Durant l’été, de la surveillance aérienne est nécessaire pour surveiller l’éclosion de nouveaux feux de forêt dans le centre et le nord de la Province de Québec. Il peut cependant y avoir des journées entières où les pilotes n’ont strictement rien à signaler. Ils accumulent les heures de vol en attendant d’apercevoir un feu ou d’être dirigés, par le régulateur, vers une nouvelle zone de feux de forêt signalée par un citoyen. Ces pilotes agissent également comme pointeurs pour les Canadairs CL215 et CL415.
Durant les années « 80, dans la région de l’Abitibi, un Cessna 310 est en vol depuis quelques heures et le pilote n’a toujours rien à signaler. Désirant briser la monotonie, il décide de descendre à très basse altitude au-dessus de la surface d’une rivière. Durant quelques minutes, il s’amuse à suivre les multiples méandres du cours d’eau. À la sortie d’un virage, l’avion se retrouve soudainement à la hauteur d’un pêcheur debout dans sa barque en train de lancer sa ligne. Imitant les gestes du pêcheur, le pilote confie qu’il n’a pas été le seul à être surpris…
Il peut sembler difficile de croire qu’un aéronef puisse voler aussi bas, spécialement à la sortie d’un virage. Mais après plusieurs décennies dans le monde de l’aviation, je peux affirmer qu’à peu près tout est possible. J’imagine la réaction du pêcheur, debout dans sa barque, lançant tranquillement sa ligne en ce beau matin d’été. Pendant que le pêcheur se penche, le pilote tire sur le manche…
À voir l’expression dans le visage du pilote, il est clair qu’il eut sa dose d’émotions pour la journée… j’aimerais bien dire que ce fut sa dernière incartade, mais ce serait bien mal connaître les pilotes en quête de sensations fortes.
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Durant les années ’80, alors que j’occupe la fonction de spécialiste en information de vol (FSS) à la station d’information de vol de Transports Canada à Rouyn-Noranda (CYUY), je reçois un téléphone de la part d’un contrôleur aérien de l’aéroport de Val-d’Or (CYVO) me signalant un problème avec l’ARCAL type K. Le système ARCAL est un équipement qui permet à un pilote d’ouvrir les lumières de piste à distance.
Normalement, le pilote a le choix entre trois intensités d’éclairage : faible, moyenne et élevée. Mais pour une période prolongée, l’intensité la plus faible de l’ARCAL ne fonctionnera pas. Le contrôleur me demande d’émettre un NOTAM signalant que personne ne peut utiliser l’ARCAL pour une période indéfinie.
Je ne suis pas d’accord avec cette demande. Un système ARCAL que l’on décide de rendre disponible facilitera la vie d’un pilote en lui permettant de choisir parmi les intensités restantes lors de l’approche ou du décollage. Les pilotes du HS125 du Gouvernement du Québec (photo ci-dessus) chargé des évacuations médicales durant la nuit apprécieront, j’en suis sûr.
Je mentionne donc au contrôleur que je ne connais pas de procédures approuvées pour les pannes concernant l’ARCAL de type K et que je ne vois pas pourquoi je considérerais comme totalement non fonctionnel un système dont seule une intensité sur trois pose problème.
Il me répond que ce sont des procédures écrites qui se trouvent à la tour de contrôle et qu’une demande doit être faite à son gestionnaire si je désire les obtenir. Comment est-il possible que des procédures régissant un système installé sur plusieurs aéroports à travers le Canada, avec ou sans tour de contrôle, puissent se trouver seulement dans des tours de contrôle sélectionnées? Cela est impensable.
Je demande donc, par gestionnaire interposé, de recevoir une copie des fameux écrits. Mais il semble maintenant que les procédures ne se trouvent pas à Val-d’Or, mais au bureau régional de Transports Canada à Montréal. J’essaie donc de les obtenir du bureau de Montréal, mais personne ne peut rien trouver de concret.
Il semble de plus en plus évident que les procédures ne sont que fabulation. Pourtant, tous les intervenants défendent les procédures fictives, pour les raisons les plus diverses.
À l’époque, il existe un programme intitulé « Prime à l’initiative ». Ce programme invite le personnel à faire connaître toute suggestion susceptible d’améliorer l’efficacité de la fonction publique. Si la suggestion est retenue par les plus hauts niveaux de gestion, une prime en argent et un certificat sont remis à l’employé par le sous-ministre des transports. Réalisant que je ne pourrai avoir gain de cause en discutant avec les instances régionales, je me sers donc d’une formule de prime à l’initiative.
