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Histoires vécues comme spécialiste en information de vol (FSS): Québec FSS

Québec FSS et le commandant de bord d’un DC-9 d’Air Canada

Ancien terminal de l'aéroport de Québec avec en avant-plan un DC-9 d'Air Canada et un BAC 1-11 de QuébecAir
Ancien terminal de l’aéroport de Québec avec en avant-plan un DC-9 d’Air Canada et un BAC 1-11 de QuébecAir

Vers 1996, durant l’été, un commandant de bord de DC-9 d’Air Canada se présente à la station d’information de vol de Transports Canada à Québec (CYQB) pour recevoir un briefing de dernière minute sur les conditions météorologiques entre Québec et Toronto.

Tous les passagers sont déjà à bord, mais le capitaine s’inquiète du changement trop rapide dans la taille des cellules orageuses approchant l’aéroport de Québec. Ne désirant courir aucun risque, il demande les dernières informations concernant cette ligne d’orages en rapprochement avant de procéder avec le décollage.

Le radar météo et les photos satellitaires montrent un mur de cellules convectives qui sera impossible à traverser pour le DC-9. Il ne pourra voler assez haut ni contourner le système météo, à moins de faire un détour par Val-d’Or au nord ou par le Tennessee au sud.

Le commandant mesure très bien l’impact qu’aura sa décision. Il prend néanmoins le téléphone et contacte le régulateur de vols d’Air Canada à Toronto en annonçant qu’il ne part pas tant que la situation ne sera pas acceptable à Québec. Il entrevoit déjà les correspondances manquées à Toronto pour beaucoup de ses passagers, sans compter la mauvaise humeur de ses clients devant l’attente supplémentaire de quelques heures à Québec.

Malgré tout, sa décision est prise et il quitte la station d’information de vol satisfait. Il sait très bien que les lignes d’orage fort ont souvent causé des accidents et qu’un aéronef, si gros soit-il, se trouve toujours devant une issue incertaine quand il affronte un mur d’orages violents.

Les spécialistes en information de vol (FSS) sont heureux de voir ce pilote prendre la décision qui s’impose, car, au cours des années, le personnel FSS a souvent été témoin de comportements beaucoup moins avisés de la part de pilotes de toutes catégories. Le jugement est la capacité de considérer les conséquences et cela n’est pas donné à tout le monde.

Décollage d'un DC-9 d'Air Canada par beau temps
Décollage d’un DC-9 d’Air Canada par beau temps

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Histoires vécues comme spécialiste en information de vol (FSS): Québec FSS

Québec FSS et les évènements du 11 septembre 2001

Passage d'un des quatre F-18s au-dessus du Monument commémoratif de guerre du Canada à Ottawa, le 22 Octobre 2015
Passage d’un des quatre F-18s au-dessus du Monument commémoratif de guerre du Canada à Ottawa, le 22 Octobre 2015

Durant la crise reliée au 11 septembre 2001, le ciel canadien a, pour une courte période, appartenu aux militaires. Ces derniers avaient pris la décision que tout avion qui n’avait pas encore décollé devait demeurer au sol et que tout aéronef en vol devait atterrir au plus tôt.

Il y avait malgré tout des exceptions pour les évacuations médicales, mais ces exceptions étaient gérées très étroitement. Toutes les unités des services de la circulation aérienne communiquaient avec les aéronefs en vol et les agences au sol pour les informer des nouvelles règles, avec application immédiate.

De façon générale, malgré la surprise initiale, tous les pilotes avec qui les spécialistes en information de vol (FSS) de Transports Canada à Québec avaient communiqué sur leurs multiples fréquences avaient obéi sans opposer de résistance.

Je me souviens cependant d’un pilote de bimoteur, volant au-dessus des Laurentides, à qui cette obligation d’atterrir au plus tôt avait été transmise. Il s’était malgré tout obstiné à vouloir continuer ses vols prévus, car il n’était pas question pour lui de perdre des clients en cette journée où la météo était idéale.

Les spécialistes en information de vol pouvaient comprendre sa frustration. Cependant, l’heure n’était pas à la discussion. C’était, pour tous les services de la circulation aérienne, une journée « passablement occupée » et personne n’avait de temps alloué pour argumenter sur le bien-fondé de la demande.

Le message avait été passé une seconde fois. Devant son refus d’obéir, NORAD (North American Aerospace Defense Command) avait été avisé. La réponse vint rapidement et le pilote fut placé devant deux choix : il atterrissait ou alors un intercepteur CF -18 se chargerait de la situation.

