(Histoire précédente : les deux commandants de bord forcés de retarder leur décollage à Iqaluit)
Iqaluit, Nunavut 1990. Un jour où je sors à l’extérieur pour faire une promenade, une jeune femme Inuite me crie de rattraper un individu, également Inuit, qui vient de lui voler son sac à main. Une telle demande venant d’une citoyenne d’une grande ville ne m’aurait pas surpris, mais il était très improbable pour moi de ne jamais entendre cela dans une petite ville de l’Arctique comme Iqaluit. Je crois donc immédiatement à une farce avec caméra cachée, mais lorsque je me retourne, je vois le type courir au loin avec quelque chose dans les mains.
Je tente alors de rattraper l’individu et comme je me rapproche progressivement, le fugitif sait qu’il a un choix à faire : soit il ralentit et je le rattrape, soit il maintient sa vitesse en descendant une pente escarpée formée de gros blocs de roches aux arêtes pointues. Il choisit la seconde option et entame sa descente en sautant d’une roche à l’autre, perd pied, et se heurte la tête contre les roches lors de sa chute.
Toujours étendu à travers les roches et le visage ensanglanté, il me voit arriver à sa hauteur. Je lui demande alors le sac, mais il refuse d’obtempérer. Il s’attend probablement à ce que je le frappe, mais je ne suis pas là pour jouer les matamores ou faire justice moi-même. J’attends donc un peu qu’il se calme et lui demande de nouveau de me donner le sac. Il accepte finalement.
L’homme se relève sans trop noter le sang qu’il a sur le visage. Sans dire un mot, il me suit à une distance d’environ deux mètres alors que je remonte lentement la pente pour rejoindre la dame qui nous attend tout en haut. En jetant un rapide coup d’œil, je m’assure qu’il n’a pas dissimulé un couteau ou une autre arme dans ses mains.
Arrivé en haut, je remets le sac à main à la dame. Lorsque le voleur arrive à notre hauteur, la jeune femme commence à l’engueuler, profitant de ma présence au cas où celui-ci voudrait la frapper. J’aurais pu me passer de cette étape, maintenant que le calme est revenu.
Quand la « discussion » est terminée entre elle et l’individu, ce dernier tente de s’approcher de moi. Je m’assure de le tenir à l’écart d’au moins une longueur de bras pour éviter un coup vicieux. Il est assez incompréhensible qu’après un incident de ce genre, un voleur décide d’accompagner la victime et le poursuivant, comme si rien ne s’était passé. Il me dit simplement : « You run fast, like Ben Johnson! ».
Finalement, après une courte marche, nous arrivons tous les trois à notre point de départ et le tout se termine aussi subitement que cela avait commencé. La jeune femme décide qu’elle ne portera pas plainte auprès à la police. Elle me remercie et s’en va de son côté, le voleur s’en retourne au bar d’où il était venu, et je reprends ma marche dans le calme légendaire d’Iqaluit, histoire de prendre l’air avant le prochain quart de travail à la station d’information de vol de Transports Canada à Iqaluit.
(Prochaine histoire : demande d’asile politique de deux Polonais à Iqaluit)
(Histoire précédente : l’exercice militaire « Amalgam Chief » : des bombardiers B-52 dans les nord du Canada)
L’histoire se situe à Iqaluit, au Nunavut, durant une journée d’hiver de 1990 où la météo est vraiment mauvaise, mais où il est encore possible d’effectuer un décollage. Deux compagnies respectivement propriétaires d’un Boeing 727 et 737 viennent de terminer l’embarquement des passagers en prévision d’un décollage qui doit avoir lieu dans les prochaines minutes. Mais dans l’intervalle, les conditions météo empirent et l’aéroport se retrouve finalement dans une situation où les aéronefs doivent attendre que la visibilité s’améliore.
Les avions sont donc prêts, les moteurs chauffent et pourtant les pilotes ne peuvent décoller. La pression monte et finalement les pilotes décident qu’ils tentent leur chance pour un décollage dans cette météo pourrie. Notre devoir, en tant que spécialistes en information de vol (FSS), est d’aviser les deux commandants de bord que s’ils tentent un décollage dans les conditions actuelles, qui sont sous les minimums légaux, des rapports d’infraction seront déposés contre eux.
Nous recevons naturellement une réponse à la mesure de leur impatience, et devant ces mauvaises conditions météo qui persistent et la menace d’une infraction potentielle, les deux commandants de bord doivent se résoudre à reporter le décollage.