Une année plus tard, je reçois un appel d’un inconnu qui dit travailler à Ottawa. Il me questionne concernant ma suggestion sur l’ARCAL de Val-d’Or. Il sous-entend que la proposition ne passera pas.
Je lui parle alors en tant que contribuable canadien. Je lui signale que j’ai payé, comme les autres canadiens, pour faire installer ce système de commande d’éclairage, et que tant qu’il y aura une intensité qui fonctionnera, le système devra être accessible pour les pilotes, que cela lui plaise ou non. S’il s’obstine, qu’il se prépare à rendre des comptes au public canadien et à Benoît Bouchard, alors ministre des Transports.
Deux mois plus tard, je reçois un chèque et une lettre du sous-ministre me remerciant pour la suggestion améliorant l’efficacité de la fonction publique. Il aura fallu quatorze mois pour passer des procédures fictives à un système fonctionnel de gestion des pannes de l’ARCAL. Et les nouvelles procédures concernent maintenant tous les aéroports canadiens équipés d’un tel système de commande à distance de l’éclairage d’une piste.
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Durant une belle journée d’été de juillet à l’aéroport de Rouyn-Noranda (CYUY), un pilote d’un aéroclub local contacte la station d’information de vol (FSS) de Transports Canada pour obtenir les informations relatives à un décollage. Il volera avec un Cessna 172. Il obtient les détails et commence à circuler vers la piste. Je note rapidement que l’aéronef semble traîner derrière lui un objet. L’utilisation des jumelles confirme la présence d’un bloc de ciment d’une centaine de kilos attaché par une corde, bloc qui sert normalement à immobiliser l’avion après chaque vol.
Il apparaît clair que le pilote n’a pas fait l’inspection de son avion avant de démarrer le moteur, procédure obligatoire pour noter toutes anomalies. Traîner ce bloc de ciment sur l’asphalte doit certainement nécessiter plus de puissance de la part du moteur. Je demande au pilote : « Ne trouvez-vous pas qu’aujourd’hui il vous faut plus de puissance pour circuler? » Il me répond qu’en effet il a noté le besoin d’augmenter les révolutions du moteur et que cela est probablement dû à la grande chaleur et à l’humidité.
Sans plus attendre, je lui réponds : « Avez-vous fait votre inspection avant-vol pour vous assurer que tout était correct? » Là, de toute évidence, il comprend que quelque chose cloche. Il immobilise l’aéronef sur la voie de circulation, sort de l’appareil et constate l’énorme bourde qu’il vient de commettre. Sans rien dire de compromettant sur les ondes puisqu’il sait que les communications radio sont enregistrées, il m’annonce qu’il retourne à l’aéroclub parce qu’il a « oublié quelque chose »…
Le poste de travail de l’ancienne station d’information de vol de Transports Canada à Rouyn-Noranda ne permettait qu’une vue partielle de la piste 08/26, mais une vue complète de la voie de circulation où se trouvait le Cessna 172 alors qu’il traînait son bloc de ciment.
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Comme les stations d’information de vol (FSS) de Transports Canada au Québec étaient disséminées sur un très grand territoire, les communications entre les employés des différentes stations étaient passablement limitées. Il était assez difficile d’obtenir des informations sur les mouvements de personnel, informations vitales lorsque venait le temps d’argumenter pour choisir l’endroit de la prochaine mutation.
Comment dire à un gestionnaire qu’il y a de la disponibilité à Montréal si l’employé n’a pas devant lui, au moment de la discussion, toutes les informations concernant les mouvements de personnel. Pour corriger la situation, une fois en poste à Rouyn-Noranda FSS, je décidai donc de créer mon propre journal, intitulé « Le Moyen Terme ».
Le nouveau journal était distribué à toutes les stations d’information de vol du Québec, à l’école de Transports Canada à Cornwall (IFTC), au bureau régional de Montréal et à Ottawa. Soudainement, les spécialistes en information de vol du Québec avaient accès à une information vérifiée et actualisée régulièrement.