Nul besoin d’ajouter quoi que ce soit d’autre. Le pilote nous indiqua rapidement son intention d’obéir.

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Histoires vécues comme spécialiste en information de vol (FSS): Iqaluit FSS

Iqaluit FSS et le DC-8 de Trans Ocean Airways

En 1989, Cam Lockerbie, du journal News North, raconte l’aventure de passagers pris pour rester plus longtemps que prévu à Iqaluit, au Canada, à cause d’une escale qui a mal tourné.

Un DC-8 de Trans Ocean Airlines faisant le trajet San Francisco – Grande-Bretagne s’arrête à Iqaluit, sur la Terre de Baffin, pour refaire le plein en carburant, mais connaît des problèmes avec le ravitaillement. L’avion ne pourra désormais décoller avant le lendemain et 220 passagers doivent donc se trouver un endroit pour coucher à Iqaluit.

Les efforts déployés pour accommoder tous ces gens sont importants, car les chambres d’hôtel libres sont nettement insuffisantes. Finalement, les passagers sont dispersés à travers la ville et même s’il n’y a pas suffisamment de lit pour chaque personne, il y a au moins un toit pour passer la nuit.

L'aile d'un DC-8 de Trans Ocean Airlines entre en contact avec un hangar à Iqaluit
L’aile d’un DC-8 de Trans Ocean Airlines entre en contact avec un hangar à Iqaluit

La pièce de rechange servant à réparer le DC-8 est livrée par jet nolisé directement des États-Unis. Lorsqu’elle est finalement installée, le DC-8 tente de circuler, mais rencontre un nouveau problème. L’aéronef doit tenter de se glisser entre un Lockheed L -1011 installé aux pompes et le hangar de Bradley Air Services. Un employé d’une compagnie aérienne est demandé pour se placer devant le DC-8 et le guider de façon à s’assurer qu’il n’y a aucun contact avec le L -1011 ou le hangar.

L’article du journal mentionne que l’aéronef n’était pas capable de circuler passé le hangar et qu’une portion du bout d’aile dut être enlevée. Ce que le journaliste ne dit pas, sûrement parce qu’il l’ignorait, est qu’il y eut contact entre la porte du hangar et le bout de l’aile, malgré la présence d’une personne au sol, comme le démontre la photo ci-dessus prise par le personnel FSS de la station d’information de vol de Transports Canada à Iqaluit.

Et lors du retour de l’Europe, le même DC-8 rencontra un problème d’alternateur et, n’eût été de l’habileté de l’ingénieur pour réparer le tout en moins de deux heures, les passagers auraient de nouveau couché à Iqaluit. Dans l’année qui suivit, la compagnie déclara faillite.

Lockheed L-1011 de American Trans Air devant la station d'information de vol d'Iqaluit en 1989
Lockheed L-1011 de American Trans Air devant la station d’information de vol d’Iqaluit en 1989
B-737 de Canadian Airlines et HS-748 de Firstair à Iqaluit en 1989
B-737 de Canadian Airlines et HS-748 de Firstair à Iqaluit en 1989

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Histoires vécues comme spécialiste en information de vol (FSS): Iqaluit FSS

Iqaluit FSS et les pilotes bien endormis

Avion de ligne et cumulonimbus
Avion de ligne et cumulonimbus

Au début des années ‘90,  alors que je suis en poste à la station d’information de vol de Transports Canada à Iqaluit et responsable des communications radio HF permettant le suivi des vols transocéaniques, je reçois un appel d’un contrôleur des services de la circulation aérienne qui me demande de tenter de rejoindre un gros porteur d’une compagnie internationale européenne.

Leurs pilotes ont passé 60 degrés Ouest sans communiquer avec l’Islande et il devient nécessaire de s’assurer que le temps de passage pour 70 degrés Ouest et l’altitude de l’aéronef sont toujours valides.

Je tente de communiquer avec l’équipage en utilisant tous les moyens à ma disposition, dont l’utilisation du système SELCAL, censé générer une alarme à bord de l’appareil. Rien n’y fait. D’autres aéronefs de grandes compagnies volant dans les parages sont mis à contribution, en tentant des appels sur les fréquences VHF d’urgence. Toujours aucune nouvelle.