Dans leur impatience à vouloir compléter le vol, ces commandants négligeaient qu’il existe toujours la possibilité d’une panne de moteur ou autre urgence majeure au décollage. En cas de panne d’un moteur juste après le décollage et dans l’impossibilité de revenir à Iqaluit à cause de la mauvaise météo, l’avion aurait été forcé de franchir une très grande distance avec un moteur en moins pour se rendre à un aéroport de dégagement, augmentant les risques pour la sécurité des passagers.
La menace d’une infraction potentielle, qui a toujours été la prérogative des services de la circulation aérienne, a pour effet d’obliger les pilotes à attendre pour des conditions météo appropriées.
(Prochaine histoire : la dame qui se fait voler son sac à main sous mes yeux)
(Histoire précédente : Iqaluit et l’ancienne base militaire américaine)
En octobre 1989, Stacey Campbell écrit un article dans le News North qu’elle intitule : « Military Jets Fill the Arctic Skies ». Elle explique que NORAD (North American Air Defence) doit régulièrement tenir des exercices visant à vérifier la capacité du nouveau système de défense radar du Canada à déceler des ennemis potentiels en provenance du Nord.
L’officier militaire interviewé par Stacey l’informe que l’exercice comprend, entre autres, des avions de combat CF-18, des avions ravitailleurs et des bombardiers B -52. Les CF-18 sont temporairement basés à Iqaluit, au Nunavut, et Inuvik, le temps de l’exercice. D’autres types d’appareils sont également impliqués dans cet exercice annuel, comme le F-15 Eagle, le bon vieux T-33 et possiblement l’AWAC, mais ce dernier n’est pas atterri à Iqaluit.
Les spécialistes en information de vol (FSS) de Transports Canada à Iqaluit doivent composer avec la cédule serrée fournie par l’officier militaire, tout en intégrant dans la planification les départs et arrivées des aéronefs privés et commerciaux.
À l’époque, la voie de circulation la plus utile, celle qui se situe près de la fin de la piste 35, ne peut être utilisée du fait que le terrain est trop mou. Tous les avions qui atterrissent sur la piste 35 doivent ensuite circuler à rebours sur cette piste avant que celle-ci ne soit complètement dégagée pour les prochains atterrissages et décollages. Les délais requis lors de cette procédure donnent parfois des maux de tête à l’officier militaire assis près de nous.
Je me souviens que l’officier militaire responsable de la mission nous avait dit : « Si les avions ne peuvent décoller d’ici une minute, la mission est annulée. » Le hasard avait fait que durant la fenêtre très réduite où les CF-18 devaient décoller cette journée-là, il y avait beaucoup d’autres aéronefs de type commercial ou exécutif en opération à Iqaluit. Nous devions composer avec les Avro 748, Twin Otter, Boeing 727 et 737, de même qu’avec des jets exécutifs en provenance de l’Atlantique. Il y avait toujours un moyen d’arriver à un résultat satisfaisant pour tous et les exercices se terminaient de la façon souhaitée.
Ce fut une période que tout le personnel appréciait, car pour une semaine durant l’année, les opérations changeaient radicalement : il fallait respecter les besoins impératifs reliés à l’exercice militaire tout en fournissant les services réguliers à la circulation aérienne.
Nous savons, pour avoir discuté avec des membres d’équipage ayant pris part à l’exercice, que les forces militaires ont été assez aimables pour remettre au personnel, via notre gestionnaire, des affiches couleur autographiées par les pilotes des différents escadrons impliqués dans « Amalgam Chief ». Même si le gestionnaire de Transports Canada n’a jamais cru bon de nous montrer ne serait-ce qu’une seule de ces affiches, j’ai apprécié cette attention de la part des pilotes.
(Prochaine histoire : deux commandants de bord forcés de retarder leur décollage à Iqaluit)
(Histoire précédente : le transport d’un .357 Magnum vers Iqaluit)
Avant de raconter quelques-uns des événements s’étant produits lorsque je travaillais à la station d’information de vol de Transports Canada à Iqaluit (Iqaluit FSS) entre 1989 et 1991, il est nécessaire de présenter quelques dates importantes qui permettront au lecteur de comprendre pourquoi l’aéroport était initialement un aéroport militaire.
1938. Les ambitions d’Hitler sont suffisamment claires pour que Roosevelt juge nécessaire de mentionner ce qui suit : « I give you assurance that the people of the United States will not stand idly by if domination of Canadian soil is threatened by any other empire ».
