes aux bleuets, les poudings aux bleuets, les muffins aux bleuets. Cependant, pour varier un peu, il n’y avait pas de biscuits aux bleuets. J’ai été longtemps sans pouvoir manger des raisins ou des bleuets suite à ces mois intensifs de consommation des mêmes ingrédients.

Le cuisinier n’étant pas particulièrement patient, il me vint l’idée de le faire rigoler un peu en le faisant participer à une attrape dont serait victime un nouveau spécialiste en information de vol (FSS) de Transports Canada arrivé à Inukjuak au début de l’après-midi. Ce dernier n’avait pris encore aucun repas à la cuisine du staff house. Je savais que le repas du soir était servi à 17 h et qu’il fallait toujours s’organiser pour être à l’heure. J’annonçai donc au cuisinier que j’arriverais cinq minutes en retard avec le nouvel employé. Le cuisinier pourrait ainsi entrer dans une terrible colère, simulée mais convaincante.

L’heure du souper arriva, je savais qu’il était 17 h mais l’entraînement du nouveau FSS se prolongea volontairement de cinq minutes. Puis, feignant la surprise, nous lui avons annoncé qu’il fallait se diriger au plus tôt vers le staff house, car le cuisinier était probablement rouge de colère. Dans le corridor menant à la cuisine, nous entendions déjà les chaudrons lancés sur le comptoir et le cuisinier crier que les nouveaux employés se prenaient pour des rois et manquaient de respect au personnel chargé de les nourrir.

Le nouveau me signala qu’il n’avait plus vraiment faim. Visiblement, il ne tenait pas à affronter la colère du cuisinier. La situation empira encore lorsque je l’incitai malgré tout à se diriger vers la cuisine pour qu’il tente de s’expliquer. En le voyant arriver, le cuisinier redoubla d’efforts. Puis soudainement, tous les employés présents éclatèrent de rire et le cuisinier souhaita la bienvenue au nouveau FSS en le remerciant de lui avoir donné la chance de se détendre un peu.

(Prochaine histoire : la glace et les navires)

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Histoires vécues comme spécialiste en information de vol (FSS): Inukjuak FSS

Le cockpit d’un Boeing 747 de KLM lors d’un vol de nuit au-dessus de l’Atlantique

(Histoire précédente : une cuisine comme aide à la navigation à l’aviation)

Vue du cockpit et de l'équipage d'un B747 de KLM, sur un vol de Montréal vers Amsterdam (EHAM). La photo a été prise alors que l'aéronef se trouve à mi-chemin au-dessus de l'Atlantique en 1983.
Vue du cockpit et de l’équipage d’un B747 de KLM, sur un vol de Montréal vers Amsterdam (EHAM). La photo a été prise alors que l’aéronef se trouve à mi-chemin au-dessus de l’Atlantique en 1983.

Il fut un temps où visiter le cockpit d’un aéronef durant le vol était fort simple. Une demande était faite à l’hôtesse de l’air, qui allait ensuite voir le commandant de bord pour obtenir son accord. Même durant cette période cependant, plusieurs compagnies interdisaient les visites lorsque l’avion était au-dessus de l’océan.

En 1983, lors d’un voyage au départ de Montréal vers la Hollande, j’ai tout de même posé la question au personnel de bord, espérant pouvoir prendre une photo souvenir.

Le vol s’effectuait sur un Boeing B747 de la compagnie KLM. Au beau milieu de la nuit, alors que l’appareil était en vol de croisière depuis plusieurs heures et que la plupart des passagers étaient assoupis, je demandai discrètement à une hôtesse de l’air l’autorisation de visiter le cockpit. Naturellement, elle refusa. Revenant à la charge, je lui mentionnai mon travail comme spécialiste en information de vol (FSS) pour Transports Canada à Inukjuak (CYPH) et le fait que KLM communiquait régulièrement avec nous pour recevoir les services essentiels. Afin de dissiper un dernier doute toujours possible, je lui donnai les numéros des vols de KLM survolant le nord du Québec, au Nunavik.

Elle accepta de transmettre le message et, vingt minutes plus tard, me dit : « Vous pouvez venir avec moi en faisant attention de ne pas réveiller les passagers de première classe installés près de l’escalier tournant qui mène au cockpit ». À mon entrée dans le poste de pilotage, le commandant de bord se retourna, me salua en croquant dans une pomme et retourna à son travail. Tout était tranquille dans l’habitacle et on pouvait entendre un sifflement léger continuel causé par le frottement de l’air.

Après une courte discussion avec le personnel, je demandai aux deux pilotes et à l’ingénieur de bord de fermer les yeux un court instant, le temps de la prise d’une photo avec flash. Une photo qu’il me serait impossible de prendre aujourd’hui, dans les mêmes circonstances, à cause du niveau de sécurité plus élevé.