Puis soudainement, environ une heure après que les pilotes auraient dû donner signe de vie, je reçois finalement une réponse à mes appels continus. J’annonce à l’équipage que tous les efforts ont été faits pour tenter de les rejoindre, mais sans succès. J’en profite pour leur demander immédiatement un rapport de position et une estimation pour le prochain point de compte-rendu obligatoire. D’une voix calme, le pilote me répond qu’il ne sait pas pourquoi je n’ai pas reçu ses appels et il prépare immédiatement un rapport de position en bonne et due forme.

Il est étrange qu’en cette journée où la réception HF est excellente, et où toutes les compagnies communiquent avec Iqaluit FSS sans aucun problème, cette compagnie aérienne ait pu maintenir le silence pour une période aussi longue.

Le rapport de position nous est transmis, et il devient évident qu’il s’agit de la plus pure improvisation. Si l’on en croit les données qui nous sont maintenant transmises, cet aéronef réussira à parcourir 400 miles nautiques dans les prochaines dix minutes. Ce qui équivaut à traverser une grande partie du Canada en une heure à peine.

J’avise le pilote de refaire ses calculs puisque visiblement il n’a aucune idée de l’endroit où il se trouve. Il me revient avec de nouveaux chiffres, tout à fait différents, et qui fonctionnent cette fois.

Je devine désormais que dans la tranquillité de ce vol transatlantique, le sommeil a gagné l’équipage et le pilote automatique s’est chargé de garder l’avion en vol pendant que l’équipage roupillait. Réveillés éventuellement par les multiples appels, l’équipage n’a pas tenu compte du déplacement de l’aéronef pendant cette heure où les pilotes dormaient et, soucieux de ne pas se faire prendre en défaut, a transmis rapidement des calculs totalement erronés.

L’histoire se termine tout de même de belle façon, puisque l’équipage, désormais reposé, a par la suite fourni les informations exactes lors des rapports de position subséquents, permettant de continuer le vol de façon sécuritaire jusqu’à la destination.

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Histoires vécues comme spécialiste en information de vol (FSS): Iqaluit FSS

Iqaluit FSS et le DC-8 surchargé

DC-8-63F de Trans Ocean N794AL à Iqaluit en 1989
DC-8-63F de Trans Ocean N794AL à Iqaluit en 1989

Une journée d’été de 1989, un DC-8-63F est décollé de l’aéroport d’Iqaluit, au Nunavut, sur la piste 36, en direction de Los Angeles. De façon à faire le vol sans escale, les réservoirs de l’aéronef  avaient été remplis au maximum. Le poids combiné du carburant, des passagers et du cargo nécessitèrent une course au sol extrêmement longue avant que les roues ne quittent le sol.

De notre point de vue à partir de la tour de la station d’information de vol (FSS) de Transports Canada à Iqaluit, il nous sembla que le pilote avait attendu à la dernière minute avant de tirer sur le manche pour commencer l’ascension. Et même une fois en vol, l’avion volait de façon horizontale, très près du sol au-dessus d’un terrain peu accidenté de façon à profiter de l’effet de sol.

Cependant, à quelques kilomètres du seuil de la piste 18, le terrain s’élevait suffisamment pour forcer un pilote à établir un taux de montée positif. Le pilote fit donc monter légèrement le DC-8, mais en évitant encore tout virage pour profiter d’un maximum de portance.

Avec des jumelles, nous le regardions s’éloigner et il y a longtemps que l’avion aurait dû effectuer un virage vers la gauche. Lorsque cela fût finalement tenté, l’avion commença à s’enfoncer et à perdre l’altitude gagnée précédemment. Nous pouvions suivre les changements d’altitude en observant les longues traînées noires occasionnées par le carburant brûlé.

Constatant sa descente, le pilote avait remis l’appareil en vol rectiligne. Finalement, un autre virage de cinq ou dix degrés fût tenté puis l’avion commença à monter très légèrement. Ce fut certainement un décollage à la limite des capacités de l’appareil.

C’était la première fois que nous considérions appuyer sur le bouton rouge servant à signaler une urgence majeure auprès des unités d’intervention de l’aéroport. Mais cela n’aurait pas été très utile, car bien peu d’aide aurait été apportée dans un délai suffisamment rapide, considérant la position de l’aéronef, son énorme chargement en carburant et l’absence totale de routes dans cette région isolée.