1939. Les discussions débutent entre le Canada et les États-Unis concernant la défense conjointe du continent nord-américain.
1940. La Grande-Bretagne risque la défaite contre une Allemagne qui progresse à grands pas dans sa conquête du territoire européen. Lorsque le Danemark est vaincu à l’automne 1940, la crainte s’accroit que les Allemands progressent vers l’ouest en établissant des bases militaires opérationnelles sur le territoire des pays récemment vaincus.
Le Groenland appartenant à un Danemark vaincu, les Allemands vont désormais se l’approprier et ainsi se rapprocher du Canada. À l’époque, le Groenland était la seule source d’approvisionnement commercial de cryolite, un composant essentiel de l’aluminium utilisé dans la fabrication des avions.
Il y a également une province qui ne fait pas partie du Canada en 1940 et qui constitue un endroit stratégique à partir duquel l’ennemi peut mener sa guerre contre le Canada et les États-Unis : Terre-Neuve et Labrador.
De façon à ce que le conflit ne se transporte pas directement sur le territoire nord-américain, il faut tenir les Allemands occupés en Europe : il faudra donc les empêcher de vaincre la Grande-Bretagne.
1941. Les navires transportant des avions de combat à court rayon d’action de l’Amérique vers l’Europe sont régulièrement attaqués et coulés par les U-boats. Il est devenu impératif de modifier la route. Les Canadiens et Américains recherchent les meilleurs emplacements pour la création de pistes d’atterrissage permettant aux aéronefs militaires à court rayon d’action de voyager par les airs jusqu’à Prestwick en Écosse.
Cette nouvelle route aura pour nom « Crimson Route » et les étapes choisies seront : Goose Bay, au Labrador, Fort Chimo (Kuujjuaq) au Québec, Frobisher Bay (Iqaluit) dans le Nunavut, de même que trois sites au Groenland (Narsarsuaq, Angmagssalik et Sondre Stromfjord (Kangerlussuaq). Le nom de code d’Iqaluit devient la base « Crystal Two ».
1941-42. Les Allemands établissent les premières bases météo habitées sur la côte est du Groenland, de façon à faciliter les opérations de leur flotte de U-boats opérant dans l’Atlantique Nord. Lorsqu’elles sont découvertes, ces bases sont détruites par des commandos américains.
1942. Les U-boats empruntent le fleuve St-Laurent et coulent des bateaux canadiens.
1942. L’endroit initialement choisi pour établir l’aéroport de Frobisher Bay [la base Crystal Two] était Cromwell Island, située environ à 20 miles au sud-ouest de l’emplacement actuel d’Iqaluit, jusqu’à ce que l’on découvre le site actuel d’Iqaluit, qui permettait la construction de pistes plus longues de même que l’arrivée de bateaux à fond plat chargées de matériaux durant la période estivale.
Un convoi de navires transportant des milliers de tonnes de matériel servant à la construction de la base à Frobisher Bay arrive à destination. Ce convoi est cependant attaqué par le U-boat U517 et le navire-cargo Chatham, transportant 6000 tonnes de matériel destiné aux bases Crystal One et Crystal Two est coulé.
1943. Une station météo allemande inhabitée est construite à Martin Bay au Labrador pour faciliter les opérations des U-boats. Cette station météo est maintenant exposée au musée de la guerre à Ottawa. Des photos ont été retrouvées où l’on peut voir un équipage allemand souriant mais armé, posant fièrement près de la station météo automatique. Le Canada n’a eu connaissance de l’existence de cette station qu’en 1980.
Plusieurs officiers et soldats capturés en Europe ont été envoyés outremer en attendant la fin de la guerre. Mes grands-parents, qui étaient propriétaires d’une ferme à St-Ignace au Québec, ont ainsi accueilli successivement un officier et deux soldats allemands. Mon grand-père n’a eu que de bons commentaires sur leur comportement et leur désire d’aider sur la ferme.
1943. Les deux pistes de Frobisher Bay sont maintenant opérationnelles, sans toutefois être tout à fait terminées. Cependant, les ingénieurs ne possèdent pas les connaissances des Russes quant au maintien de pistes d’atterrissage dans l’Arctique. Les dommages causés par le pergélisol sont importants et les pistes exigent beaucoup d’entretien. De l’eau s’écoulant sous la surface de la piste et faisant soudainement surface cause parfois des trous pouvant aller jusqu’à cinq mètres de profond. Ces pistes nécessitent un effort constant pour demeurer utilisables.