J’avais des collaborateurs d’un peu partout et, le journal gagnant en crédibilité, des gens m’écrivaient même d’Ottawa. Je finançais le journal, rédigeais la plupart des articles et postais une nouvelle édition tous les deux mois. N’étant redevable à personne, je m’assurais d’une totale liberté. Cela n’empêcha pas la réception éventuelle d’une lettre d’avocat, mais dans un milieu aussi contrôlé, cela n’était pas étonnant. Je présentai cette lettre d’avocat à un juge bien connu qui se chargea de l’affaire gratuitement. La cause s’arrêta net.
Chaque édition était constituée de dix à quinze pages. Elle était tapée à la main sur une vieille machine à écrire et les erreurs étaient corrigées avec du liquide correcteur. Certaines informations n’avaient pour but que de divertir alors que d’autres étaient davantage de nature éditoriale. Ces dernières suscitaient généralement des réactions positives des employés et cela contribuait à maintenir une correspondance continue.
La section possiblement la moins appréciée par le bureau régional était intitulée : « Où sont-ils? ». Sur cette page, nous retrouvions le nom de tous les employés présents à une station en particulier, de même que son ancienneté. Désormais, ces données devenaient accessibles à tous très rapidement. Les informations fournies par la gestion pouvaient être vérifiées par les employés et servir de base d’argumentation lors des discussions concernant une mutation. Cela ennuyait possiblement des gestionnaires qui avaient eu, jusqu’à tout récemment, une tâche relativement plus aisée dans les attributions de poste.
Après plusieurs parutions, un gestionnaire profita de mon passage au bureau régional de Transports Canada à Montréal pour m’intimer de cesser la parution du journal. Je lui répondis qu’il n’en serait rien et que le journal avait visiblement son utilité pour plusieurs employés. Cette réponse, à l’époque, ne fût pas de nature à me faire bénéficier de support en haut lieu, mais cela n’étant pas mon but, le journal continua de paraître pendant encore près de deux ans. Je décidai de mettre fin à sa parution lorsque je n’eus plus assez de temps pour le rédiger, occupé avec plusieurs cours universitaires à distance en même temps que je travaillais sept jours par semaine à la station d’information de vol d’Iqaluit (CYFB). Tant qu’à diluer ou diminuer le contenu et la qualité du journal que j’avais créé, je choisis alors de cesser sa parution.
(Note : personnages créés par Gotlib)
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Novembre 1983. Il était maintenant temps de quitter Inukjuak (CYPH) après y avoir travaillé comme spécialiste en information de vol (FSS) tous les jours pendant plus d’un an. La nouvelle station d’information de vol de Transports Canada était située à l’aéroport de Rouyn-Noranda (CYUY). Mais les choses se compliquèrent au moment du départ, la météo se dégradant rapidement. Un Twin Otter de la compagnie Air Creebec ferait désormais le vol, à partir de Kuujuaraapik (CYGW). Mais il y aurait désormais de multiples arrêts le long de la Baie-James.
Avec les vents forts et les nuages bas, j’étais conscient que nous nous ferions brasser tout le long du vol. Les nuages n’étant qu’à quelques centaines de pieds au-dessus des conifères, les pilotes devaient effectuer toutes les étapes du vol et des différentes escales entre la cime des arbres et la base des stratus. Aucun aéroport ne possédait d’équipements permettant un atterrissage aux instruments. Les pistes étaient courtes, en gravier ou en terre, et des arbres empêchaient parfois des descentes et des montées à un taux considéré comme « normal » par la plupart des voyageurs.
Après quelques heures de vol dans cette turbulence mécanique soutenue, plusieurs passagers n’en purent plus et durent utiliser le sac fourni en cas de mal de l’air. Je me changeai les idées en regardant par la fenêtre. Il n’y avait pas de musique proposée durant le vol; les râlements des passagers servirent de bruit de fond. Finalement, la nuit venue, l’atterrissage se fit à Val-d’Or (CYVO), sur une longue piste asphaltée équipée d’instruments adéquats. Une heure de route plus tard, j’étais à Rouyn-Noranda. Bienvenue dans le Sud…!
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(Histoire précédente : des raisins et des bleuets à Inukjuak)
Plusieurs bateaux naviguent le long des côtes de la baie d’Hudson et de la baie d’Ungava lorsque l’été arrive. Parfois, les spécialistes en information de vol (FSS) de Transports Canada à Inukjuak (CYPH) sont autorisés à monter à bord, le temps de quelques photos, comme cela a été le cas pour les deux photos ci-dessus.
