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Histoires vécues comme spécialiste en information de vol (FSS): Iqaluit FSS

Demande d’asile politique de deux Polonais à Iqaluit

(Histoire précédente : la dame qui se fait voler son sac à main sous mes yeux)

Un DC-8-71 de la Trans Ocean Airways et un Boeing B-727 de la compagnie Sterling à Iqaluit (1989). Vue à partir de la station d'information de vol d'Iqaluit
Un DC-8-71 de la Trans Ocean Airways et un Boeing B-727 de la compagnie Sterling à Iqaluit (1989). Vue à partir de la station d’information de vol d’Iqaluit

Une nuit d’automne 1989, à Iqaluit, dans le Nunavut, un Boeing 727 de la compagnie aérienne Sterling est stationné sur le tarmac pour une courte escale, histoire de refaire le plein. De la tour de la station d’information de vol (FSS) de Transports Canada, nous pouvons apercevoir les véhicules des douanes du Canada et de la GRC stationnés près de l’aéronef, ce qui est inhabituel. Il y a une certaine agitation près de la porte arrière du 727, car plusieurs personnes circulent d’un véhicule à l’autre et semblent faire face à un imprévu. L’escale se prolonge.

Dans les jours qui suivent, soit le 2 octobre 1989, le Journal de Montréal publie l’article suivant : « Deux Polonais, qui avaient prévu de faire défection à Terre-Neuve lors d’une escale technique de leur avion assurant la liaison Gdansk-Vancouver, ont eu la surprise samedi d’apprendre par les autorités canadiennes que l’appareil avait atterri dans le Grand Nord canadien ».

« Les deux hommes, dont l’identité n’a pas été révélée, ont quand même demandé l’asile politique, a affirmé un responsable de la Gendarmerie Royale du Canada (GRC) à la station d’Iqaluit, sur l’île de Baffin, dans l’Arctique. Les Polonais, qui devaient se rendre à Vancouver, sur la côte du Pacifique, pour relayer des marins d’une flottille de pêche, se croyaient à St John’ s, la capitale de Terre-Neuve, a indiqué le responsable, le caporal Gary Asels ».

« L’officier de douane leur a montré sur une carte l’emplacement d’Iqaluit (à 2100 kilomètres au nord de Montréal). Ils s’en fichaient éperdument, l’important, pour eux, c’était d’être au Canada. Ils étaient très heureux d’être ici, a commenté le caporal Asels ».

On m’a rapporté que de façon à réussir leur sortie de l’avion, les deux Polonais avaient choisi un siège situé près de la passerelle arrière du Boeing 727. Ils ont fait semblant de dormir et quand l’escalier a été abaissé et que la surveillance a été diminuée pour un court instant, ils en ont profité pour emprunter rapidement la passerelle et se sont retrouvés sur le sol canadien.

Je ne peux malheureusement pas confirmer aujourd’hui s’ils ont finalement été reçus citoyens canadiens ou s’ils ont dû retourner dans leur pays d’origine.

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Histoires vécues comme spécialiste en information de vol (FSS): Iqaluit FSS

Deux commandants de bord forcés de retarder leur décollage à Iqaluit

(Histoire précédente : l’exercice militaire « Amalgam Chief » : des bombardiers B-52 dans les nord du Canada)

Aer Lingus Boeing B-737 en finale pour Iqaluit (1989)
Aer Lingus Boeing B-737 en finale pour Iqaluit (1989)

L’histoire se situe à Iqaluit, au Nunavut, durant une journée d’hiver de 1990 où la météo est vraiment mauvaise, mais où il est encore possible d’effectuer un décollage. Deux compagnies respectivement propriétaires d’un Boeing 727 et 737 viennent de terminer l’embarquement des passagers en prévision d’un décollage qui doit avoir lieu dans les prochaines minutes. Mais dans l’intervalle, les conditions météo empirent et l’aéroport se retrouve finalement dans une situation où les aéronefs doivent attendre que la visibilité s’améliore.

Les avions sont donc prêts, les moteurs chauffent et pourtant les pilotes ne peuvent décoller. La pression monte et finalement les pilotes décident qu’ils tentent leur chance pour un décollage dans cette météo pourrie. Notre devoir, en tant que spécialistes en information de vol (FSS), est d’aviser les deux commandants de bord que s’ils tentent un décollage dans les conditions actuelles, qui sont sous les minimums légaux, des rapports d’infraction seront déposés contre eux.

Vue à partir de la tour d'information de vol d'Iqaluit FSS: un Boeing B-727 de First Air de même qu'un Boeing B-737 de Canadian Airlines
Vue à partir de la tour d’information de vol d’Iqaluit FSS: un Boeing B-727 de First Air de même qu’un Boeing B-737 de Canadian Airlines
Vue à partir de la tour de la station d'information de vol d'Iqaluit: on peut apercevoir un Boeing B-727 de la compagnie Evergreen International (1989)
Vue à partir de la tour de la station d’information de vol d’Iqaluit: on peut apercevoir un Boeing B-727 de la compagnie Evergreen International (1989)

Nous recevons naturellement une réponse à la mesure de leur impatience, et devant ces mauvaises conditions météo qui persistent et la menace d’une infraction potentielle, les deux commandants de bord doivent se résoudre à reporter le décollage.