La première piste à être construite sera éventuellement abandonnée dû à une mauvaise évaluation des vents dominants et des dangers associés au relief environnant. Il ne reste que la piste que l’on connaît aujourd’hui, mais qui a tout de même été rallongée à 9000 pieds. L’année 1943 enregistre 323 arrivées d’aéronefs, mais un petit nombre seulement fait le trajet jusqu’en Europe.
1944. La guerre prend un nouveau tournant. L’avènement des radars longue portée et d’une technologie avancée visant la détection et l’attaque des sous-marins font en sorte que la menace posée par les U-boats dans l’Atlantique Nord diminue radicalement. Le but visé par la création des aéroports de la « Crimson Route » n’a plus sa raison d’être. Le gouvernement canadien, inquiet de la présence importante des Américains dans l’arctique Canadien, achète les aéroports de cette route au gouvernement américain.
1950. Les Canadiens prennent officiellement le contrôle de l’aéroport de Frobisher Bay, mais autorisent cependant une présence américaine, cet aéroport ayant maintenant une valeur stratégique dans la guerre froide qui a succédé à la fin de la Deuxième Guerre mondiale. La station météo et l’entretien de la piste sont assurés par les forces américaines.
1951-53. Construction d’une station radar sur une colline au nord-est de la piste 17-35. Cette station complète ce qu’il est convenu de nommer la ligne Pinetree. La ligne Pinetree est formée de nombreuses stations radars de surveillance à longue portée; elle couvre tout le sud du Canada et bifurque graduellement vers le nord pour se terminer à Frobisher Bay. Toutes ces stations sont habitées et peuvent ordonner des interceptions à tout moment contre les forces ennemies potentielles, au moyen d’avions à réaction.
1955. Les Américains construisent une station de communication juste à côté de la station radar. Son nom de code est « Polevault » et elle est chargée d’être le lien de communication entre le sud et les opérations visant à la construction de la nouvelle ligne Dew à travers le nord du Canada.
Un militaire canadien-français du Québec à l’oeuvre à Frobisher Bay
Mon oncle Gaston Gagnon, décédé en 2016, faisait partie des militaires canadiens francophones qui ont été en poste à Frobisher Bay.Il s’était engagé en tant que volontaire au moment de la Seconde Guerre Mondiale.
Il oeuvrait dans le domaine des communications durant la guerre froide et, en 2016, j’ai reçu quelques photos prises en 1955 à Frobisher Bay. Elles témoignent également de la présence américaine durant cette période.
1956. Les Américains obtiennent la permission du Canada de construire une base SAC [Strategic Air Command] pour y baser des avions ravitailleurs KC -97 pouvant supporter l’utilisation de bombardiers B -47 utilisant l’arme atomique. La base est construite en 1958 et jusqu’à la cessation des opérations en 1963, au moins sept KC-97 y étaient stationnés en permanence. La création des bombardiers B-52 et des KC-135 rendirent inutiles les opérations de la base SAC.
1960. La piste passe de 6000 à 9000 pieds.
1961. La station radar de la ligne Pinetree est fermée, mais la station Polevault demeure en opération.
1963. Les Américains quittent Frobisher Bay et délèguent le contrôle de la station « Polevault » au DOT [Department of Transport] du Canada, l’ancienne appellation de Transports Canada.
1964. L’opérateur radio, et plus tard spécialiste en information de vol (FSS) pour Transports Canada, Georges McDougall, débarque à Frobisher Bay. Tous les habitants du village en viennent à connaître Georges car il y travaillera pendant au moins trente-sept années, et ce sept jours par semaine, sur une rotation de quarts de travail. Il deviendra progressivement le témoin privilégié de tous les événements d’importance s’étant déroulés autant dans la ville qu’à cet aéroport de la Terre de Baffin.
Ci-dessous, une photo des anciennes installations du DOT.
1987. Le nom de Frobisher Bay est changé pour Iqaluit.
1989. Stacey Campbell écrit un article dans le News North qu’elle intitule : « Military Jets Fill the Arctic Skies ». Elle explique que NORAD (North American Air Defence) doit régulièrement tenir des exercices visant à vérifier la capacité du nouveau système de défense radar du Canada à déceler des ennemis potentiels en provenance du Nord.
