Le Qubec a reçu le vendredi 1er mai 2020 une cargaison de matriel mdical destin au personnel luttant contre le COVID-19. Un avion-cargo Antonov 225 transportait la marchandise. Le vol a t organis grâce une collaboration conjointe entre Nolinor, Momentum Solutions et Antonov Airlines.
Parti de Tianjin en Chine, l’avion a fait escale Anchorage, en Alaska, avant de continuer son vol au-dessus du Canada jusqu’ la province de Qubec.
L’arrive de l’Antonov 225 Anchorage a t annonce l’avance par les mdias, ce qui a permis une foule nombreuse de se poster aux abords de l’aroport et de surveiller l’approche de l’appareil. Le lien suivant vous permet de visualiser l’approche et l’arrive : KTUU Video Antonov 225
À 5 : 35 sur le vido de KTUU, on peut voir un MD-11F de la compagnie Fedex. La mention est ncessaire, car cet avion très avant-gardiste au moment de sa conception est de moins en moins utilis cause de son âge et des coûts de carburant associs son utilisation. L’appareil ne sert aujourd’hui que pour le transport de marchandises. On ne construit plus d’avions de cette grosseur ayant trois moteurs. Il y a de bonnes chances que l’Antonov 225 continue de voler longtemps après qu’un MD-11F aura fait un dernier transport de marchandises. (Edit: l’Antonov 225 a t dtruit par la Russie lors de son invasion de l’Ukraine).
Après être redcoll d’Anchorage dans la matine du 1er mai, l’Antonov 225 est arriv Mirabel, au Qubec, en soire vers 20 h 22. La trajectoire de l’avion (ADB3381) pouvait être suivie sur Flightradar24 au moment de son approche pour Mirabel (CYMX).
On peut voir sur l’image de Flightradar24 qu’un hlicoptère (C-GSTV) est positionn pour filmer l’arrive du mastodonte. Il s’agit d’un AS 350 BA de la compagnie TVA, mdia de nouvelles francophones au Qubec.
La photo ci-dessous montre les oprations de dchargement de l’appareil. Le matriel servant la lutte contre le coronavirus a t manipul par du personnel portant une combinaison approprie.
Plusieurs dfis ont t rencontrs avant que ce vol ne soit une russite : la barrière de la langue, la vrification de la qualit du matriel transport (du matriel contamin n’est pas d’une grande aide), les exigences de la Chine quant aux oprations aroportuaires, les heures limites d’ouverture des douanes, le temps maximum en service que l’quipage de l’Antonov 225 peut effectuer dans une journe, la comptition pour les commandes de matriel mdical, les magouilles de certains pays pour s’accaparer une marchandise qui ne leur est pas destine, etc. Mais finalement, après un travail soutenu, le Qubec a finalement reçu sa cargaison.
(Histoire prcdente: des cellules orageuses imprvues)
Je me retrouvai donc aux commandes d’un Cessna 170B (roue de queue) sur un vol travers le Canada, de St-Jean-sur-Richelieu, Qubec vers Edmonton, Alberta. Je pilotais l’appareil en compagnie du propritaire qui, lui, n’avait pas encore termin son cours de pilote priv. L’avion volait bien, mais datait de 1952 et ne possdait absolument aucun instrument de navigation arienne, pas même un VOR ou un ADF. Et l’ère du GPS portatif n’tait pas encore arrive.
Quatorze cartes VFR 1:500, 000 couvrant le vol prvu furent plies, colles et numrotes. Je traçai les trajectoires prvues sur chaque carte, avec des points de repère spars de 10 miles entre eux. Cela faciliterait le suivi de notre progression, faute d’quipement de navigation. La prparation effectue, le dcollage se fit par une belle journe d’t de 1981.
Il y eut des escales Gatineau, North Bay, Sudbury et Wawa.
Par la suite, le tour du lac Suprieur fut effectu et les prochains points d’tape se succdèrent, via Thunder Bay et Fort Frances. Au-dessus des grandes tendues boises, sans aucun repère important, il fallait corriger la prcession gyroscopique frquemment de façon ne pas trop s’loigner de la trajectoire prvue. Parfois, lorsque cela facilitait la navigation, nous suivions une voie ferre, et d’autres moments des routes principales. Par endroit, les vents soufflaient tellement fort de l’ouest que notre dplacement par rapport au sol tait plus lent que celui des voitures.