Et, étant donné que je venais de commencer des vacances annuelles dans un cockpit d’avion, je pensai qu’il serait intéressant, une fois rendu en Hollande, de visiter le fameux monde miniature de Madurodam, histoire de ne pas s’éloigner trop longtemps du monde de l’aviation…

Le monde miniature de Madurodam en Hollande, 1983
Le monde miniature de Madurodam en Hollande, 1983
Madurodam, Hollande 1983
Madurodam, Hollande 1983

(Prochaine histoire : des raisins et des bleuets à Inukjuak)

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Une cuisine comme aide à la navigation aérienne.

(Histoire précédente : l’OVNI inventé à Inukjuak en 1983)

Inukjuak durant le long blizzard qui empêcha les atterrissages durant plusieurs jours.
Inukjuak durant le long blizzard qui empêcha les atterrissages durant plusieurs jours.

L’hiver » 82 — » 83 fut féroce à Inukjuak (CYPH). Il y eut une période où les vents étaient suffisamment forts et les visibilités tellement réduites qu’une corde avait été attachée entre le bâtiment où résidaient les employés et la station d’information de vol de Transports Canada, de façon à permettre aux employés de circuler en sécurité. Les spécialistes en information de vol (FSS) tenaient la corde pour passer d’un bâtiment à l’autre. Et gare à celui qui tentait de transporter son plateau avec son repas entre les deux bâtiments. Une main tenait la corde et l’autre le plateau qui allait dans toutes les directions. À une occasion, une partie des aliments s’est retrouvée dans le banc de neige.

À cause des vents, la neige s'accumulait parfois jusqu'au toit de la station d'information de vol d'Inukjuak
À cause des vents, la neige s’accumulait parfois jusqu’au toit de la station d’information de vol d’Inukjuak

Après une tempête qui sembla interminable, je me souviens que le personnel avait eu à creuser des marches dans la neige durcie de façon à pouvoir accéder à la porte de la station d’information de vol.

Il fallait parfois creuser dans la neige pour atteindre la porte et entrer dans la station d'information de vol de Inukjuak
Il fallait parfois creuser dans la neige pour atteindre la porte et entrer dans la station d’information de vol de Inukjuak

Bref, au bout de douze jours d’un blizzard qui avait empêché tout décollage et atterrissage, le lait était maintenant rationné dans le village et réservé aux enfants. À peine cent pieds au-dessus de nous, il paraît que le ciel était bleu, d’après les pilotes qui avaient tenté de s’approcher. Ces cent pieds de visibilité épouvantable et les vents incessants constituaient des obstacles qui empêchaient tout atterrissage. Un bon matin, un pilote de Twin Otter de Austin Airways décida qu’il se risquait.

Le carré rouge était utile pour aider les employés à retrouver un bâtiment durant un blizzard à Inukjuak
Le carré rouge était utile pour aider les employés à retrouver un bâtiment durant un blizzard à Inukjuak

Le pilote devait composer avec l’absence d’une aide à la navigation précise, étant donné que l’aéroport n’était équipé que d’un NDB. Il se fia donc à sa connaissance des lieux et à ce qui lui restait de jugement. Il savait que le bâtiment des employés était vert et que juste à gauche se trouvait la piste. J’imagine qu’il avait décidé qu’il pourrait compter sur la couleur du bâtiment pour lui indiquer le moment où il devrait faire son abrupt virage vers la piste. Il plongea dans la tempête, estimant la dérive des vents de son mieux.

Au même moment, le cuisinier était à l’œuvre dans le bâtiment des employés. Il faisait face à une immense baie vitrée. Il fut sidéré de voir apparaître le nez d’un Twin Otter à quelques mètres de la fenêtre en même temps qu’un brusque virage était effectué pour éviter le bâtiment. On entendit immédiatement les deux moteurs de l’avion en poussée inverse maximale de façon à immobiliser l’appareil le plus rapidement possible.

Le cuisinier conta et raconta encore son histoire au personnel, le temps de décompresser un peu.

Une surprise n’attendant pas l’autre, la porte de l’avion s’ouvrit et, au lieu de transporter le lait et les provisions tant attendues par le village, ce sont plutôt une dizaine de passagers qui sortirent tout souriants. Cependant, ce n’était là qu’une histoire abracadabrante de plus qui s’ajouterait désormais à toutes celles circulant parmi les pilotes offrant un service aérien aux habitants des villages du Nunavik, le long des côtes des baies d’Hudson et d’Ungava.

(Prochaine histoire : le cockpit d’un Boeing 747 de KLM lors d’un vol de nuit au-dessus de l’Atlantique)

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L’OVNI inventé à Inukjuak en 1983.

(Histoire précédente : allégations concernant le massacre de chiens de traîneaux durant les années 50 et 60.)

Lâcher d'un ballon-sonde par Environnement Canada à Inukjuak en 1983
Lâcher d’un ballon-sonde par Environnement Canada à Inukjuak en 1983

Un OVNI des plus invraisemblables fût créé à Inukjuak (CYPH) autour de 1983, au moment où j’étais spécialiste en information de vol (FSS) pour Transports Canada.  Le personnel d’Environnement Canada en poste au bâtiment d’aérologie avait la tâche de lancer deux fois par jour des ballons sondes pouvant atteindre des altitudes supérieures à 70,000 pieds. Ces ballons remplis d’hydrogène tiraient une radiosonde transmettant des données telles que la vitesse des vents et la température à toutes les altitudes.