N795AL DC-8-63 Trans Ocean airborne runway 18 in Iqaluit in 1990
N795AL DC-8-63 Trans Ocean airborne runway 18 in Iqaluit in 1990
C-GMXD DC-8-61 de Nationair à Iqaluit en 1989
C-GMXD DC-8-61 de Nationair à Iqaluit en 1989

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Histoires vécues comme spécialiste en information de vol (FSS): Iqaluit FSS

Le sultan de Brunei s’arrête à Iqaluit, dans l’Arctique Canadien

L’aéroport d’Iqaluit constitue une escale populaire pour le ravitaillement de plusieurs types d’appareils à court ou moyen rayon d’action lorsque ceux-ci doivent survoler le Nunavut, dans l’Arctique Canadien. Sa piste de 8,600 pieds permet à n’importe quel type d’appareil d’atterrir. Des avions de la compagnie Airbus, dont le A380, le A350-XWB et le A330-200F y ont d’ailleurs été mis à l’épreuve durant plusieurs jours lors de tests en condition de froid extrême.

Airbus A330-200F arrivant à Iqaluit pour des tests lors de froid extrême. (PHOTO par CHRIS WINDEYER)
Airbus A330-200F arrivant à Iqaluit pour des tests lors de froid extrême. (PHOTO par CHRIS WINDEYER)

Des acteurs bien connus, des princes et princesses (dont des membres de la monarchie Britannique) et plusieurs personnalités politiques s’y sont arrêtés au cours des années. Même Nelson Mandela y est passé lors d’une escale en provenance des États-Unis.

Elder Alacie Joamie and Prince Albert II of Monaco in Iqaluit in 2012
Elder Alacie Joamie and Prince Albert II of Monaco in Iqaluit in 2012

Vers 1989-1990, le sultan de Brunei et sa suite se sont eux aussi arrêtés à Iqaluit. Le personnel FSS de la station d’information de vol de Transports Canada à Iqaluit a été surpris de constater qu’un Boeing 727 n’était pas suffisant pour accommoder le souverain. En effet, deux autres jets privés de type Gulfstream précédaient l’arrivée du B-727.

Une fois les trois aéronefs stationnés sur le tarmac, la porte avant du Boeing B727 s’est ouverte, un grand tapis rouge a été déroulé sur le sol, à partir de l’escalier de l’avion. Deux femmes sont sorties du Boeing et ont balayé le tapis sur toute sa longueur puis, quelques minutes plus tard, le monarque est sorti prendre l’air frais du Grand Nord.

En moins d’une heure, le ravitaillement étant complété, tout ce beau monde est reparti sans plus attendre. C’était la première fois que j’étais témoin d’un tel déploiement de ressources pour transporter un souverain.

Mais je n’avais encore rien vu. Quelques années plus tard, j’étais transféré à la station d’information de vol de Québec, qui deviendrait plus tard le Centre d’information de vol de Québec, sous Nav Canada. Là, j’ai pu témoigner, en compagnie d’autres employés des services de la circulation aérienne, de la frénésie entourant l’arrivée du Président des États-Unis, Georges W. Bush, pour le Sommet des Amériques de 2001. Sans commune mesure…

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Des pilotes surpris par le froid extrême d’Iqaluit.

Les spécialistes en information de vol (FSS) de Transports Canada à Iqaluit ont parfois été étonnés par le type de vêtements portés par les pilotes chargés de convoyer des aéronefs de l’Europe vers l’Amérique.

Le plan de vol, pour les aéronefs de petite et moyenne taille, comportait fréquemment un arrêt par Iqaluit, au Nunavut, car un ravitaillement était nécessaire. Il aurait été raisonnable de croire que les pilotes se prépareraient pour les situations imprévues et prendraient de l’information sur les conditions météorologiques parfois extrêmes qu’ils devraient rencontrer au moment des différentes escales vers l’Amérique.

Pourtant, le personnel FSS a pu observer à de nombreuses reprises de petits avions à réaction connaître des problèmes majeurs lors du ravitaillement sous des températures très froides. Pendant que les réservoirs se remplissaient, les pneus s’aplatissaient progressivement sous le froid extrême et l’augmentation de la charge.