Lorsque les navires effectuent de très longs trajets pour finalement atteindre les petits villages de la baie d’Hudson et de la baie d’Ungava, ils frappent régulièrement des petits morceaux de glace dans leur avancée. C’est à l’équipage de déterminer si la coque du bateau est suffisamment résistante pour emprunter le passage désiré.
Malheureusement, il n’est pas toujours possible de juger correctement de la situation et la coque du navire se brise alors sous l’impact avec le glacier. La photo ci-dessous montre le navire Kanguk, au large d’Inukjuak, à l’automne 1982, sa coque endommagée durant son voyage vers un des petits villages de la côte.
(Prochaine histoire : en route vers la deuxième mutation : Rouyn-Noranda FSS)
(Histoire précédente : Le cockpit d’un Boeing 747 de KLM lors d’un vol de nuit au-dessus de l’Atlantique)
Durant les mois où il y avait un cuisinier sur place pour préparer les repas à Inukjuak, nous avions la vie facile puisque tout était prêt lorsque l’heure des repas arrivait. Il reste que les desserts auraient bénéficié d’un peu de variété. Ces derniers étaient à base de raisins ou de bleuets, semaines après semaines, mois après mois.
Ainsi, nous avions le choix entre des gâteaux aux raisins, des tartes aux raisins, des poudings aux raisins, des muffins aux raisins et des biscuits aux raisins. Quand il n’y avait plus aucune possibilité d’ingérer des raisins supplémentaires, c’était le tour des bleuets : les gâteaux aux bleuets, les tartes aux bleuets, les poudings aux bleuets, les muffins aux bleuets. Cependant, pour varier un peu, il n’y avait pas de biscuits aux bleuets. J’ai été longtemps sans pouvoir manger des raisins ou des bleuets suite à ces mois intensifs de consommation des mêmes ingrédients.
Le cuisinier n’étant pas particulièrement patient, il me vint l’idée de le faire rigoler un peu en le faisant participer à une attrape dont serait victime un nouveau spécialiste en information de vol (FSS) de Transports Canada arrivé à Inukjuak au début de l’après-midi. Ce dernier n’avait pris encore aucun repas à la cuisine du staff house. Je savais que le repas du soir était servi à 17 h et qu’il fallait toujours s’organiser pour être à l’heure. J’annonçai donc au cuisinier que j’arriverais cinq minutes en retard avec le nouvel employé. Le cuisinier pourrait ainsi entrer dans une terrible colère, simulée mais convaincante.
L’heure du souper arriva, je savais qu’il était 17 h mais l’entraînement du nouveau FSS se prolongea volontairement de cinq minutes. Puis, feignant la surprise, nous lui avons annoncé qu’il fallait se diriger au plus tôt vers le staff house, car le cuisinier était probablement rouge de colère. Dans le corridor menant à la cuisine, nous entendions déjà les chaudrons lancés sur le comptoir et le cuisinier crier que les nouveaux employés se prenaient pour des rois et manquaient de respect au personnel chargé de les nourrir.
Le nouveau me signala qu’il n’avait plus vraiment faim. Visiblement, il ne tenait pas à affronter la colère du cuisinier. La situation empira encore lorsque je l’incitai malgré tout à se diriger vers la cuisine pour qu’il tente de s’expliquer. En le voyant arriver, le cuisinier redoubla d’efforts. Puis soudainement, tous les employés présents éclatèrent de rire et le cuisinier souhaita la bienvenue au nouveau FSS en le remerciant de lui avoir donné la chance de se détendre un peu.
(Histoire précédente : une cuisine comme aide à la navigation à l’aviation)
Il fut un temps où visiter le cockpit d’un aéronef durant le vol était fort simple. Une demande était faite à l’hôtesse de l’air, qui allait ensuite voir le commandant de bord pour obtenir son accord. Même durant cette période cependant, plusieurs compagnies interdisaient les visites lorsque l’avion était au-dessus de l’océan.
En 1983, lors d’un voyage au départ de Montréal vers la Hollande, j’ai tout de même posé la question au personnel de bord, espérant pouvoir prendre une photo souvenir.