L’officier militaire interviewé par Stacey l’informe que l’exercice comprend, entre autres, des avions de combat CF-18, des avions ravitailleurs et des bombardiers B -52. Les CF-18 sont temporairement basés à Iqaluit, au Nunavut, et Inuvik, le temps de l’exercice. D’autres types d’appareils sont également impliqués dans cet exercice annuel, comme le F-15 Eagle, le bon vieux T-33 et possiblement l’AWAC, mais ce dernier n’est pas atterri à Iqaluit.
Les spécialistes en information de vol (FSS) de Transports Canada à Iqaluit doivent composer avec la cédule serrée fournie par l’officier militaire, tout en intégrant dans la planification les départs et arrivées des aéronefs privés et commerciaux.
À l’époque, la voie de circulation la plus utile, celle qui se situe près de la fin de la piste 35, ne peut être utilisée du fait que le terrain est trop mou. Tous les avions qui atterrissent sur la piste 35 doivent ensuite circuler à rebours sur cette piste avant que celle-ci ne soit complètement dégagée pour les prochains atterrissages et décollages. Les délais requis lors de cette procédure donnent parfois des maux de tête à l’officier militaire assis près de nous.
Je me souviens que l’officier militaire responsable de la mission nous avait dit : « Si les avions ne peuvent décoller d’ici une minute, la mission est annulée. » Le hasard avait fait que durant la fenêtre très réduite où les CF-18 devaient décoller cette journée-là, il y avait beaucoup d’autres aéronefs de type commercial ou exécutif en opération à Iqaluit. Nous devions composer avec les Avro 748, Twin Otter, Boeing 727 et 737, de même qu’avec des jets exécutifs en provenance de l’Atlantique. Il y avait toujours un moyen d’arriver à un résultat satisfaisant pour tous et les exercices se terminaient de la façon souhaitée.
Ce fut une période que tout le personnel appréciait, car pour une semaine durant l’année, les opérations changeaient radicalement : il fallait respecter les besoins impératifs reliés à l’exercice militaire tout en fournissant les services réguliers à la circulation aérienne.
Nous savons, pour avoir discuté avec des membres d’équipage ayant pris part à l’exercice, que les forces militaires ont été assez aimables pour remettre au personnel, via notre gestionnaire, des affiches couleur autographiées par les pilotes des différents escadrons impliqués dans « Amalgam Chief ». Même si le gestionnaire de Transports Canada n’a jamais cru bon de nous montrer ne serait-ce qu’une seule de ces affiches, j’ai apprécié cette attention de la part des pilotes.
1993. Dans le but de remplacer progressivement une ligne Dew devenue désuète, les Canadiens et Américains construisent conjointement à Iqaluit une base de support logistique pour le nouveau North Warning System.
2006. Les tests pour la résistance au froid extrême sont menés par Airbus pour le A -380, le plus gros avion commercial au monde servant au transport de passagers.
2014. Des tests de résistance au froid extrême sont menés par Airbus pour le A-350 XWB.
2015. Le Canada fût l’hôte de la rencontre ministérielle du Conseil de l’Arctique à Iqaluit, au Nunavut. Le Conseil est composé des pays suivants : Canada, Suède, Danemark, Finlande, Islande, Norvège, Russie et États-Unis. Se joignirent à la rencontre les hauts représentants d’organisations autochtones ayant le statut de participants permanents.
2021. La compagnie Dassault effectue les test d’endurance au froid à Iqaluit pour son Falcon 6X
En 1988, je quitte Rouyn-Noranda (CYUY) pour aller travailler à la station d’information de vol de Transports Canada à Iqaluit (CYFB), une station FSS située sur la Terre de Baffin. Iqaluit est la capitale du Nunavut et un port d’entrée au Canada autorisé pour le transport aérien ou maritime international. Situé à la jonction des routes polaires et de l’Atlantique Nord, Iqaluit peut recevoir tous les types d’aéronefs existants.
Il faudra donc y apprendre de nouvelles fonctions reliées aux responsabilités de l’OACI vis-à-vis du trafic aérien international traversant l’Atlantique, tout en occupant la tâche de spécialiste en information de vol (FSS) en ce qui a trait au service consultatif d’aéroport.
Le décollage se fera à partir de l’aéroport international Pierre-Elliott-Trudeau de Montréal (CYUL). Je décide d’emporter le révolver de type .357 Magnum avec lequel je m’entraîne depuis plusieurs années. Les papiers m’autorisent à le transporter de ma demeure vers l’aéroport de Montréal. Une fois à l’aéroport, je dois me diriger vers un comptoir où un agent me fournit un document qui me permet de transporter le révolver dans le Boeing B737 de Nordair en partance pour Iqaluit.