D-AHLO B737-4K5 de Hapag Lloyd lors de son vol de livraison en 1989, de Boeing Field (KBFI) à Iqaluit, et par la suite vers l'Allemagne. Il est ravitaillé lors de conditions météorologiques difficiles. Ce type d’appareil ne connaissait pas de problèmes, mais ce n’était pas le cas des avions à réaction plus petits.
D-AHLO B737-4K5 de Hapag Lloyd lors de son vol de livraison en 1989, de Boeing Field (KBFI) à Iqaluit, et par la suite vers l’Allemagne. Il est ravitaillé lors de conditions météorologiques difficiles. Ce type d’appareil ne connaissait pas de problèmes, mais ce n’était pas le cas des avions à réaction plus petits.

Un petit délai dans les opérations et les moteurs ne démarraient plus. Les pilotes sortaient alors de l’appareil, vêtus d’une petite veste de cuir et de souliers d’été. Essayant de se protéger le mieux possible du froid mordant, ils gesticulaient en discutant avec un préposé au carburant qui lui, était bien emmitouflé dans d’épais vêtements conçus pour le froid de l’Arctique et le protégeant de la tête aux pieds.

Une mince veste de cuir et des souliers d’été étaient certainement satisfaisants pour le sud de l’Europe, mais loin d’être appropriés sur le tarmac d’un aéroport où le coefficient de refroidissement oscillait fréquemment entre -50 C et -65 C. L’avion devait parfois être remorqué vers un hangar pour être réchauffé pendant des heures, sinon durant toute la nuit, et les frais de transit augmentaient de façon exponentielle.

J’imagine que tout pilote qui a vécu une expérience semblable s’en souvient aujourd’hui aussi clairement que le personnel FSS, mais pas pour les mêmes raisons. Et il y a fort à parier que lors d’un second voyage, la préparation était cette fois impeccable.

Le paysage autour d'Iqaluit, par une belle journée, lorsqu’il y a encore de la glace dans la Baie. Les tons de bleu sont absolument magnifiques.
Le paysage autour d’Iqaluit, par une belle journée, lorsqu’il y a encore de la glace dans la Baie. Les tons de bleu sont absolument magnifiques.

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Iqaluit FSS et la guerre du Golfe Persique

Markair L-382 en escale à Iqaluit en 1990
Markair L-382 en escale à Iqaluit en 1990

En août 1990, l’Irak envahit le Koweït. Cette invasion est unanimement dénoncée, même par les pays traditionnellement alignés avec l’Irak. L’ONU réagit en donnant à l’Irak jusqu’au 15 janvier 1991 pour se retirer. Cependant, le ton utilisé par Saddam Hussein laisse clairement entendre, dès le début du conflit, qu’il n’y aura pas de retrait et qu’il entend intégrer le Koweït au territoire irakien.

Comprenant que la force sera de toute évidence nécessaire, les États-Unis (représentant une coalition de 34 pays) se préparent immédiatement au conflit. Les mouvements d’aéronefs s’accentuent et certains appareils militaires qui devront traverser l’Atlantique s’arrêtent inévitablement à Iqaluit, sur la terre de Baffin, pour le ravitaillement en carburant, pour ensuite passer par le Groenland, l’Islande, l’Europe et terminer leur voyage au Moyen-Orient.

OV-10 Broncos en escale à Iqaluit en 1990 et à destination du Golfe Persique.
OV-10 Broncos en escale à Iqaluit en 1990 et à destination du Golfe Persique.

Dès l’été 1990, Iqaluit devient donc un des points de passage obligé pour la traversée de différents aéronefs militaires vers l’Europe à partir des États-Unis et du Canada. Ainsi dans notre paysage nordique arrivent des L382 pour le transport de matériel volumineux et des OV-10 Bronco peints couleur désert. Un peu plus tard à l’automne atterrissent d’autres aéronefs à usage spécialisé, tels que des RU-21 Guardrail Common Sensor.

RU-21 Guardrail Common Sensor en escale à Iqaluit en 1990, à destination du Golfe Persique
RU-21 Guardrail Common Sensor en escale à Iqaluit en 1990, à destination du Golfe Persique

Iqaluit reçoit également la visite d’un L-382 de la Southern Air Transport, une compagnie parfois utilisée par la CIA pour ses déplacements.

Southern Air Transport L-382 N908SJ en escale à Iqaluit en 1990
Southern Air Transport L-382 N908SJ en escale à Iqaluit en 1990

Dès qu’un FSS termine avec les communications radio, il se dirige vers le comptoir de briefing pour recevoir les pilotes militaires venus chercher toutes les informations météo et de planification de vol qui seront nécessaires pour une traversée sécuritaire de l’Atlantique.