Dans leur impatience à vouloir compléter le vol, ces commandants négligeaient qu’il existe toujours la possibilité d’une panne de moteur ou autre urgence majeure au décollage. En cas de panne d’un moteur juste après le décollage et dans l’impossibilité de revenir à Iqaluit à cause de la mauvaise météo, l’avion aurait été forcé de franchir une très grande distance avec un moteur en moins pour se rendre à un aéroport de dégagement, augmentant les risques pour la sécurité des passagers.

La menace d’une infraction potentielle, qui a toujours été la prérogative des services de la circulation aérienne, a pour effet d’obliger les pilotes à attendre pour des conditions météo appropriées.

Un Boeing B-737 de NWT Air sur la voie de circulation et un Twin Otter de Bradley Air Services en courte finale pour la piste 36 à Iqaluit (1989)
Un Boeing B-737 de NWT Air sur la voie de circulation et un Twin Otter de Bradley Air Services en courte finale pour la piste 36 à Iqaluit (1989)
La tour de la station d'information de vol d'Iqaluit, avec en avant-plan un Boeing B-727 de First Air à l'atterrissage piste 36 (1990)
La tour de la station d’information de vol d’Iqaluit, avec en avant-plan un Boeing B-727 de First Air à l’atterrissage piste 36 (1990)
Un Boeing B-737 d'Air UK G-UKLB arrive à Iqaluit (vers 1989)
Un Boeing B-737 d’Air UK G-UKLB arrive à Iqaluit (vers 1989)
Un Boeing B-737 tout neuf de la compagnie Hapag-LLoyd (D-AHLL) vient d'arriver de Boeing Field à Seattle. Il se dirige ensuite vers l'Allemagne
Un Boeing B-737 tout neuf de la compagnie Hapag-LLoyd (D-AHLL) vient d’arriver de Boeing Field à Seattle. Il se dirige ensuite vers l’Allemagne.

(Prochaine histoire : la dame qui se fait voler son sac à main sous mes yeux)

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Histoires vécues en tant que pilote et FSS: apprentissage du pilotage

Des cellules orageuses imprévues.

(Histoire précédente: la licence de pilote professionnel / un pneu éclate à l’atterrissage)

Lors d’une chaude journée d’été de 1981, un instructeur de vol me demanda d’aller le chercher, avec un Cessna 150, à l’aéroport international Pierre-Elliott-Trudeau de Montréal. Les vents provenant du nord-ouest, la piste en usage était la 28. Alors que j’étais en étape finale, le contrôleur me dit : « Augmentez votre vitesse, vous avez un Boeing 727 derrière vous. ». Il réalisait que l’espacement entre mon monomoteur et le Boeing était trop serré. Il est très simple d’augmenter la vitesse d’un avion tout en conservant son altitude. On appuie sur la manette des gaz et la vitesse augmente. Cependant, quand l’avion est au-dessus du seuil de la piste, il a besoin de sa vitesse spécifique pour toucher le sol sinon il continue de voler jusqu’à ce que cette vitesse soit finalement atteinte. Il me sembla que le Cessna avait flotté durant une éternité avant de toucher la piste. Mais cela fonctionna tout de même, évitant au Boeing d’avoir à effectuer une approche manquée.

Je stationnai l’appareil près des bureaux de Transports Canada et attendis l’instructeur environ trente minutes. Le ciel se couvrait rapidement de nuages en cette fin d’après-midi, avec toute l’humidité présente. L’instructeur arriva finalement et comme nous commencions à nous diriger vers la piste, le contrôleur nous dit : « Vous devez accepter des vecteurs radars pour votre route de départ, à cause de la météo ». Quelle météo? Un front froid était à l’œuvre, mais rien de bien dramatique n’était visible de notre position. Si près du terminal de l’aéroport, les seuls nuages visibles étaient des cumulus bourgeonnants, sans plus. Son offre fut acceptée, à défaut de rester immobilisés sur l’aéroport.

Au décollage de la piste 28, au moment où j’effectuais un virage à gauche en direction de St-Jean-sur-Richelieu et que l’altitude était suffisante pour dépasser la hauteur du bâtiment du terminal, il devint évident que des vecteurs étaient nécessaires. Un orage s’était développé entre Montréal et St-Jean. D’un seul coup d’œil, nous pouvions observer ce qui ressemblait à cinq cylindres créés par des averses de pluie forte et où des éclairs jaillissaient à l’occasion. Il fallut donc voler entre les cylindres pour éviter les endroits les plus problématiques. Les ceintures de sécurité furent resserrées au moment où se produisaient les premières turbulences faisant considérablement varier notre altitude. L’atterrissage à St-Jean-sur-Richelieu se fit en douceur, hors de la zone météo problématique. Aujourd’hui, je ne referais plus ce genre de vol sans la présence à bord d’un radar météo digne de ce nom.

Quelques semaines plus tard, on me demanda si j’accepterais d’être commandant de bord pour un long vol voyage à travers le Canada. Cette offre inattendue représentait une belle occasion, surtout du fait que cela me permettrait d’inscrire plus de quarante heures de vol supplémentaires dans le carnet du pilote.

(Prochaine histoire: un vol à vue (VFR) de St-Jean-sur-Richelieu, Québec vers Edmonton, Alberta).

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