Il n’y a aucune mention qui fait en sorte que l’arme doive être entreposée dans la cabine de pilotage. Au passage dans la zone de sécurité, le .357 Magnum se trouve dans une mallette, dans mon sac Adidas. Je mets le sac sur une courroie mobile, comme pour n’importe quel bagage à main de passager, pour qu’il soit vérifié par les agents. Le sac n’est pas ouvert par l’agent de sécurité; il scrute l’écran et constate son contenu, sans plus. J’imagine qu’il a dû recevoir des instructions spéciales dont j’ignore tout.
Je suis un peu surpris de la facilité avec laquelle je peux transporter un révolver, mais n’ayant jamais tenté l’expérience auparavant, car je ne suis pas un policier, je me rassure en me disant que toutes les demandes ont été faites et que les papiers sont en règle. Je passe sans problème l’inspection et me retrouve dehors. Une petite marche est nécessaire pour rejoindre le Boeing B737.
Une agente de bord accueille tous les passagers. Au moment où je me prépare à entrer dans l’avion, elle me questionne à voix basse pour savoir si le révolver est dans le sac et s’il est chargé. Mes réponses étant satisfaisantes, elle m’invite à me diriger vers mon siège.
Une fois installé à ma place, je glisse le sac Adidas sous le siège de mon voisin d’en face, plutôt que dans les compartiments surélevés le long des allées, histoire de toujours avoir le sac en vue. L’avion décolle et le vol se fait en douceur vers Iqaluit.
Trois années passent et vient le temps du retour pour une mutation vers la station d’information de vol de l’aéroport de Québec (CYQB). Dans l’intervalle, le monde a changé, et au Québec, Marc Lépine a fait des siennes en 1989, avec le massacre, au moyen d’une arme à feu, de quatorze étudiantes de l’École Polytechnique de Montréal.
Je me dirige vers le bureau de la Gendarmerie Royale du Canada (GRC) d’Iqaluit pour remplir les papiers dans le but de rapporter le révolver vers mon nouveau lieu de mutation, révolver qui sera finalement vendu dans les premiers mois de mon arrivée. Le policier signe les papiers et m’annonce tout de suite que l’arme sera conservée dans la cabine de pilotage.
Je lui demande, au cas où cela serait encore permis, si j’ai toujours la liberté de l’installer sous le siège du passager avant, comme cela avait été fait lors de mon arrivée. Il me regarde d’une façon qui signifie clairement qu’il ne croit pas un mot de ce que je viens de dire. Cela n’a pas d’importance. L’arme voyagera donc avec les pilotes et je la réclamerai après l’atterrissage.
Quand je repense à cette histoire presque trente ans plus tard, je réalise combien le monde a changé. Il y eut un temps où je pouvais aller à l’aéroport international de Montréal et m’installer sur une longue passerelle extérieure réservée au public pour assister aux mouvements des aéronefs et véhicules de toutes sortes.
Sur cette même passerelle, des citoyens en profitaient pour fumer un peu tout en laissant négligemment tomber leurs mégots de cigarettes ici et là, tout près des camions citernes en opération. La gestion de l’aéroport interdit éventuellement l’accès à cette passerelle après avoir reçu de multiples plaintes de passagers ayant trouvé des traces de brûlures sur leurs valises …
[Prochaine histoire : Iqaluit et l’ancienne base militaire américaine]
Voici quelques photos d’avions et d’hélicoptères prises à l’aéroport de Rouyn-Noranda (CYUY)au cours des années 1986-1988, lorsque je travaillais en tant que spécialiste en information de vol (FSS) pour Transports Canada. Elles ne se veulent pas des photos artistiques mais plutôt un échantillon représentatif de ce qui volait au-dessus de l’Abitibi durant ces années. Ces documents témoignent de l’histoire de l’aviation au Québec. Vous avez possiblement fait la découverte de certains noms ou couleurs de compagnie dans les deux articles précédents publiés le 29 juin et le 11 juillet 2015.
J’ai pris ces photos sur film Kodachrome à l’aide d’un Pentax KX. Plusieurs types et catégories d’aéronefs sont inclus : privés, commerciaux, corporatifs, gouvernementaux, militaires, etc. Quelques photos rappelleront certainement des souvenirs aux pilotes plus âgés.