Une bonne journée, un des observateurs attacha une petite pile sur la sonde de même que cinq ampoules alimentées par cette pile. Le taux d’ascension du ballon fut corrigé en fonction du poids additionnel. La noirceur venue, le ballon fut lâché. Tout ce qu’un observateur pouvait voir dans le ciel était cinq lumières se déplaçant l’une derrière l’autre, en gardant le même espacement. La vitesse et l’altitude de cette formation inconnue étaient impossibles à déterminer puisqu’il n’y avait pas de référence terrestre.

Vu du sol, cet OVNI pouvait être à cent pieds d’altitude comme à une très haute altitude. L’objet était totalement silencieux et semblait se déplacer à une vitesse impressionnante. Un OVNI est maintenant identifié, des décennies plus tard.

(Prochaine histoire : une cuisine comme aide à la navigation aérienne)

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Acquisition d’une sculpture Inuite à Inukjuak en 1982

(Histoire précédente : Inukjuak : dernier espoir pour un Twin Otter bas en carburant)

Occasionnellement, un sculpteur Inuit visitait la station d’information de vol (FSS) de Transports Canada à Inukjuak (CYPH), de même que les bâtiments environnants pour tenter de vendre sa dernière création. Le problème principal est que ces visites étaient interdites par la coopérative des travailleurs dont font partie les sculpteurs. S’il se faisait prendre à vendre sans passer par un intermédiaire, il perdait son droit de vendre sa production à la coopérative du village. Mais les tentations de passer outre aux règlements en place étaient importantes, et ce, pour plusieurs raisons.

Premièrement, certains sculpteurs considéraient qu’ils ne recevaient pas suffisamment d’argent de la coopérative pour leur travail, surtout que la plupart connaissaient le prix de vente réel de leur œuvre une fois celle-ci rendue sur les étalages des magasins du Sud. Deuxièmement, il y avait des sculpteurs qui avaient un sérieux problème d’alcoolisme. Ils ne pouvaient se procurer leur boisson à Inukjuak, mais savaient que les Blancs avaient généralement de l’alcool en leur possession. Ils prenaient alors la chance de vendre leur création en se déplaçant vers les bâtiments où se trouvaient les Blancs, une fois l’obscurité venue.

Certains Blancs profitaient de cette dépendance à l’alcool pour acquérir de très belles pièces en échange d’une bouteille. Il y avait et il y a toujours plusieurs problèmes associés avec une telle attitude : premièrement, le Blanc perpétue les difficultés vécues par les communautés autochtones par rapport à l’alcool. Nous connaissons tous les ravages causés par l’alcool et les drogues dans certains villages du nord du Canada et c’est pour cette raison que plusieurs emplacements ont mis en place une interdiction stricte de consommation d’alcool. Aucun magasin n’en vend.

Mais un habitant d’un village nordique sait que le Blanc possède de l’alcool dans sa maison. Des employés sont parfois revenus du travail pour s’apercevoir que leur maison avait été visitée par un intrus. Rien n’avait été volé sauf l’alcool, bien que des objets de valeur aient été immédiatement à la disposition du voleur. Le problème est que des gestes violents sont commis surtout lorsqu’il y a intoxication. Il importe d’éviter d’être un acteur indirect d’un drame potentiel.

Le sculpteur étant l’auteur de sa création, il a parfaitement le droit de prendre un risque pour tenter d’obtenir un meilleur prix pour son travail en évitant la coopérative. Cependant, cela est un coup de dés : ses tentatives vont lui rapporter plus d’argent jusqu’à ce qu’il se fasse prendre.

Une rare occasion d’acheter une pièce directement d’un sculpteur s’est présentée un soir d’hiver alors que je travaillais à la station d’information de vol. Un sculpteur s’est présenté avec une sculpture qu’il a déposée sur le comptoir. Elle semblait être de grande taille, du moins d’après le format de l’emballage. Elle était protégée par une simple couverture et devait bien avoir dix-huit pouces de haut par douze ou quinze pouces de large.

Il m’annonça immédiatement qu’il désirait des spiritueux et rien d’autre. Je lui répondis que je ne buvais pas de spiritueux. Il me demanda alors de la bière. J’avais de la bière chez moi, mais refusai de lui dire. Je lui offris alors de l’argent qu’il refusa net : il voulait de l’alcool en ce début de week-end. Je refusai de modifier ma ligne de conduite et, quelques secondes plus tard, voyais le sculpteur disparaître avec sa création, confiant qu’il trouverait rapidement le client recherché.

(Prochaine histoire : allégations concernant le massacre de chiens de traîneaux durant les années » 50 et « 60)

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