La trajectoire suivie nous tenait volontairement l’cart des zones de trafic arien important. Nous avions choisi de voler au nord de la rgion de contrôle terminale de Winnipeg, vitant ainsi d’avoir trop changer avec le contrôle arien dans un anglais incertain au moyen d’une radio encore moins performante.
Cette option nous amena devoir traverser le lac Winnipeg, dans sa portion sud. Nous avions l’altitude requise pour être distance de vol plan du littoral, en cas de panne moteur. Cependant, la masse d’air froid au-dessus du lac nous faisait perdre graduellement plusieurs milliers de pieds, et ce, même si nous utilisions la puissance maximale. La descente non dsire se termina finalement, mais il fallait maintenant que le moteur tienne bon, sinon nous ne pourrions plus viter un amerrissage…
Près de Lundar au Manitoba, les vieux cadrans de l’appareil indiquèrent une perte importante de carburant. Le plein avait pourtant t effectu rcemment. Par mesure de scurit, il fallait poser l’avion sur la piste la plus proche, mais les vents de côt excdaient fortement les capacits de l’appareil. Une tentative fut tout de même effectue avec pour rsultat que seule la roue gauche accepta le contact avec le bitume. Dès que la roue droite entrait galement en contact avec la piste, l’avion se remettait voler.
Un champ tout près fut donc choisi pour effectuer un atterrissage de prcaution, histoire de vrifier l’tat du carburant. Un survol basse altitude fut effectu au-dessus des vaches et fils lectriques, et l’avion se posa sans problème une vitesse sol n’excdant pas 15 nœuds. Dans son pick-up rouge, un fermier vint nous rejoindre afin d’offrir son aide. Après avoir vrifi que les rservoirs taient pratiquement pleins et n’avaient besoin que de quelques litres d’essence, il tait temps de continuer le voyage. Les aiguilles des jauges essence ne seraient plus dsormais d’aucune utilit…
Dauphin fut survol et peu de temps après nous disions au revoir au Manitoba. Bienvenue en Saskatchewan! Si nous devions connaître une panne de moteur au-dessus de terrains aussi uniformes, les risques de problèmes l’atterrissage seraient pratiquement inexistants.
La mto se dgrada lentement. Nous devions dsormais nous poser Watson, en Saskatchewan, sur la piste la plus proche.
La surface d’atterrissage tait constitue de terre boueuse et de gazon, le tout dlimit par des petits panneaux de bois peint en rouge. Dès le touch des roues, la boue sur les pneus claboussa l’appareil et vint se coller sous les ailes.
Finalement, le temps s’amliora et il fut possible de redcoller en direction de North Battleford, la dernière escale avant Edmonton. Le terrain en pente nous contraignit voler de plus en plus bas près d’Edmonton, sous un couvert de stratocumulus, limitant notre vision pour apercevoir l’avance le bon aroport parmi les trois disponibles (international, civil, militaire). Tout se passa bien quant au choix du bon aroport et de l’approche, mais on ne peut en dire autant des communications radio. Le son qui sortait du vieux haut-parleur tait pourri et l’anglais parl par le contrôleur beaucoup trop rapide pour notre niveau de comprhension. La combinaison de ces deux facteurs obligea le contrôleur rpter plus d’une fois ses instructions jusqu’ ce qu’il se dcide finalement ralentir le rythme et que nous puissions lui dire officiellement : « Roger! »
Après un court sjour Edmonton vint le moment du vol de retour vers St-Jean. Celui-ci se fit beaucoup plus facilement et rapidement, car les vents de l’ouest poussaient l’appareil. La vitesse-sol tait parfois le double de ce que nous avions russi obtenir lors de notre voyage vers Edmonton. Le trajet nous aura finalement pris vingt-cinq heures l’aller et dix-huit au retour.
Au-dessus de North Bay, le temps est idal. Mais nous devrons atterrir Ottawa en attendant que des cellules orageuses s’loignent de Montral et de St-Jean-sur-Richelieu. Après un grand total de quarante-trois heures de vol, le vieux Cessna 170B tait de nouveau pos St-Jean-sur-Richelieu.
(Prochaine histoire: la licence d’instructeur de vol)