Dans cette troisième partie se trouvent les appareils suivants:
Voici quelques photos d’avions et d’hélicoptères prises à l’aéroport de Rouyn-Noranda (CYUY) au cours des années 1986-1988, lorsque je travaillais en tant que spécialiste en information de vol (FSS) pour Transports Canada. Elles ne se veulent pas des photos artistiques mais plutôt un échantillon représentatif de ce qui volait au-dessus de l’Abitibi durant ces années. Ces documents témoignent de l’histoire de l’aviation au Québec. Vous avez possiblement fait la découverte de certains noms ou couleurs de compagnie dans la première partie publiée le 29 juin 2015.
J’ai pris ces photos sur film Kodachrome à l’aide d’un Pentax KX. Plusieurs types et catégories d’aéronefs sont inclus : privés, commerciaux, corporatifs, gouvernementaux, militaires, etc. Quelques photos rappelleront certainement des souvenirs aux pilotes plus âgés.
Dans cette deuxième partie se trouvent les appareils suivants: Ailes de Charlevoix Commander 500S C-GAYR, Propair C-310 C-GAFO, Voyageur Airways BE-10 C-GISH, Skycharter FA-20 C-GSKQ, SEBJ Convair 580, Québecair SA226-TC-MetroII C-GKFS, Nordair-Metro CV-580, Noranda Mines Gulfstream 1 C-FNOR, Gouvernement du Canada Challenger 601 pour VIP, Cessna C-150 C-FRGC, Canadian Pacific B737-200 C-GNDM, Gouvernement du Québec FA-27 C-FPQI, Gouvernement du Canada GRC C-208 Caravan 1 C-FMPB, Normick-Perron hélicoptère Bell 206B C-GAKN, Beech Sierra BE-24 C-FZYD, Astar 350 Écureuil et Dighem, Air Dorval Westwind, Air Charters PA-31 C-GBMX, Air Canada DC-9.
Pour d’autres histoires vécues à la station d’information de vol de Rouyn-Noranda, cliquez sur le lien suivant:
Voici quelques photos d’avions et d’hélicoptères prises à l’aéroport de Rouyn-Noranda (CYUY) au cours des années 1986-1988, alors que je travaillais en tant que spécialiste en information de vol (FSS) pour Transports Canada. Elles ne se veulent pas des photos artistiques mais plutôt un échantillon représentatif de ce qui volait au-dessus de l’Abitibi durant ces années. Ces documents témoignent de l’histoire de l’aviation au Québec. Il est possible que vous fassiez la découverte de certains noms ou couleurs de compagnie.
J’ai pris ces photos sur film à l’aide d’un Pentax KX. J’entends les publier sur une période de quelques semaines. Plusieurs types et catégories d’aéronefs seront inclus : privés, commerciaux, corporatifs, gouvernementaux, militaires, etc. Quelques photos rappelleront certainement des souvenirs aux pilotes plus âgés.
Dans cette première partie se trouvent les appareils suivants: Tim Hortons AC6T, Sunwest Lear 35 C-GVVA, Québec Aviation SW4 C-GQAP, Propair DHC-3 C-FOOH, Gouvernement du Québec HS-125 C-FSEN, Trans North Air hélicoptère Bell 47G3B2 C-FQJY, Gouvernement du Québec DC-3, Conquest Flight Group C-411 N88727, Cité Express DHC-7 C-GHRV, Gouvernement du Canada CL-601 C-GCFI, Manitoulin Air Service C185F C-GTLO, Central Airways BE-20 C-FANG, Canadian Pacific B737-200 C-FCIP, Bellanca Scout C-GPKB, Aérospatiale Écureuil AS-350, Austin Airways BAE-748 C-GGOO, Viking AS-350 C-GBPS, Air Dorval SW2, Air Canada B-727, Aero-Commander C-GOTL.
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Été 1988. Il ne me reste que quelques mois de service à la station d’information de vol (FSS) de Transports Canada à l’aéroport de Rouyn-Noranda (CYUY) avant d’être transféré vers le poste nordique isolé d’Iqaluit, dans l’Arctique. Cet été-là, durant les vacances annuelles, j’ai quelques jours à ma disposition pour faire un détour par St-Jean-sur-Richelieu, juste à temps pour l’anniversaire de mariage de mes parents.
Nous avons pensé leur offrir une balade en montgolfière. L’envolée est censée s’effectuer à partir du terrain longeant la façade du Cégep de St-Jean-sur-Richelieu.