Les fréquences HF de la station d’information de vol d’Iqaluit ne dérougissent pas, car en plus des contacts normaux associés aux aéronefs commerciaux traversant l’Atlantique s’ajoutent désormais des contacts avec les C5 Galaxy traversant vers l’Europe. Dans les deux semaines précédant la fin de l’ultimatum de l’ONU, soit entre le 1 et le 15 janvier 1991, la station d’information de vol d’Iqaluit enregistre, par rapport à la même période en 1990, une augmentation de 266 % du trafic océanique transitant sur son aéroport. Les vols sont reliés à des avions à réaction d’affaires privés ou nolisés des grandes banques, des compagnies pétrolières et des organismes militaires plaçant leurs billes en attente des développements à venir. Nous recevons, entre autres, des aéronefs de type G1, G2, G3, G4, HS25, DA50, DA90, CL60, C550, LR25 et B-727.

Occidental Petroleum B-727 N10XY en escale à Iqaluit en 1990, en provenance d'Europe
Occidental Petroleum B-727 N10XY en escale à Iqaluit en 1990, en provenance d’Europe

Et une bonne nuit de janvier 1991, alors que nous sommes au travail, mon confrère m’annonce calmement, en enlevant son casque d’écoute : « Son, the war has started! ». Ce fut une période assez particulière dont je me souviendrai, du fait que notre formation n’était pas militaire, mais que nous avons pu vivre pendant une courte période certains des préparatifs et des mouvements d’aéronefs relatifs à un conflit d’envergure.

De plus, pour une courte période, Iqaluit retrouvait essentiellement ce pour quoi le site avait été créé en 1942, lors de la Deuxième Guerre mondiale, c’est-à-dire une base destinée à des opérations militaires au service d’avions transitant vers l’Europe.

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Demande d’asile politique de deux Polonais à Iqaluit

(Histoire précédente : la dame qui se fait voler son sac à main sous mes yeux)

Un DC-8-71 de la Trans Ocean Airways et un Boeing B-727 de la compagnie Sterling à Iqaluit (1989). Vue à partir de la station d'information de vol d'Iqaluit
Un DC-8-71 de la Trans Ocean Airways et un Boeing B-727 de la compagnie Sterling à Iqaluit (1989). Vue à partir de la station d’information de vol d’Iqaluit

Une nuit d’automne 1989, à Iqaluit, dans le Nunavut, un Boeing 727 de la compagnie aérienne Sterling est stationné sur le tarmac pour une courte escale, histoire de refaire le plein. De la tour de la station d’information de vol (FSS) de Transports Canada, nous pouvons apercevoir les véhicules des douanes du Canada et de la GRC stationnés près de l’aéronef, ce qui est inhabituel. Il y a une certaine agitation près de la porte arrière du 727, car plusieurs personnes circulent d’un véhicule à l’autre et semblent faire face à un imprévu. L’escale se prolonge.

Dans les jours qui suivent, soit le 2 octobre 1989, le Journal de Montréal publie l’article suivant : « Deux Polonais, qui avaient prévu de faire défection à Terre-Neuve lors d’une escale technique de leur avion assurant la liaison Gdansk-Vancouver, ont eu la surprise samedi d’apprendre par les autorités canadiennes que l’appareil avait atterri dans le Grand Nord canadien ».

« Les deux hommes, dont l’identité n’a pas été révélée, ont quand même demandé l’asile politique, a affirmé un responsable de la Gendarmerie Royale du Canada (GRC) à la station d’Iqaluit, sur l’île de Baffin, dans l’Arctique. Les Polonais, qui devaient se rendre à Vancouver, sur la côte du Pacifique, pour relayer des marins d’une flottille de pêche, se croyaient à St John’ s, la capitale de Terre-Neuve, a indiqué le responsable, le caporal Gary Asels ».

« L’officier de douane leur a montré sur une carte l’emplacement d’Iqaluit (à 2100 kilomètres au nord de Montréal). Ils s’en fichaient éperdument, l’important, pour eux, c’était d’être au Canada. Ils étaient très heureux d’être ici, a commenté le caporal Asels ».

On m’a rapporté que de façon à réussir leur sortie de l’avion, les deux Polonais avaient choisi un siège situé près de la passerelle arrière du Boeing 727. Ils ont fait semblant de dormir et quand l’escalier a été abaissé et que la surveillance a été diminuée pour un court instant, ils en ont profité pour emprunter rapidement la passerelle et se sont retrouvés sur le sol canadien.

