En 1990, Stacey Campbell, du journal News North, écrit un article qu’elle intitule : « Iqaluit Drug Haven ». Elle y mentionne que l’aéroport d’Iqaluit, au Nunavut, est l’endroit où arrive la drogue desservant toute la région de la Terre de Baffin. Le courrier est également un moyen utilisé par les trafiquants. Marijuana, haschisch et cocaïne sont offerts sans avoir à chercher bien longtemps.
Sur l’étage supérieur du bâtiment de huit étages dans lequel je demeure, les utilisateurs de drogues sont de plus en plus nombreux. Alors qu’il y a un an seulement l’endroit était relativement tranquille, ce n’est plus le cas aujourd’hui. De mon appartement, j’entends plus souvent les cris provenant du couloir ou des chambres avoisinantes et les « Open the door! » lancés par les policiers de la GRC.
Il y a des cas de violence conjugale, des bagarres, des gens que je dois enjamber pour circuler dans le couloir parce qu’ils sont étendus par terre, la tête dans leur flaque de vomissures, totalement intoxiqués. Tout près de l’endroit où j’habite, quelqu’un a été sorti assez rapidement d’un appartement : la porte et quelques moulures sont arrachées et il y a du sang sur les murs du corridor. L’endroit est beaucoup moins paisible que l’an dernier.
Dans une chambre tout près se réunissent certains cas problématiques, spécialement le vendredi soir. Il n’est pas rare que la tension monte alors que plusieurs personnes se querellent entre des parties de cartes. L’endroit est devenu malsain pour une personne tentant de se reposer un peu entre les quarts de jour, de soir et de nuit ajoutés à un horaire de travail de sept jours par semaine à la station d’information de vol d’Iqaluit.
Je me souviens d’une occasion où quelqu’un s’est mis à frapper sur ma porte de chambre alors que j’étais en train d’étudier bien tranquille. Je pouvais entendre crier: « I am going to kick your ass! Je n’avais absolument aucune idée de ce qui se passait et comme il semblait que j’étais directement interpellé, j’ai ouvert la porte.
Je reconnais alors un individu à qui j’ai demandé poliment, il y a au moins six mois, d’essayer de faire un peu moins de bruit. Tous ces mois sont passés et soudainement le souvenir de la demande revient à la mémoire de cette personne, ce soir dans un état second. Il a visiblement pris ma demande pour une insulte. Il semble pour l’instant sous l’emprise d’un produit “dérivé” et est en colère.
Il se tient debout dans le couloir. Toute confrontation physique “modérée” semble inutile parce que dans l’état où il se trouve, il apparaît que seules des actions rapides et radicales auront du succès.
Je tente de fermer lentement la porte, mais il l’immobilise avec sa main. La situation se gâte un peu plus. J’attends quelques secondes puis essaie de nouveau, calmement et sans dire un mot. Dans quelques secondes, si cela ne fonctionne pas, il ne restera qu’une solution. J’appuie progressivement sur la porte et lui, à mon plus grand étonnement, commence à céder, à laisser aller, si bien qu’en environ vingt secondes, la porte est refermée.
Tout cela s’est fait dans le plus grand silence. Dans ma chambre, je me tiens à quelques pieds de la porte, anticipant qu’elle sera défoncée sous peu. Mais rien ne se produit. Toujours le silence. Après quelques minutes à être resté là, dans ma pièce, à attendre la suite des évènements, je réalise que tout est terminé. Quelle soirée bizarre! Cela ne se serait pas terminé ainsi dans une grande ville du Sud.
Je suis en mesure de dire qu’en effet, Iqaluit en 1990 était un havre pour la drogue. De plus, l’étage où se trouvait ma chambre ne faisait pas exception. Heureusement, j’ai éventuellement pu changer d’étage et me retrouver avec des gens qui avaient un mode de vie un peu plus balancé et le besoin de dormir à l’occasion…
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