Le vol s’effectuait sur un Boeing B747 de la compagnie KLM. Au beau milieu de la nuit, alors que l’appareil était en vol de croisière depuis plusieurs heures et que la plupart des passagers étaient assoupis, je demandai discrètement à une hôtesse de l’air l’autorisation de visiter le cockpit. Naturellement, elle refusa. Revenant à la charge, je lui mentionnai mon travail comme spécialiste en information de vol (FSS) pour Transports Canada à Inukjuak (CYPH) et le fait que KLM communiquait régulièrement avec nous pour recevoir les services essentiels. Afin de dissiper un dernier doute toujours possible, je lui donnai les numéros des vols de KLM survolant le nord du Québec, au Nunavik.
Elle accepta de transmettre le message et, vingt minutes plus tard, me dit : « Vous pouvez venir avec moi en faisant attention de ne pas réveiller les passagers de première classe installés près de l’escalier tournant qui mène au cockpit ». À mon entrée dans le poste de pilotage, le commandant de bord se retourna, me salua en croquant dans une pomme et retourna à son travail. Tout était tranquille dans l’habitacle et on pouvait entendre un sifflement léger continuel causé par le frottement de l’air.
Après une courte discussion avec le personnel, je demandai aux deux pilotes et à l’ingénieur de bord de fermer les yeux un court instant, le temps de la prise d’une photo avec flash. Une photo qu’il me serait impossible de prendre aujourd’hui, dans les mêmes circonstances, à cause du niveau de sécurité plus élevé.
Et, étant donné que je venais de commencer des vacances annuelles dans un cockpit d’avion, je pensai qu’il serait intéressant, une fois rendu en Hollande, de visiter le fameux monde miniature de Madurodam, histoire de ne pas s’éloigner trop longtemps du monde de l’aviation…
(Prochaine histoire : des raisins et des bleuets à Inukjuak)
(Histoire précédente : allégations concernant le massacre de chiens de traîneaux durant les années 50 et 60.)
Un OVNI des plus invraisemblables fût créé à Inukjuak (CYPH) autour de 1983, au moment où j’étais spécialiste en information de vol (FSS) pour Transports Canada. Le personnel d’Environnement Canada en poste au bâtiment d’aérologie avait la tâche de lancer deux fois par jour des ballons sondes pouvant atteindre des altitudes supérieures à 70,000 pieds. Ces ballons remplis d’hydrogène tiraient une radiosonde transmettant des données telles que la vitesse des vents et la température à toutes les altitudes.
Une bonne journée, un des observateurs attacha une petite pile sur la sonde de même que cinq ampoules alimentées par cette pile. Le taux d’ascension du ballon fut corrigé en fonction du poids additionnel. La noirceur venue, le ballon fut lâché. Tout ce qu’un observateur pouvait voir dans le ciel était cinq lumières se déplaçant l’une derrière l’autre, en gardant le même espacement. La vitesse et l’altitude de cette formation inconnue étaient impossibles à déterminer puisqu’il n’y avait pas de référence terrestre.
Vu du sol, cet OVNI pouvait être à cent pieds d’altitude comme à une très haute altitude. L’objet était totalement silencieux et semblait se déplacer à une vitesse impressionnante. Un OVNI est maintenant identifié, des décennies plus tard.
(Prochaine histoire : une cuisine comme aide à la navigation aérienne)
(Histoire précédente : acquisition d’une sculpture Inuite à Inukjuak en 1982)
Lorsque j’étais en poste à Inukjuak (CYPH) comme spécialiste en information de vol (FSS) pour Transports Canada, entre 1982-1983, j’adorais faire des promenades le long du littoral de la baie d’Hudson. Une belle journée, j’eus la chance d’être accompagné par un gros chien esquimau canadien appartenant à un employé d’Environnement Canada. Le chien avait trouvé la façon de se libérer de sa laisse et j’avais profité de sa compagnie pour explorer les environs.
Il n’était pas et il n’est toujours pas fréquent d’apercevoir un chien sans surveillance sur le territoire habité par les Inuits, spécialement durant l’été. Ces derniers ont l’habitude d’aller porter les chiens en surplus sur quelques îles se trouvant à proximité des différents villages le long des côtes de la baie d’Hudson et d’Ungava. Naturellement, les Inuits revenant de la pêche s’arrêtent fréquemment sur les îles où se trouvent les chiens et laissent de la nourriture. Ce procédé est toujours en place en 2013, car il fonctionne bien. Selon un Inuit d’Inukjuak avec qui je discutais récemment, l’île permet aux chiens de conserver leur liberté de mouvement au lieu d’être prisonnier d’une corde. De même, les moustiques y sont beaucoup plus rares et les chiens ne s’en portent que mieux.