Je ne peux malheureusement pas confirmer aujourd’hui s’ils ont finalement été reçus citoyens canadiens ou s’ils ont dû retourner dans leur pays d’origine.

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Deux commandants de bord forcés de retarder leur décollage à Iqaluit

(Histoire précédente : l’exercice militaire « Amalgam Chief » : des bombardiers B-52 dans les nord du Canada)

Aer Lingus Boeing B-737 en finale pour Iqaluit (1989)
Aer Lingus Boeing B-737 en finale pour Iqaluit (1989)

L’histoire se situe à Iqaluit, au Nunavut, durant une journée d’hiver de 1990 où la météo est vraiment mauvaise, mais où il est encore possible d’effectuer un décollage. Deux compagnies respectivement propriétaires d’un Boeing 727 et 737 viennent de terminer l’embarquement des passagers en prévision d’un décollage qui doit avoir lieu dans les prochaines minutes. Mais dans l’intervalle, les conditions météo empirent et l’aéroport se retrouve finalement dans une situation où les aéronefs doivent attendre que la visibilité s’améliore.

Les avions sont donc prêts, les moteurs chauffent et pourtant les pilotes ne peuvent décoller. La pression monte et finalement les pilotes décident qu’ils tentent leur chance pour un décollage dans cette météo pourrie. Notre devoir, en tant que spécialistes en information de vol (FSS), est d’aviser les deux commandants de bord que s’ils tentent un décollage dans les conditions actuelles, qui sont sous les minimums légaux, des rapports d’infraction seront déposés contre eux.

Vue à partir de la tour d'information de vol d'Iqaluit FSS: un Boeing B-727 de First Air de même qu'un Boeing B-737 de Canadian Airlines
Vue à partir de la tour d’information de vol d’Iqaluit FSS: un Boeing B-727 de First Air de même qu’un Boeing B-737 de Canadian Airlines
Vue à partir de la tour de la station d'information de vol d'Iqaluit: on peut apercevoir un Boeing B-727 de la compagnie Evergreen International (1989)
Vue à partir de la tour de la station d’information de vol d’Iqaluit: on peut apercevoir un Boeing B-727 de la compagnie Evergreen International (1989)

Nous recevons naturellement une réponse à la mesure de leur impatience, et devant ces mauvaises conditions météo qui persistent et la menace d’une infraction potentielle, les deux commandants de bord doivent se résoudre à reporter le décollage.

Dans leur impatience à vouloir compléter le vol, ces commandants négligeaient qu’il existe toujours la possibilité d’une panne de moteur ou autre urgence majeure au décollage. En cas de panne d’un moteur juste après le décollage et dans l’impossibilité de revenir à Iqaluit à cause de la mauvaise météo, l’avion aurait été forcé de franchir une très grande distance avec un moteur en moins pour se rendre à un aéroport de dégagement, augmentant les risques pour la sécurité des passagers.

La menace d’une infraction potentielle, qui a toujours été la prérogative des services de la circulation aérienne, a pour effet d’obliger les pilotes à attendre pour des conditions météo appropriées.

Un Boeing B-737 de NWT Air sur la voie de circulation et un Twin Otter de Bradley Air Services en courte finale pour la piste 36 à Iqaluit (1989)
Un Boeing B-737 de NWT Air sur la voie de circulation et un Twin Otter de Bradley Air Services en courte finale pour la piste 36 à Iqaluit (1989)
La tour de la station d'information de vol d'Iqaluit, avec en avant-plan un Boeing B-727 de First Air à l'atterrissage piste 36 (1990)
La tour de la station d’information de vol d’Iqaluit, avec en avant-plan un Boeing B-727 de First Air à l’atterrissage piste 36 (1990)
Un Boeing B-737 d'Air UK G-UKLB arrive à Iqaluit (vers 1989)
Un Boeing B-737 d’Air UK G-UKLB arrive à Iqaluit (vers 1989)
Un Boeing B-737 tout neuf de la compagnie Hapag-LLoyd (D-AHLL) vient d'arriver de Boeing Field à Seattle. Il se dirige ensuite vers l'Allemagne
Un Boeing B-737 tout neuf de la compagnie Hapag-LLoyd (D-AHLL) vient d’arriver de Boeing Field à Seattle. Il se dirige ensuite vers l’Allemagne.

(Prochaine histoire : la dame qui se fait voler son sac à main sous mes yeux)

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