Les vents favorisent une trajectoire permettant une traversée de la rivière Richelieu. Le pilote en profitera, car la traversée de cette rivière est très appréciée des passagers. Nous espérons que la direction des vents ne changera pas une fois le ballon rendu au-dessus de l’eau.
Les réserves de gaz propane étant limitées, il faudra que le trajet se fasse suffisamment rapidement pour permettre au pilote de s’éloigner des bâtiments de la ville d’Iberville, une fois rendu de l’autre côté de la rivière. Je ne crois pas que mes parents se soucient de ces détails. J’imagine plutôt que leur anxiété augmente au fur et à mesure que l’enveloppe du ballon prend du volume.
Dès l’envol, le ballon se dirige vers la rivière. Cela permettra au pilote de baptiser la nacelle en effleurant la surface de l’eau, ce qu’il effectue vingt minutes plus tard avec une grande maîtrise.
Le ballon reprend ensuite de l’altitude, juste assez pour pouvoir frôler des champs de blé d’Inde de l’autre côté de la rivière. En tant que membres de l’équipe de poursuite, nous tâchons de ne pas perdre le ballon de vue. Il s’agit d’utiliser tous les raccourcis à notre portée, de même qu’utiliser notre créativité en ce qui a trait aux règles de la circulation routière et aux panneaux de signalisation.
Environ une heure plus tard, le pilote entame la descente. Il pose la montgolfière sans problème dans un champ. Lorsque les manœuvres essentielles sont complétées, il nous surprend en sortant de la nacelle une petite table pliante, une nappe à carreaux et des coupes pour tous.
La soirée est un succès complet. Quelque part en campagne, juste avant la tombée de la nuit, nous sabrons le champagne…
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1986. Journée d’été bien calme en cette fin d’après-midi à l’aéroport de Rouyn-Noranda (CYUY). Le personnel de la station d’information de vol de Transports Canada sait qu’un front froid passera sous peu. Jusqu’à présent cependant, c’est le beau fixe. Ciel bleu, vents légers. À cette époque, les spécialistes en information de vol (FSS) n’ont pas accès à des images radars ni aux photos satellitaires.
En plus des prévisions régionales destinées à l’aviation, les deux stations d’information de vol dont nous nous servons pour connaître les systèmes météo arrivant de l’ouest sont Earlton FSS (CYXR) et Timmins FSS (CYTS) en Ontario. Une consultation des observations météorologiques passées indique la présence de sautes de vent accompagnées d’un orage isolé. Rien qui sort de l’ordinaire. Mais Timmins est loin et ne représente qu’un point de repère pour tenter de mieux cerner le système météo.
Étant en service ce jour-là, je regarde l’indicateur de la vitesse des vents, par hasard, comme un réflexe développé au cours des années. Comme dans un rêve, alors qu’il y a quelques secondes tout était tranquille, je vois l’aiguille de l’anémomètre passer de 5 à 20 nœuds, redescendre un peu puis monter à 40 nœuds, diminuer de nouveau encore un peu puis monter à 60 nœuds et, dans une dernière correction, se stabiliser pour un court instant à 72 nœuds, ce qui correspond à environ 134 km/h.
Tout est pourtant si tranquille près de la station d’information de vol. Je regarde par la fenêtre pour déceler tout mouvement d’objet afin de vérifier s’il y a une erreur de l’indicateur de vent, et, au même moment, j’aperçois, passant devant la station, le cabanon de bois normalement utilisé par le préposé au carburant. Cette construction doit bien peser quelques centaines de kilos. Ce cabanon qui se promène au gré du vent est une confirmation sans équivoque que l’équipement fonctionne. Il est évident qu’une ligne de grains est associée à ce front froid.
Tout ce qui n’est pas bien fixé au sol se met en mouvement. Dans l’heure qui suit, les orages forts éclatent au-dessus de Rouyn-Noranda tout en se dirigeant vers l’est. L’aéroport de Val-d’Or (CYVO) étant soixante milles plus à l’est, il devient clair qu’il sera frappé de plein fouet d’ici environ deux heures. La tour de contrôle de Val-d’Or est donc avisée de façon à ce que les différents intervenants se préparent à la violence des changements causés par la ligne de grains. Les mesures étant prises, le pire sera évité.
Une heure plus tard, le calme est revenu et Rouyn-Noranda bénéficie d’une soirée d’été idéale.
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