En 1982, j’entendais des rumeurs selon lesquelles un chien laissé libre était susceptible d’être abattu, mais je n’ai jamais assisté à rien de tel. La politique locale veut que des chiens errants ne soient pas tolérés, car ils pourraient représenter une menace pour la population. Dans tout ce qui se dit concernant des chiens abattus pour les raisons les plus diverses, le thème qui revient le plus est celui de l’allégation de massacres de chiens esquimaux durant les années ` 50 et `60. La documentation trouvée à cet égard fait état d’un millier de chiens qui auraient été abattus au courant des années, la plupart inutilement, dans les différents villages longeant les côtes de la baie d’Hudson, de l’Ungava et le long du détroit de Davis.
Un rapport intérim d’enquête sur ce sujet a été remis en 2009 à la Corporation Makivik et au Gouvernement du Québec par le juge à la retraite Jean-Jacques Croteau, de la Cour Supérieure du Québec. On apprend de ce rapport qu’autant la GRC que la Sûreté du Québec avaient participé à l’élimination de chiens de traîneaux au cours des années, en interprétant de façon personnelle et passablement restrictive une loi datant de 1941 et traitant des « Abus causés à l’agriculture ». Le texte de loi visait, lors de sa création, à créer un système de non-responsabilité pour une personne qui abattrait un chien errant selon des conditions spécifiques stipulées dans le texte de loi. On faisait référence ici à des actions prises contre des chiens errants attaquant des moutons et des animaux de ferme.
Rapidement, les forces policières utilisèrent à outrance ce passage de la loi pour l’appliquer sur un territoire qui n’était pas visé par la loi. Je peux me tromper, mais je crois que personne n’a encore observé un Inuit éleveur de moutons sur une ferme dans le Grand Nord. Les évènements les plus importants se produisirent après que la GRC eut laissé la responsabilité du territoire à la Sûreté du Québec. Cette force policière fit preuve d’une méconnaissance complète de la culture Inuite. Selon les preuves présentées dans le rapport, des policiers arrivaient dans un village sans prévenir et tuaient les chiens errants, les pourchassant même sous les maisons, sans avoir pris soin de vérifier si le chien était malade ou dangereux. On trouve dans le rapport le témoignage de deux Inuits de Kangiqsujuaq affirmant avoir vu deux policiers arriver par hydravion, et sans dire un mot à qui que ce soit commencer à pourchasser les chiens errants à travers le village. Trente-deux bêtes furent éliminées et les policiers quittèrent le village sans donner d’explications.
Le rapport mentionne que les Inuits du nord du Québec n’ont jamais été consultés quant à la portée de la loi sur « Les abus à l’agriculture », une loi totalement inappropriée pour eux et ne tenant aucun compte de leurs droits ancestraux. Les Inuits dépendaient complètement des chiens pour se déplacer, chasser et pêcher. On peut lire le passage suivant, dans les dernières conclusions du rapport : « Après 1960, les actions et comportements des forces policières dépassèrent les bornes. C’était à n’y rien comprendre. Les officiers démontraient un manque total de conscience par rapport aux droits fondamentaux des Inuits, à leur culture et à l’importance des chiens pour leur subsistance. Le comportement des officiers, qui ne pouvait être ignoré par les administrations civiles provinciale et fédérale, eut pour effet de nuire grandement à 75 propriétaires de chiens et leur famille dans leur capacité de subvenir à leurs besoins en nourriture ». Aucune aide ne fut offerte par les autorités pour compenser la perte des chiens.
Le juge note finalement qu’il n’a d’autre choix que de déclarer qu’il y a eu bris de la part du Canada et du Québec dans leurs obligations fiduciaires envers les Inuits. J’imagine que des compensations monétaires ont été offertes, à moins que ce rapport ne soit que le premier d’une longue série visant à établir les responsabilités et compensations futures.
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(Prochaine histoire : l’OVNI inventé à Inukjuak en 1983)